Dans un texte publié récemment, l’ancien ministre des Transports, Ferhat Aït Ali, dresse un constat sévère sur l’état du parc national de bus et propose une réorganisation en profondeur du secteur. Selon lui, les solutions actuelles, limitées au maintien du système existant, ne font que reproduire les problèmes accumulés depuis des décennies.
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Aït Ali rappelle que le parc de bus en Algérie compte environ un millier de véhicules, dont une partie est totalement hors service. Ces bus, explique-t-il, ont en moyenne quarante ans d’âge. Leur remplacement coûterait, au prix actuel sur le marché international, plus de dix milliards de dollars et nécessiterait au minimum cinq années, même en s’approvisionnant auprès de constructeurs chinois.
Algérie : Ferhat Aït Ali plaide pour une refonte du transport urbain
L’ancien ministre souligne également l’incapacité des transporteurs privés à financer de nouveaux véhicules. Leurs revenus sont jugés insuffisants, comparables en précarité à l’état de leurs bus, tandis que les banques refusent d’accorder des crédits sans garanties solides. Cette équation, selon lui, condamne de facto le renouvellement du parc dans sa forme actuelle.
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Pour sortir de l’impasse, Ferhat Aït Ali plaide pour une réorganisation structurelle. Il propose la relance des entreprises publiques de transport urbain dans les grandes villes, avec la mise en circulation de 10 000 bus modernes financés par l’État.
Dans le reste du pays, il suggère de favoriser la création de grandes sociétés privées capables de gérer un parc suffisant pour desservir des villes d’au moins 100 000 habitants. Ces entreprises devraient disposer de centres de maintenance, de moyens de contrôle technique, ainsi que de camions de dépannage pour chaque trentaine de bus.
Ferhat Aït Ali alerte : « Le parc de bus algérien à bout de souffle »
Parallèlement, il estime que les banques doivent adapter leurs mécanismes de financement en allongeant la durée des crédits à dix ans, ce qui correspond aux deux tiers de la durée de vie d’un véhicule. Le Trésor public, de son côté, devrait prendre en charge les intérêts liés au renouvellement du parc.
S’agissant des propriétaires actuels de bus, Aït Ali reconnaît qu’ils se trouvent dans une impasse économique et sociale. Le prix des billets ne couvre pas les charges, et il est impossible de l’augmenter en raison du pouvoir d’achat limité des usagers. Il propose que l’État rachète les véhicules encore exploitables selon leur valeur résiduelle, et mette au rebut ceux qui représentent un danger. Leurs propriétaires pourraient être réemployés au sein des nouvelles sociétés publiques ou privées, après formation et contrôle.
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Pour l’ancien ministre, il ne s’agit pas seulement d’un enjeu économique, mais aussi de sécurité, d’image et d’organisation urbaine. « Tout investissement dans l’ancienne structure ne ferait que reproduire les mêmes problèmes », avertit-il. Le transport urbain, conclut-il, est un secteur structurant qui ne peut survivre morcelé en milliers de petites entités fragiles. L’Algérie, selon lui, doit suivre l’exemple des pays avancés ou renoncer à l’ambition de devenir un pays moderne.