A la rencontre de Coulibaly, le «bourreau» de l’USMA

A la rencontre de Coulibaly, le «bourreau» de l’USMA

Les Usmistes, notamment Saïd Allik, se souviendront beaucoup de Siaka Coulibaly, le gardien de but de l’USFA recruté par le club en décembre 1999. Toute l’Algérie se souvient sans doute de ce gardien, par rapport au gros problème qu’il avait créé au club en mars 2000, qui restera gravé à jamais dans les mémoires de tous les Usmistes. Tout a commencé à la mi-mars, lorsque l’USMA s’est rendue à Niamey pour affronter l’US Ténéré. Vainqueurs de la Coupe d’Algérie, en 1999, aux dépens de la JSK, les Rouge et Noir ont donc pris part à la Coupe des coupes africaines. Pour le compte des seizièmes de finale de la C2 de l’époque (ndlr : cette compétition n’existe plus maintenant), l’USMA devait jouer l’US Ténéré, à Niamey, à l’aller et le recevoir au retour sous la coupe de Mustapha Heddane comme entraîneur. Mais lors du match aller, l’entraîneur du représentant nigérien connaissait parfaitement Siaka Coulibaly pour l’avoir eu sous sa coupe à la sélection burkinabée. C’était lui-même qui l’avait pris en équipe A, alors qu’il avait à peine vingt ans. Connaissant son histoire, il avait tout raconté à ses responsables qui ont émis des réserves après le match, alors que Coulibaly croyait que son ex-entraîneur ignorait tout de sa situation, puisqu’il était dans l’armée burkinabée. N’ayant pas le droit d’aller jouer à l’étranger, il avait alors falsifié un document. Bref, la CAF avait lourdement sanctionné les Rouge et Noir de Soustara, en accordant la victoire aux Nigériens sur tapis vert, avec en sus une interdiction au club de participer aux différentes coupes africaines pour une durée de cinq ans, avant que la suspension ne soit revue à la baisse, alors que le joueur a été conduit vers la prison où il avait payé pour sa grosse faute. Profitant de notre présence ici à Ouagadougou, nous avons tout fait pour le rencontrer afin qu’il nous raconte sa version des faits. Après plusieurs tentatives, nous avons pu le rencontrer à la réception de l’hôtel Splendid où il a profité de cette occasion pour présenter ses excuses aux Usmistes, en général, et en particulier à l’ancien président Saïd Allik. On vous laisse le soin de découvrir l’interview.

«Je présente mes excuses à tous les Usmistes, notamment Allik»

Tout d’abord, que devient Siaka Coulibaly ?

Eh bien, c’est toujours le même. Je jouais l’an dernier à l’USFA, mon équipe de toujours, mais cette saison, je n’ai pas renouvelé ma licence. J’ai quelques contacts et j’attends que ça aboutisse.

Il y a Mali-Algérie à Ouagadougou. Seriez-vous présent dimanche prochain au stade ?

Bien sûr que je serai présent au stade pour voir le match et supporter l’Algérie, un pays que j’aime beaucoup.

Pourtant, la majorité des Burkinabés seront aux côtés du Mali…

Je le sais, mais ce ne sera pas la même chose pour moi. J’ai vécu des moments inoubliables en Algérie. On a été accueillants avec moi et je n’oublierai jamais les moments que j’ai passés chez vous.

Revenons à votre expérience en Algérie, précisément avec l’USMA…

J’ai atterri à l’USMA en 2000. Je jouais avec les militaires et je n’avais pas le droit de quitter le Burkina Faso. Je me suis rendu à Alger, j’ai joué un match amical USMA-MOC et ça été concluant. Mais ce que je dois préciser, c’est que les militaires avaient refusé de me laisser partir. Donc, j’ai ramené un faux document pour que je puisse être qualifié à l’USMA.

Il y a eu donc falsification de document ?

Pour être bien précis avec vous, tous mes documents étaient conformes et comme les militaires ont refusé de me laisser partir, je n’ai pas pu avoir la lettre de transfert internationale. C’est ce document-là que j’ai falsifié pour que je puisse être qualifié en Algérie. A ce moment-là, j’ai pensé à mon avenir parce que la vie ici au Burkina Faso est très difficile.

Qui vous a fourni ce fameux document ?

C’est un Ghanéen qui vivait ici et maintenant, je pense qu’il est retourné chez lui, car après ce problème, lui aussi était recherché.

Toute cette histoire avait commencé à Niamey lors du match aller des seizièmes de finale de la Coupe des coupes africaines face à l’US Ténéré…

Oui, c’est vrai. C’est l’entraîneur saboteur, Idrissa Traoré, qui a tout fait. Avant le match, on avait discuté ensemble pendant longtemps, car il me connaissait. C’était lui qui m’avait convoqué en équipe nationale A du Burkina Faso, alors que j’étais jeune. A la fin du match, il est allé leur dire qu’un militaire burkinabé en fonction était là. J’ai alors découvert les réserves fournies par les dirigeants nigériens. Le secrétaire de l’USMA était venu me demander si c’était vrai. Moi à l’époque, j’étais encore jeune, j’ai donc répondu par la négative. J’avais peur.

Le fait que tous les photographes nigériens étaient tous venus vous prendre en photo ne vous a pas intrigué ?

Non, je me souviens de ce moment avant, pendant et après le match. Ça m’avait beaucoup marqué. Mais tout ce qu’a dit ce saboteur était un peu gonflé. Je n’étais pas un militaire en fonction.

Et que s’est-il passé après le match ?

Après le match, je devais rentrer au pays, à Ouagadougou, pour voir ma famille. D’ailleurs, l’entraîneur saboteur le savait déjà avant le match, après avoir discuté avec lui.

Donc, vous avez voulu fuir, c’est ça ?

Non, pas du tout. Cela a été décidé avant le match. J’avais discuté avec le président Allik et il m’avait autorisé à aller chez moi pour voir ma famille, juste après US Ténéré-USMA. Ce saboteur (ndlr : Idrissa Traoré) était resté alors à Niamey et a communiqué toutes les informations me concernant, à la gendarmerie locale. J’ai donc pris la route pour rejoindre mon domicile à partir de Niamey et là, on m’a arrêté à mi-chemin. Comme j’étais un militaire, je n’avais pas le droit de quitter mon pays pour un autre pays sans autorisation.

Et la suite ?

Après avoir été arrêté et relâché, Allik, le secrétaire et un journaliste étaient venus et sont intervenus. On est restés par la suite autour d’une table et je leur ai expliqué le problème et que tout ce qu’a dit le saboteur n’était pas vrai. Il avait dit que mes faux papiers étaient en Algérie, ce n’était pas vrai. Mes faux papiers, je les ai obtenus au Burkina Faso. Allik n’était pas au courant de cette histoire de faux papiers, comme l’a dit le saboteur.

Et après avoir été relâché, vous êtes rentré au Burkina Faso…

Oui, je suis rentré au Burkina Faso et là, tout le monde était au courant, car la presse nigérienne avait relaté les faits. Même l’armée nigérienne avait saisi son homologue burkinabée. Sur le coup, on m’a emmené en garde à vue pendant une semaine, puis c’est la gendarmerie locale qui a pris l’affaire en main. J’ai été convoqué à trois reprises et après avoir raconté toute la vérité, je suis resté en prison pendant plus d’un mois. La Fédération burkinabée m’a suspendu pour un an, avant de retrouver la compétition. Je suis même revenu en équipe nationale et joué en Algérie lorsque Cherradi était parmi le staff de l’EN d’Algérie. Même en 2006, j’ai joué à Kadiogo et je suis retourné à Alger pour jouer face à l’USMA.

Après votre suspension et l’élimination de l’USMA en Coupe d’Afrique, qu’avez-vous ressenti ?

Une énorme déceptio. Je ne vous cache pas que j’ai regretté mon geste. Si je savais que ça allait être comme ça, je serai resté à l’USFA. L’élimination de l’USMA m’a fait trop mal. Tout le continent africain a parlé de cette affaire, et j’ai appris l’élimination de l’USMA à travers la presse étrangère, alors que j’étais toujours en garde-à-vue. J’étais jeune et je n’avais pas mesuré la gravité de mon acte. Vraiment, c’est dommage !

Un dernier mot aux Usmistes…

Je profite de l’occasion pour présenter mes excuses aux supporters de l’USMA qui m’avait adopté. Je demande pardon au président Allik qui a été correct avec moi. Au contraire, c’est à cause de cette affaire que son nom a été grillé, puisqu’il était bien placé pour être le président de la Fédération algérienne de football.