À trois mois du lancement de “Constantine, capitale de la culture arabe” Les dessous d’une manifestation budgétivore !

À trois mois du lancement de “Constantine, capitale de la culture arabe”  Les dessous d’une manifestation budgétivore !
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L’événement, que les autorités locales et centrales présentent comme un grand acquis pour le développement de la ville, consomme, dans sa phase préparatoire, un budget important sans qu’il apporte, pour l’heure, une satisfaction à la population. Les experts dénoncent, pour leur part, une défiguration des vieux quartiers et une intervention “désastreuse” sur les édifices anciens.

Constantine est en chantier. La ville se prépare à devenir, pendant une année entière à partir du 16 avril 2015, capitale de la culture arabe, dans un désordre indescriptible. Le centre des quartiers anciens est enserré dans les échafaudages. Les trottoirs des rues sont quasiment condamnés à la circulation des piétons, astreints de slalomer entre les barres de fer enchevêtrées. L’entreprise est particulièrement hasardeuse en cette deuxième semaine du mois de décembre, pluvieuse et très froide. Les commerces, qui ont pignon sur rue, sont cachés, difficiles d’accès. Les riverains, et même les gens de passage, s’accommodent mal de ces travaux qui perdurent dans le temps et compliquent considérablement leur quotidien. En janvier 2013 ont commencé les procédures administratives pour désigner les projets par le ministère de la Culture et les autorités locales afin de présenter le programme au Premier ministre.

“Depuis cette date, l’opération se poursuit tantôt bien, tantôt sous des contraintes”, reconnaît M. Foughali, directeur de la culture de la ville de Constantine. “Devant une wilaya qui a pris trop de retard et qui se retrouve depuis peu dans un état de chantier rendant le quotidien du citoyen à la limite de l’acceptable… Aussi, l’absence de communication pour la préparation de la population avant le lancement de ces travaux a eu un impact négatif”, corrobore le Dr Omar Mehsas, commissaire adjoint de la manifestation. Les autorités publiques, conscientes de la situation, gèrent tant bien que mal le malaise, avançant l’argument que la ville et sa population profiteront pleinement, a posteriori, des retombées de l’événement. Le Vieux rocher se doit de se parer de ses plus beaux atours pour abriter le statut que lui a dévolu l’organisation arabe pour l’éducation, la culture et les sciences (Alesco). “C’est une aubaine pour le développement de la wilaya au-delà de 2015… Cette manifestation peut redonner espoir aux citoyens dans tous les segments de la vie… toilettage des villes, des routes, du bâti, de la sécurité, des loisirs…, et aussi par les retombées économiques directes et indirectes”, poursuit notre interlocuteur. Du chaos naît l’ordre, dira-t-on dans l’absolu. Il n’en demeure pas moins qu’avant de percevoir les bienfaits potentiels d’une année de festivités culturelles et cultuelles, le projet suscite mécontentement, conflits et quelques embrouilles. Du côté officiel, on parle “d’embûches dans la constitution des dossiers, la recherche des bureaux d’études et des entreprises réalisatrices des projets. Après huit ou neuf mois, les choses se sont normalisées”, pour reprendre les explications de M. Foughali.

Dans un cadre moins formel, on évoque le désistement de plusieurs sociétés, retenues pour la réalisation des nouveaux équipements et la restauration des édifices anciens, ainsi que l’écartement, au milieu du parcours, de certains organismes gouvernementaux, tels que l’Agence nationale des grands projets culturels. L’on dénonce surtout des choix inappropriés. “Nommer ‘Constantine, capitale de la culture arabe’ pendant une année n’est pas une démarche fortuite. C’est l’une des plus vieilles au monde — trois fois millénaire — et elle a enfanté des personnalités qui ont marqué son histoire. Elle n’est pas stérile. Malheureusement, ce cumul civilisationnel a été ignoré parce qu’on n’a pas associé les gens de la ville dans la préparation de l’événement. Le choix des projets et des exécutants a été décidé à une échelle centrale”, relève M. Khelfi, architecte et président de l’association A25. Le programme retenu par les autorités compétentes se décline en quelques projets nouveaux et la restauration de 18 édifices et sites anciens. Il a été ainsi décidé de réaliser une salle de spectacle — le Zénith de Constantine — de plus de 3 000 places à proximité de l’aéroport de la ville. Dans le même périmètre est implanté le Palais des expositions réalisé par un groupement algéro-espagnol sur une superficie de 7 000 m2. La structure sera livrée, selon les prévisions, au mois de mars prochain. À quelques encablures se dresse l’hôtel Marriott, d’investissement public à 100%, mais dont la gestion est confiée à la chaîne hôtelière internationale. Le nouveau pont suspendu, baptisé au nom de l’écrivain natif de la région, Malek Haddad, est déjà réceptionné. Il a été conçu et réalisé par des Cubains.

LG Algérie

À partir de ces projets, localisés en périphérie de la vieille ville (à l’exception de l’ouvrage d’art), commence le parcours des 18 édifices inscrits dans le plan de rénovation et restauration. Il s’agit notamment du Palais de la culture

Malek-Haddad qui sera transformé en galerie d’art, le théâtre régional, les grandes mosquées, le tombeau de Massinissa, la maison d’Ibn Badis, des hammams, des zaouïas, des ruelles anciennes… Des travaux sont également entrepris sur l’ancien siège de la wilaya, construit dans le style néo-mauresque. Le bâtiment, niché en contrebas de la Souika, est cédé au ministère de la Culture, qui veut en faire un centre des arts. La mise en valeur du palais Ahmed-Bey est en cours. Sa reconversion est à l’ordre du jour au même titre que le palais de la culture Al-Khalifa. Les directions de wilaya et les particuliers, qui ont été délocalisés pour raison de travaux entrepris sur le palais de la culture Al-Khalifa, ne retrouveront pas de domiciliation dans l’enceinte de l’édifice, assure M. Foughali.