À Constantine, s’y sont mis tardivement pour dénicher les meilleurs bons plans pour profiter de la vingtaine de jours qui reste du mois d’août : à la veille de la fête de l’Aïd, les agences de voyages recevaient encore les confirmations de réservations. Un séjour à l’étranger ou une semaine dans une ville balnéaire, le choix dépend de beaucoup de choses : budget, temps et visas. Si au niveau local, les plages de Jijel remportent un franc succès dans la région grâce essentiellement aux possibilités d’hébergement qu’offre la ville, la destination Tunisie est de loin la plus prisée par les Constantinois pour les vacances à l’étranger.
Les embuscades tendues aux militaires ces derniers jours et la rumeur sur la fermeture de la frontière ont toutefois brouillé la donne, les professionnels du tourisme, notamment les propriétaires des agences de voyages qui font de bonnes affaires avec la destination Tunisie, redoutent une baisse de la fréquentation ou pire l’annulation des réservations. Après deux années difficiles suite à la révolution du Jasmin, les affaires reprennent tout doucement, du moins avant les derniers attentats et les manifestations de l’opposition contre l’actuel gouvernement. Nadjib Benhacine, propriétaire de l’Agence tourisme voyages (ATV) de Constantine — devenu en quelques années un spécialiste de la destination Tunisie — est confiant et s’attend à une meilleure progression de la demande. “Les gens sont encore hésitants ou pour certains découragés. Il y a eu, certes, quelques annulations mais rien de grave.
Je pense que la plupart des personnes, même les familles qui ont réservé, partiront à Hammamet ou Sousse, parce qu’elles ont pris l’habitude de fréquenter les plages tunisiennes. Il faut savoir que depuis la révolution, les Algériens, par crainte de tomber sur des bandits, voyagent en majorité le jour et beaucoup d’automobilistes forment des cortèges afin d’éviter quoi que ce soit. Mais le fait notable cette année, c’est le retour en force des touristes étrangers. Ce qui explique que nous avons eu quelques difficultés pour la disponibilité du produit, les Tunisiens donnent la priorité aux Européens qui remplissent les hôtels six mois durant l’année, alors que les Algériens partent seulement durant la saison estivale.” Des jeunes Constantinois, qui passent souvent leur été en Tunisie, nous ont signalé que cette année les prix sont chers par rapport à l’an dernier, malgré cela ils sont décidés à y aller. Le gérant de l’agence ATV nous explique cela. “Les prix ont augmenté de 10 à 40%, ça dépend de l’endroit et de l’hôtel. Mais cette hausse est due non pas en raison de la rareté ou l’indisponibilité de lits, car nous réservons nos places à l’avance durant l’hiver, mais tout simplement à cause de la cherté de la vie en Tunisie. J’avoue que jusqu’à présent, il y a moins de réservations que l’année dernière, mais je pense que d’ici deux à trois jours (juste avant l’Aïd), les clients viendront car la plupart réservent à la dernière minute.” Pour se faire une idée sur les tarifs proposés par cette agence, le séjour d’une semaine à Hammamet le moins cher est à partir de 32 000 DA par personne dans un hôtel classé avec seulement un petit-déjeuner. Boubaker et sa femme, qui souhaitent réserver une semaine dans un hôtel à Hammamet en “all inclusif” sont encore indécis sur le choix de l’hôtel, mais ce qui est sûr, c’est qu’ils devront payer plus de 120 000 DA. “Les prix sont élevés cette année, mais nous n’avons pas de choix. Faute de visas et de places disponibles pour un vol à destination de la Turquie, il nous reste seulement la Tunisie. Je pense qu’un all inclusif nous coûtera entre 120 000 et 140 000 DA dans un quatre étoiles, mais je préfère cette formule que de dépenser de l’argent dans les restaurants. Ça nous évitera aussi de sortir de l’hôtel, car ce que je recherche c’est la tranquillité et la plage”, nous déclare Boubakar. Son cousin a, quant lui, dû débourser la somme de 92 000 DA pour réserver pour lui et sa femme une chambre à l’hôtel Bravo 4 étoiles en demi-pension, le même hôtel aurait coûté, il y a trois ou quatre ans, moins de 50 000 DA. La directrice de l’agence Nouvelle Ere, installée aussi à Constantine, pense également que les derniers événements en Tunisie sont passagers et qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter car, malgré tout, “hormis une annulation, tout va bien. La Tunisie reste de loin la destination la plus prisée par nos clients”. Idem pour un responsable de l’agence Numidia Travel Service qui pense que “les frontières ont été fermées à ce qu’il paraît, mais je doute que ça aura une incidence directe sur le départ de l’après-Aïd. Les gens viennent normalement réserver même s’il faut s’attendre à tout. Pour être franc, le grand rush n’a pas encore eu lieu, mais c’est une question de jours. Quant aux prix, les hôtels les plus convoités ont gardé les mêmes tarifs ou bien ils ont augmenté sensiblement.” Preuve que la destination Tunisie est très demandée cet été : aux derniers jours du Ramadhan, il était très difficile pour les voyageurs de se procurer la quittance de droit de passage de 500 DA au niveau de l’hôtel des fiances où il y avait une foule nombreuse.
Concernant la deuxième destination préférée des Constantinois, en l’occurrence la Turquie, M. Benhacine avoue que si les réservations de chambres ne posent pas de problème, la disponibilité des billets d’avion semble constituer un obstacle. “Ou bien nous ne trouvons pas de places ou bien les billets sont chers. En moyenne, un séjour en Turquie (Istanbul ou Antalya) coûte 120 000 DA par personne. La Turquie qui est très demandée est nettement plus chère que l’Espagne.”
Notre interlocuteur regrette qu’il n’y ait pas de vols directs entre Constantine et Istanbul.
“Tout est concentré sur Alger et on ne comprend pas pourquoi il n’y a pas de vols à partir de Constantine. Pourtant, selon les statistiques, 60% des personnes qui partent vers la Turquie sont originaires de l’est du pays”, nous a-t-il déclaré.
D. B