A défaut de travail et de loisirs ,Les cybercafés, refuge des jeunes villageois

A défaut de travail et de loisirs ,Les cybercafés, refuge des jeunes villageois

Dans les villages enclavés, les jeunes sans emploi, et ils sont très nombreux, ne trouvent d’autre espace pour échapper à la morosité de leur quotidien que d’aller dans un cybercafé.

Pour ces jeunes, se noyer dans le monde virtuel de la Toile pendant de longues heures leur permet d’oublier, du moins momentanément, le calvaire de leur dur quotidien. En l’absence d’horizons prometteurs pour leur avenir, ces jeunes sont contraints de vivre «au jour le jour», sans trop de calculs. «On se lève souvent tard, car on n’a rien à faire la matinée. On se rend en ville, on prend un café et on passe directement au cyber le plus proche. Chaque jour, c’est le même scénario qui se répète», lancent certains jeunes, habitant au village Aït Ali, dans la commune de Frikat, à une cinquantaine de kilomètres au sud de Tizi Ouzou. Comme des centaines de milliers de leurs semblables à travers les différentes régions du pays, ces jeunes se réfugient, donc, dans ces espaces Internet où ils se «noient» dans le monde de la Toile, qui les fait voyager et surtout rêver de lendemains meilleurs. «Nous passons notre temps à télécharger des films et de la musique, mener des discussions sur les sites de socialisation et parfois faire des recherches sur n’importe quelle question qui nous vient en tête.» Au centre-ville de Draâ El-Mizan, il est d’ailleurs difficile de trouver une place dans les nombreux cybercafés, au point que les propriétaires sont souvent en quête de moyens leur permettant de réaliser des extensions afin de répondre à une demande de plus en plus importante. Dans la commune de Haizer, à l’est de Bouira, le constat est le même. Des jeunes venant des villages environnants «occupent» les cybercafés qui constituent, selon eux, une parade contre l’oisiveté et l’ennui mortel qui empoisonnent leur vie. «Nous n’avons pas où aller à part les cybercafés. Ici, nous ne gênons personne et nous ne risquons pas de créer des problèmes. Chacun se connecte à ses sites préférés jusqu’à la fin de la journée. S’il n’y avait pas ces espaces, on ne sait vraiment pas ce qu’on aurait fait», disent certains jeunes venus du village Allouane, sur les hauteurs de Tikjda. «Cette réalité amère nous oblige à nous réfugier dans ces cybercafés, car il n’y a rien à voir ni à espérer dehors», lance, Samir 35 ans, sur un ton dépité. «Les cybercafés sont devenus des repères incontournables pour ces jeunes. Si vous cherchez quelqu’un, vous n’avez qu’à vous rendre ici», confirme Hakim, le gérant de ce commerce, ajoutant que certains villageois y restent jusqu’à des heures tardives de la soirée. «Il y en a même qui réservent leurs places à l’avance afin d’être sûrs de pouvoir passer leur journée ici. Pour les clients fidèles, certains gérants de cybercafés accordent même des facilités de paiement, et parfois une heure de connexion gratuite. «Allah Ghaleb, ces jeunes travaillent rarement et on doit les arranger afin de ne pas s’ennuyer davantage», affirment des gérants de cybercafés à Draâ El-Mizan, Bouira et Tizi Ghennif. C’est dire que l’esprit de solidarité parvient aussi à atténuer le malaise des jeunes des villages enclavés, en attendant des lendemains meilleurs…

A.H