7 Octobre 1961 : Une monstruosité commandée par l’infâme Maurice Papon

7 Octobre 1961 : Une monstruosité commandée par l’infâme Maurice Papon

actualite2[18030].jpg17 octobre 1961 – 17 octobre 2011

50 ans après, la France officielle continue d’ignorer et de cacher une des pages sombres de son histoire coloniale. Cependant des voix s’élèvent pour dénoncer cette attitude et réclamer toute la vérité sur les évènements tragiques afin que ce crime d’Etat soit reconnu par les plus hautes autorités de la République française.

Accusé pour son implication dans la déportation des juifs en 1942, Maurice Papon, alors préfet de police de Paris à l’époque, n’a jamais été accusé pour sa barbarie envers les Algériens. Un crime contre l’humanité occulté dans le pays de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Une monstruosité commandée par l’infâme Maurice Papon

Le préfet de police de Paris Maurice Papon n’a jamais été poursuivi pour la barbarie de la répression des Algériens dans la capitale francaise alors qu’il était aux commandes. Deux poids deux mesures puisqu’il a été condamné en 1998 pour crimes contre l’humanité en raison de son implication dans la déportation des juifs en 1942.

Le massacre du 17 octobre 1961 n’est pas un événement tiré du néant. Depuis plusieurs semaines déjà, les Algériens étaient victimes d’exactions pour le simple fait d’être algériens. « L’évidence est là : la jonction que nous redoutions en avril entre les tortionnaires d’Alger, et les tortionnaires de M. Papon est réalisée dans les faits. Les méthodes de masse instaurées à Alger par le général Massu et les colonels Godard et Trinquier ont été transplantées à Paris. La Seine charrie des noyés qui évoquent les noyés de la baie d’Alger, les crevettes du colonel Bigeard ».

Cette citation est extraite du journal « Vérité liberté Cahier d’information sur la guerre d’Algérie » publié clandestinement » à partir de mai 1960. Il publie dès son numéro 13, daté de novembre 1961, un dossier spécial sur le massacre des Algériens le 17 octobre 1961. Au lendemain des événements tragiques, les journaux parisiens, risquant la censure ou la saisie, avaient informé sur la gravité de la répression, tels L’Express, France nouvelle, France-Observateur, Témoignage chrétien et même le Figaro, malgré les dénégations du pouvoir. « Vérité-Liberté » va plus loin en dénonçant la barbarie, faisant le parallèle avec des événements encore proches dans la mémoire des Fran-çais : « Au cœur même de Paris, à la préfecture de police, M. Papon fait tuer cinquante Algériens désarmés. Comme les juifs pendant l’occupation, la comparaison a été faite immédiatement par les Français et par les Algériens et nul doute qu’elle ne soit fondée (…) Les Algériens ont été traqués comme des bêtes, et la chasse au faciès a remplacé la recherche de la circoncision ».

Ainsi, entre la concentration des Algériens dans le Palais des sports par centaines en octobre 1961, et la rafle des juifs en juillet 1942, un même homme infâme apparaît : Maurice Papon. Dans les coulisses en 1942, préfet de police de Paris depuis 1956, après avoir été préfet de Cons-tantine entre 1956 et 1958. Il n’a jamais été poursuivi pour son « organisation contre le FLN » qui a signifié des centaines de victimes algériennes en 1958 et 1962. Maurice Papon avait toujours dit à ses policiers et aux supplétifs harkis : « quoi qu’il arrive, vous êtes couverts ». Lui-même était couvert par son ministre. Plus tard, bien après qu’il ait atteint le sommet de l’Etat en devenant ministre, Papon a été jugé et condamné pour crime contre l’humanité, pas pour le massacre des Algériens, non, mais en raison de son implication dans la déportation des juifs pendant la Seconde Guerre mondiale…

Dans le journal « Vérité liberté », dont l’histoire reste encore à écrire, signaient des gens comme Pierre Vidal-Naquet, Robert Barrat, Paul Ricoeur, Vercors, Jean-Marie Domenach… et bien d’autres figures de l’humanisme français comme Jean-Paul Sartre ou encore Jacques Panijel qui tournera des images du 17 octobre 1961, et dont le film, « Octobre à Paris » restera interdit en France durant des années. Son auteur, décédé en 2010, verra sa carrière de cinéaste largement compromise. Le film sort enfin cette année dans le cadre du 50e anniversaire.

Dans un numéro des Temps modernes (saisi à l’imprimerie), l’éditorialiste accuse le préfet de police : « Avec Papon nous n’avons plus que le visage nu de la haine raciste. Du ghetto au couvre-feu, des raids de harkis au lynchage organisé, une logique infernale l’a conduit à ce soir du 17 octobre. Alors, froidement, délibérément, il a donné le signal du pogrom, il a couvert la ratonnade : il a lâché ses flics sur les Algériens comme on lâche les chiens dans la curée. Mais du coup, il est allé trop loin et la situation se renverse. Entre ces policiers bottés, casqués, mitraillette au poing, la matraque levée, hurlant des injures, et ces hommes droits sous les coups, dont les frères tiennent en échec depuis sept ans la plus puissante armée coloniale des temps modernes, il n’était pas besoin d’hésiter longtemps cette nuit-là, pour savoir qui était vainqueur. Soudain s’étalait en pleine rue, au cœur de la capitale, ce que dissimulait jusqu’alors l’ombre des commissariats et des caves » (in Vérité Liberté n°13).

« La manifestation algérienne a été pour beaucoup et même jusque dans la classe ouvrière le révélateur d’un racisme latent », écrit le journal Vérité Liberté qui cite les propos d’un conseiller municipal de Paris qui préconisa « le rembarquement de tous les Algériens dans des ba-teaux », précisant « quant au problème de couler les bateaux, ce n’est pas du ressort du conseil municipal ». L’élu ne sera pas pour autant inquiété pour un tel appel au meurtre.

Nassim AMEUR

Le PS demande une reconnaissance officielle par la France

Le Parti socialiste (PS) a demandé hier que la France reconnaisse officiellement les « évènements tragiques » du 17 Octobre 1961 à Paris, durant lesquels des centaines d’Algériens ont été tués pour avoir manifesté pacifiquement contre le couvre-feu discriminatoire qui leur a été imposé quelques jours auparavant par le préfet d’alors, Maurice Papon. « Le Parti socialiste demande que la France reconnaisse officiellement ces événements tragiques et facilite l’accès aux archives pour les historiens, dans un esprit de justice et de vérité », indique un communique du PS, signé par le premier secrétaire du Parti par intérim, Harlem Désir, et le secrétaire national à la coopération, à la francophonie, à l’aide au développement et aux droits de l’homme, Pouria Amirshahi. Le PS rappelle qu’il y 50 ans, les forces du préfet de police Maurice Papon « réprimaient avec une brutalité injustifiée et meurtrière une manifestation pacifique d’Algériens défendant le droit à l’égalité et l’indépendance de l’Algérie », ajoutant que le bilan fut « dramatique : plusieurs milliers d’arrestations, plusieurs centaines de morts noyés dans la Seine ou frappés à mort ». « Cette page sombre de notre histoire a longtemps été ignorée ou masquée. Il est aujourd’hui temps que notre pays reconnaisse ces faits et que les responsabilités dans les violences commises soient établies et reconnues. Il est temps pour notre pays de rendre hommage à ces victimes et à leur mémoire », indique-t-il. Pour le deuxième parti politique en France, cette reconnaissance « permettra enfin d’avancer réellement vers la pleine réconciliation entre les peuples français et algérien, essentielle pour bâtir de nouvelles relations tournées vers notre avenir commun ».