Obama n’est pas si sûr d’engager les Etats-Unis dans une nouvelle guerre
A partir de «convictions» qu’aucune preuve ne vient conforter, l’administration du président américain Barack Obama est prête à lancer une machine de guerre qui risque de ne plus être arrêtée.
L’heure de vérité approche pour Obama sur la Syrie. Le monde a désormais les yeux rivés sur le Congrès américain, où l’issue du vote sur le recours à la force apparaît de plus en plus incertain. Conscient de jouer à la fois la crédibilité des Etats-Unis et de sa propre présidence, Barack Obama devait lancer une offensive tous azimuts pour convaincre les élus républicains et démocrates.
Il devait enregistrer pas moins de six interviews avec des chaînes de télévisions diffusables à compter d’hier soir, avant de s’adresser le lendemain aux Américains depuis le bureau Ovale. Au Sénat, le débat sur la résolution autorisant l’usage de la force, déjà adoptée en commission, ne commencera formellement qu’aujourd’hui. Un premier vote important pourrait intervenir dès demain. A l’heure actuelle, la résolution sur les frappes prévoit une durée limite de 60 jours, prolongeable à 90 jours, et l’interdiction de déployer des troupes de combat au sol.
A Paris, le président français François Hollande prêt à s’associer à des frappes, a promis de s’adresser à son opinion, mais après le vote du Congrès et la remise du «rapport des inspecteurs» de l’ONU qui ont enquêté sur l’attaque présumée chimique du 21 août dans les faubourgs de Damas. Pour la plupart des Etats de l’UE, ce rapport attendu dans les jours à venir est une étape essentielle, susceptible de confirmer de manière indépendante les accusations de recours aux gaz toxiques. Pour autant, le rapport ne devrait pas établir qui est à l’origine de ces attaques. Selon la presse américaine, le Pentagone se prépare à des frappes pendant trois jours, avec un barrage massif de tirs de missiles de croisière.
Le secrétaire d’Etat américain John Kerry achevait hier à Londres son offensive diplomatique en Europe sur la Syrie alors que le monde attend désormais le vote du Congrès américain sur le recours à la force demandé par Barack Obama. Le chef de la diplomatie américaine a déclaré à Londres lors d’une conférence de presse conjointe avec son homologue britannique, William Hague, que «la fin du conflit en Syrie passait par une solution politique», affirmant qu’ «il n’y avait pas de solution militaire». William Hague, dont le gouvernement a dû renoncer à s’associer à une intervention en Syrie après un veto du parlement, a quant à lui assuré les Etats-Unis du «soutien diplomatique total» du Royaume-Uni. Interrogé sur les propos rapportés d’Assad, le secrétaire d’Etat John Kerry a répondu que «les preuves parlaient d’elles-mêmes». Pour tenter de convaincre les élus américains, les plus hauts responsables de l’administration Obama devaient à nouveau hier se rendre au Capitole pour des réunions d’informations à l’aide de vidéos montrant des victimes de l’attaque et diffusées en boucle sur les chaînes américaines.
Une majorité d’Américains opposés à une intervention en Syrie
Six Américains sur dix se disent opposés à une intervention militaire en Syrie, bien qu’une majorité tienne le régime du président Bachar al-Assad responsable d’attaques chimiques contre son peuple, selon un nouveau sondage publié hier.
Selon une enquête CNN/ORC International réalisée auprès de 1022 personnes avec une marge d’erreur de 3 points, 59% des Américains ne souhaitent pas que le Congrès vote une résolution autorisant le recours à la force en Syrie, même limité.
Plus de sept sur dix affirment que des frappes ne serviraient pas les intérêts américains. Même si le Congrès autorisait des frappes, 55% s’opposeraient toujours à une opération contre des cibles militaires syriennes. Mais 57% des personnes interrogées affirment que le vote de leurs élus en faveur ou contre des frappes n’influencera pas leur vote lors des élections législatives de novembre 2014.
Selon un décompte réalisé par le quotidien USA Today, seuls 44 des 533 élus américains se sont déclarés en faveur d’une intervention à ce jour, alors que 149 ont exprimé leur intention de voter contre (Chambre des représentants et Sénat combinés). La plupart des élus restent indécis. Le sondage CNN publié hier confirme une tendance observée dans d’autres enquêtes d’opinion, notamment de l’institut Gallup qui indiquait vendredi que 51% des Américains étaient opposés à une intervention militaire, contre 36% favorables.