A-t-on oublié la Révolution ?

A-t-on oublié la Révolution ?

On est à la veille du 1er novembre. La commémoration du déclenchement de la Révolution est aussi une occasion de rappeler aux cinéastes, qui se plaignent du manque de scénario, qu’il leur suffit de faire parler un militant et écrire.

Comme chaque année à la veille de la commémoration du déclenchement de la Révolution, les chaînes de télévision, notamment nationales, rediffusent les films des années 1960-1970 tels que La bataille d’Alger et L’opium et le bâton. Cela devrait inciter ceux qui se plaignent de sujets. Si les anciens cinéastes tels qu’Ahmed Rachedi ou Amar Laskri qui était un ancien moudjahid, il était plus facile de traiter de la Révolution puisqu’ils l’avaient vécue, nos jeunes réalisateurs et scénaristes peuvent bien recueillir des témoignages ou s’adresser carrément au centre de recherche sur la Révolution de 1954. Si Yacef Saâdi n’avait rapporté que ce qu’ont fait les moudjahidine avec lesquels il avait milité, notamment Ali La pointe, Bouhamidi, le petit Omar, Hassiba Benbouali,  les trois Djemila, et tous les membres de la Zone autonome d’Alger, on pourrait bien raconter l’histoire d’autres grands militants qui avaient réalisé un combat aussi rude que celui d’Ali La Pointe et ses amis.

De belles histoires

A Constantine, les personnes d’un certain âge peuvent bien relater à un scénariste l’histoire de Hamlaoui, de Fadéla Saâdane et bien d’autres. A Blida, l’histoire du fidaï Cherif qui avait tué plus de vingt policiers, soldats français et traîtres en les ciblant par une balle sur le front pour chacun est aussi un bon sujet de film.  A Oran, Annaba, Alger, Béjaïa ou ailleurs, chaque ville, chaque quartier a vécu une histoire durant la Révolution. Les scénaristes pourraient bien revenir sur les histoires d’évasion spectaculaires dont celle  d’Ahmed Benbella qui avait réussi avec une dizaine de prisonniers à fuir de la prison de Blida qui était pourtant très bien gardée. Ces scénaristes peuvent également s’adresser à l’association des anciens condamnés à mort qui peuvent leur rapporter leur vécu dans les geôles du colonialisme et l’attente difficile d’être appelés pour être exécutés, c’est-à-dire de se voir trancher la tête par le bourreau chargé d’actionner la guillotine (El Finga). On devrait profiter des moudjahidine et fidayine encore vivants pour nous raconter leur actions contre l’armée française. Les anciens détenus des prisons et ceux qui ont passé des séjours dans les camps de concentration peuvent tous relater leur vécu. On veut voir dans nos films comment les Algériens étaient torturés. Les jeunes devraient savoir ce qu’est la gégéne, la baignoire ou la goutte japonaise. On devrait consacrer des films sur les méfaits des sanguinaires qu’étaient Massu, Bigeard, Papon et les autres. On devrait aussi réaliser des films sur ces Français qui avaient, malgré tous les risques, choisi de prendre les armes aux côtés des Algériens. Parmi ces français, il y avait des militants dont l’histoire est connue, notamment Maurice Audin, Henri Maillot, mais il y avait aussi d’autres militants et militantes tels que Miriam Ben, cette femme écrivaine qui avait été condamnée à 20 ans de travaux forcés. On peut raconter l’histoire de ces Algériens et Algériennes qui avaient espionné des cadres supérieurs français au profit du FLN. Il y avait même parmi eux une Algérienne qui travaillait pour le FLN au moment où elle était secrétaire d’un ministre français.

Le meilleur des sujets

Nos scénaristes et cinéastes peuvent bien raconter toutes ces histoires. Ils peuvent se rapprocher de l’association des anciens du MALG pour en avoir d’autres. On aimerait bien voir des films sur ceux qui sont morts au niveau des lignes électrifiées Challe et Morice.  C’est vrai qu’on a déjà vu de tells images mais cela reste toujours insuffisant. Il y a quelques jours, il y a eu la sortie du film Nous n’étions pas des héros de Nasreddine Guenifi. Le réalisateur a adapté le livre Le camp du militant Abdelhamid Benzine, qui montre les conditions de détention dans les camps spéciaux, notamment la torture. L’exemple de Guenifi doit être suivi. Il y a des livres, il y a des témoins. Il suffit de vouloir pour trouver un sujet et la Révolution est en est le meilleur.

    Bari Stambouli