Dans un entretien qu’il a bien voulu accorder au quotidien El Moudjahid, le ministre de l’Education nationale, M. Boubekeur Benbouzid, a répondu à nos questions concernant les différentes étapes de la réforme de l’école algérienne.
Sans pour autant occulter les lacunes recensées dans son secteur, le ministre s’est volontiers prêté au jeu des questions-réponses.
Est-ce que tous les établissements scolaires au niveau du Sud sont suffisamment dotés en climatiseurs ?
Effectivement la climatisation n’est pas venue comme ça et n’a jamais été le fruit d’un hasard. C’est une décision qui a été prise pour donner les moyens aux différentes régions du pays afin qu’elles puissent composer en même temps sur des programmes nationaux qui nous amènent automatiquement à organiser les examens nationaux. Actuellement, nous sommes pratiquement à 90% de la couverture de tous nos besoins du Sud. Cette année, je pense que ça sera la dernière année où nous allons couvrir tous les besoins, aussi bien dans le primaire que dans le moyen et le secondaire.
Monsieur le ministre, comment expliquez-vous le déficit en encadrement pour les langues vivantes dans la zone du Sud ?
Il faut savoir qu’avant le lancement de la réforme, le français par exemple n’était pas la première langue étrangère prioritaire, c’était beaucoup plus une langue au choix. Depuis la réforme, la langue française est devenue la première langue étrangère obligatoire et l’anglais, de part son importance, la deuxième langue étrangère. Le français auparavant avait perdu de son influence et avait pratiquement disparu du système éducatif, en raison de plusieurs facteurs, particulièrement durant la décennie noire, comme vous le savez, surtout dans les régions déshéritées. Au niveau des wilayas du Sud, les langues étrangères et le sport avaient pratiquement disparu en tant que matières. C’est la réforme qui a réhabilité tout cela. Pour le moyen terme, nous avons conçu un plan d’urgence qui consistait à ouvrir des postes budgétaires pour le Sud, tout en donnant la possibilité aux enseignants du Nord d’aller au Sud en leur offrant des logements. Nous avons aussi ouvert des postes pour les retraités, nous avons comblé quand même une grande partie du déficit. Mais nous n’avons pas couvert tous les besoins. Jusqu’à présent, le manque se fait encore ressentir. Actuellement, nous avons ouvert des universités, notamment dans le domaine des langues étrangères dans toutes les universités du pays et particulièrement au Sud. Cette année et à titre d’exemple, pour ne citer que Laghouat où nous avons ouvert une ENS qui va former davantage d’enseignants de français, outre la formation d’enseignants dans d’autres spécialités.
Nous savons que chaque année, vous mettez tout en œuvre pour satisfaire les enseignants contractuels, quelles seront les actions que vous allez déployer pour répondre aux aspirations des enseignants cette année ?
Les enseignants contractuels seront régularisés définitivement cette année, sachant qu’ils sont au nombre de 29.000 au niveau national. Ils vont occuper tous les postes qui sont vacants jusqu’à présent. Ils sont 7.000 à être régularisés, il ne restera que 20.000 qui ne répondent pas à tous les critères (ils sont licenciés dans une spécialité et recrutés dans une spécialité qui n’est pas la leur). Le recrutement des enseignants doit se faire selon la spécialité de la licence, par exemple un professeur de mathématiques doit être licencié et spécialisé dans la matière, de cette manière nous allons renforcer l’encadrement, relever la qualité et automatiquement améliorer les résultats de nos enfants.
C’est pour cette raison que nous disons qu’il faut aller dans cette direction, autrement nous allons employer des enseignants qui ne vont pas répondre à nos besoins et donc ne vont pas aller dans le sens de la qualité que nous voulons. Cependant, les 20.000 seraient régularisés, petit à petit, en fonction premièrement des critères arrêtés et afin de ne pas recruter n’importe comment et de ne pas toucher notre système qualitatif. Une fois ses 29.000 enseignants recrutés, il n’y aura plus de postes inoccupés et le secteur de l’éducation nationale aurait fait le plein et nous n’aurons plus besoin d’enseignants.
Vous avez affirmé lors de votre visite dans la wilaya de Tindouf, qu’il y aura une table ronde avec les syndicats du secteur éducatif, ça sera pour quand ?
Dès aujourd’hui, mes collaborateurs au niveau du ministère sont à pied d’œuvre. Ils vont commencer à aplanir les difficultés que nous rencontrons dans l’élaboration d’une stratégie de gestion des œuvres sociales. Vous savez déjà que ces œuvres étaient gérées, par le passé, par un syndicat unique UGTA, pour des conditions historiques que chacun sait. Je saisis cette occasion pour lui rendre hommage.
Aujourd’hui, Dieu merci, la multiplicité, la démocratisation du pays a fait que nous avons maintenant une multitude de syndicats qui sera appelé dans le cadre de la loi, à travers leurs enseignants, à travers leurs adhérents, à participer d’une manière indirecte à la gestion de ses œuvres.
Il faut dire que ces dernières ne seront pas gérées par les syndicats, ils seront gérés par ceux qui seront élus au niveau des établissements, parce que nous allons procéder à des élections, dès le mois d’octobre, qui nous permettront de manière démocratique et transparente de dégager ceux qui seront à l’avenir responsabilisés pour gérer ces fonds, tant importants.
Maintenant la pyramide de gestion sera discutée avec les syndicats, moi je suis pour les aider à trouver la formule la plus intelligente qui réponde aux besoins des enseignants. Nous allons nous atteler durant ces journées à rassembler les points de vue, les aider à trouver un compromis.
Le ministère n’est pas partie prenante dans la gestion des œuvres sociales, n’empêche que nous sommes-là pour faciliter le travail, aider les enseignants, les rapprocher les uns des autres et trouver une gestion intelligente qui permettra de dépasser les difficultés que nous avons vécues par le passé.
Les enseignants soulèvent aussi un problème très important, il disent avoir bénéficié du régime indemnitaire, il s’est avéré par la suite qu’il y avait une inégalité dans la distribution de ces régimes indemnitaires, je leur avait dit que nous allons trouver les modalités pour évaluer cette comparaison, si un différentiel est constaté au niveau de ce que les autres secteurs ont reçu par rapport au secteur de l’éducation, ce différentiel au détriment des enseignants serait donné par le gouvernement, donc il n’y a pas lieu de s’inquiéter, il y aura une égalité dans les versements du régime indemnitaire et nous allons rectifier, aussi vite, les points noirs où les enseignants estiment être lésés.
Je me déclare optimiste concernant tous les problèmes qui ont été posés. Les enseignants ont subi un problème, que je trouve moi aussi injuste, le statut particulier des enseignants de 2008 sera aussi corrigé.
Nous avons mis en place une commission. Ce statut sera corrigé, il y aura des passerelles à l’intérieur qui manquent dans le cadre du statut général de la fonction publique de 2008, qui est déjà une loi nationale, les imperfections constatées dans ce statut seront corrigées avec les enseignants. Je vais plus loin pour leur dire qu’un délai sera fixé, pas au-delà du mois de décembre de l’année en cours, le temps de remettre une copie au gouvernement, pour sortir avec un statut beaucoup plus élaboré et beaucoup plus complet.
Interview réalisée
Le SNTE veut une révision du statut particulier des employés du secteur
Le Syndicat national des travailleurs de l’éducation (SNTE) demande que la tutelle procède à la révision du statut particulier des employés du secteur de l’Education à propos du régime indemnitaire et des œuvres sociales. Le texte actuel « lèse les travailleurs et les employés de l’éducation et ne répond ni à leurs revendications ni à leurs droits légitimes par rapport aux autres secteurs », a précisé le secrétaire général du SNTE, M. Abdelkrim Boudjenah, lors d’un point de presse dimanche à Alger.
Un conseil national extraordinaire ouvert s’est tenu samedi au siège de l’Institut national de formation des travailleurs de l’éducation d’ El-Harrach dans un contexte de rentrée sociale et scolaire marqué par « un blocage dans la mise en œuvre des engagements du ministère contenus dans le procès-verbal commun entre le ministère de l’Education nationale et le syndicat conclu en avril dernier et portant accord sur les dossiers en suspend », a poursuivi l’intervenant. Plusieurs lacunes ont été enregistrées concernant le classement, le point indiciaire, les primes et allocations et l’insertion des travailleurs de l’éducation, et ce, en raison de « la précipitation » de certains syndicats. Ainsi le SNTE exige la révision de cette loi dans « le moindre détail », a-t-il indiqué. M. Boudjenah a exprimé l’attachement du syndicat à la série de revendications soumises au ministère en avril dernier appelant à la tenue d’assemblées générales de wilayas avant le 25 septembre pour arrêter la date et les modalités de protestations. Il a rappelé que son instance comptait plus de 250.000 adhérents et qu’elle « soutenait les coordinations et leurs composantes en dépit de certaines parties qui tentent de saper ses efforts ».