Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a adressé un message à l’occasion des cérémonies officielles commémoratives du 69e anniversaire des massacres du 8 mai 1945, abritées par la wilaya de Bouira, lu en son nom par Mohamed Ali Boughazi, conseiller auprès de la présidence de la République.
En voici la traduction :
Mesdames, Messieurs,
Nous commémorons, ce jour, le souvenir douloureux d’une tragédie nationale dont les affres ont atteint le peuple algérien jusqu’aux tréfonds de son âme.
En pareil jour, il y a de cela 69 ans, les Algériens ont été victimes d’un massacre sanglant. Notre peuple fut privé, à dessein, de jouir, à l’instar des autres nations et peuples en liesse, de l’issue de la deuxième guerre mondiale pour laquelle des dizaines de milliers de jeunes algériens ont été enrôlés, abusés par de fausses promesses.
Les Algériens, sortis manifester pacifiquement, avaient montré leur capacité d’appréhension du monde en mouvement et du nouveau cours de l’Histoire amorcé par la création de l’Organisation des Nations unies, et des concepts progressistes appelant à l’autodétermination des peuples et à la protection des droits de l’Homme.
Malgré l’atrocité de ce massacre abject, le 8 mai 1945 fut le jour témoin qui consacra l’effondrement de tous les enjeux, à l’exception d’un seul, celui de l’option, inévitable, de l’émancipation et de l’affranchissement, en comptant sur l’aide de Dieu Tout-puissant et en misant sur l’unification des rangs autour de la lutte armée pour le recouvrement de la liberté.
Ce fut alors, l’argument qui a anéanti les illusions de ceux trompés par des promesses d’égalité et d’intégration, confirmant ainsi que les Algériens allaient inévitablement payer un plus lourd tribut.
Ce qui arriva quelques années plus tard, avec le déclenchement de la glorieuse Révolution de novembre, dernière halte, décisive, qui a tracé la voie pour les enfants de la patrie et leur devenir.
Le 8 mai a avivé, au sein des Algériens opprimés, l’ardeur de l’abnégation et du sacrifice par le sang et unifié leurs rangs pour que la parole devienne la leur.
Une parole qu’ils ont clamée haut et fort et la tragédie de mai s’est transformée en les hauts faits de novembre. Puisse Dieu accorder sa Miséricorde aux martyrs et les rétribuer pour les grands sacrifices consentis pour la patrie et la liberté.
Mesdames, Messieurs,
Il est un devoir, en ce moment où nous commémorons ce mémorable anniversaire, de souligner, même succinctement, certaines préoccupations de l’heure en rappelant qu’il est important pour tous les Algériens, indépendamment de leurs obédiences, de mesurer la solidité de la passerelle qui les lie à ces martyrs.
Une solidité qui se mesure à l’évaluation de nos actes et de leur conformité aux aspirations et espérances des martyrs qui ont sacrifié leur vie pour leur concrétisation.
Nous nous devons d’intégrer cette valeur dans notre vécu et ainsi seulement s’affirmeront notre appartenance à la patrie et notre algérianité et nous parviendrons, en dépit de la différence des vues et opinions, de nous rassembler autour de ce qui est susceptible de nous unir, de nous fortifier et de nous prémunir contre la confrontation fallacieuse qui tend à semer la division et la mésentente et faire répandre l’irresponsabilité et le désordre.
Depuis quelques semaines, l’élection présidentielle a eu lieu sur la base da la compétition loyale entre les différents programmes qui attestent, tous, du progrès louable enregistré en matière d’ancrage du pluralisme et de respect de ses règles et fondements. Lors de cette élection, le peuple algérien a affirmé, avec volonté et liberté, sa position et son choix.
Il m’a honoré, dans sa majorité écrasante, en me renouvelant sa confiance et en me confiant la responsabilité de diriger le pays et de parachever les étapes engagées sur la voie de l’édification et de la stabilité. Je demeure par conséquent, pleinement conscient du sens profond de cet honneur, voire de cette responsabilité.
Je veillerai, avec l’aide de Dieu, et après que mon programme eut été cautionné par les Algériennes et Algériens, à la préservation d’une Algérie forte dans tous les domaines.
Les prochaines étapes seront à la fois celles de l’effort et du labeur, et je m’emploierai prochainement, à réaliser l’engagement pris pour opérer un changement profond dans la constitution et encourager la promotion de la vie politique, économique et sociale de manière à consacrer une Algérie forte orientée vers le progrès et la modernité.
La construction d’un Etat fort et juste reposant sur la liberté, les valeurs morales, des institutions s’acquittant de leurs devoirs dans les limites de leurs prérogatives, le respect de la liberté du citoyen et la garantie de son progrès et de sa prospérité dans le cadre d’un équilibre entre droits et devoirs, ne saurait se réaliser sans la conjugaison des efforts dans la sérénité et l’unité loin de la haine et de la discorde.
Il ne s’agit pas ici d’un appel à la restriction de la liberté d’opinion et de critique ni du droit à la différence car ce sont des composantes de l’incontournable construction démocratique.
Il est plutôt question de la réunion de toutes les volontés nationales dans un esprit de solidarité, de coopération et de concorde en vue de consolider les bases de ce que nous entendons réaliser et d’asseoir les fondements permettant la pleine mise en œuvre du nouveau programme dans les meilleures conditions possibles.
En vérité, la démocratie ne veut pas dire crispation, invective et intimidation et une démocratie saine ne se construit pas sur la discorde systématique et les antagonismes.
Certaines situations exigent de mettre les différends de côté et de se focaliser sur les dénominateurs communs pour sauvegarder les intérêts suprêmes de la nation et du pays.
Nombre de défis sérieux existent tant sur le plan extérieur, aux niveaux régional et international, que sur le plan intérieur, à l’instar de la consolidation de l’Etat de droit et de la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption, la construction d’un système économique fort reposant sur les ressources propres, la diversité, le raffermissement du tissu social, la protection sanitaire et la promotion de l’enseignement, tous paliers confondus.
Certains de ces défis ne tolèrent aucun atermoiement. L’élan de tous les enfants de l’Algérie et la conjugaison de leurs énergies s’imposent pour les relever.
Nous sommes face à une nouvelle étape du processus de construction qui fonde l’avenir et qui nous impose de donner la chance aux nouvelles générations et aux jeunes compétences que recèle notre pays afin qu’elles puissent apporter leur concours à l’édification et à la protection du pays.
La négligence dans le travail, dans la création de la richesse et dans l’accomplissement des devoirs ne peut plus durer et l’exploitation des ressources naturelles dont Dieu nous a gratifiés et qui appartiennent aux générations futures ne saurait persister avec la consommation inutile, la mauvaise gestion et le manque d’intérêt pour le travail productif et créateur dans tous les domaines d’activité.
Les nations qui ont misé sur l’effort et le dur labeur se sont développées alors que celles qui ont compté sur les revenus de leurs hydrocarbures sont demeurées à la traîne de même que, par le passé, les révolutions qui se sont appuyées sur l’énergie de leurs enfants ont été couronnées de succès alors que celles qui ont mis leur destin entre d’autres mains ont échoué.
Aussi, devons-nous tirer les enseignements de cet anniversaire et nous résoudre à servir le pays et à aller de l’avant dans le processus de construction et d’édification ».