L’intégration économique à travers le secteur privé en vue de construire un ensemble régional à même de trouver sa place dans un monde globalisé, a polarisé les débats lors du 3e forum des entrepreneurs maghrébins qui se tient depuis lundi à Marrakech (sud du Maroc).
L’ensemble des intervenants dans les différentes sessions plénières ont insisté sur cet impératif pour que cet ensemble se concrétise et puisse jouer son rôle à l’image des autres regroupements économiques.
Dans son intervention par vidéo-conférence, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde a indiqué que le secteur privé peut être déterminant dans la réussite de cette intégration, en plaidant l’harmonisation des systèmes financiers des pays du Maghreb, la suppression des barrières douanières et non-tarifaires en instaurant les échanges formels pour prendre le relais de l’informel.
De son côté, le directeur du département Maghreb au groupe de la Banque mondiale, Simon Gray a insisté dans son intervention sur le fait que « le Maghreb uni n’est plus une option, mais plutôt une obligation si la région ne veut pas rater le train de la mondialisation », soulignant que les pays de cette région « doivent miser sur leurs potentiels et complémentarités économiques pour réussir leur intégration et développer leur commerce intra-régional ».

Selon lui, le secteur privé est plus à même d’identifier les opportunités d’affaires et de collaboration régionale sur la base des expériences de terrain et en fonction des expertises sectorielles des uns et des autres, estimant qu’il est de la responsabilité de tous les acteurs dans les cinq pays de l’Union du Maghreb arabe (UMA) de promouvoir l’idée d’ouverture régionale, de faciliter l’accès aux marchés, d’établir des chaines de valeur ou de production régionales.
Déclarant le Maghreb comme la région la moins intégrée dans le monde avec 3% de commerce d’échange inter-régional de marchandises, M. Gray a estimé le manque à gagner du non-Maghreb à 3 et 9 milliards de dollars pour la région. Il a considéré qu’avec un marché intérieur de plus de 80 millions de consommateurs, l’intégration ne peut qu’entraîner des gains d’efficience et rendre la région plus attrayante pour les investisseurs étrangers.
Le partenariat et le transfert de technologie des leviers pour l’intégration maghrébine
Quant à David Laborde Debucquet, chercheur à l’International Food policy reseach institute (IFPRI, Washington), l’intégration doit se faire par l’exploitation de toutes les potentialités et la suppression notamment des droits de douanes et des mesures administratives afin d’atteindre le niveau du Mercosur (marché commun de l’Amérique du sud), un bloc économique de la taille de la région du maghrébine.
Dans son exposé, il a prévu une croissance de 2% s’il y a intégration avec un effet sur le Produit intérieur brut (PIB) de 3 à 9 milliards de dollars par an pour l’ensemble de l’UMA. Il a affirmé que l’intégration aura des effets sur le commerce, sur les différents secteurs avec une spécialisation et une augmentation de l’emploi qualifié.
Pour cela, a-t-il dit, l’intégration doit être impulsée par la base contrairement à l’Union européenne (UE) ajoutant que le secteur privé doit jouer son rôle dans l’identification des problèmes tout en qualifiant le secteur des services comme « fer de lance » du mouvement.
Pour sa part, Jean-Louis Guigou, délégué général de l’Institut de prospectives économiques du monde méditerranéen (IPEMED), il a préconisé pour cette intégration la recherche d’un partenariat, le transfert de technologie et la mise en place d’une stratégie industrielle par filière.
Enfin Moono Mupotola, manager en charge de l’intégration régionale et du commerce à la Banque africaine de développement (BAD), a axé son intervention sur la nécessité de l’intensification du commerce en Afrique du nord avec l’intégration de l’Egypte avec comme perspective d’œuvrer dans le sens d’un marché commun où les investissements occuperont une grande importance.
Placé sous le thème « l’intégration économique: un pacte de prospérité partagé » ce forum de deux jours se déroule avec la participation des cinq organisations patronales des pays de l’UMA et de plusieurs acteurs économiques et institutionnels de la région.
L’Algérie est présente avec une forte délégation, conduite par Boualem M’rakech, président de la Confédération algérienne du patronat (CAP) représentant plusieurs secteurs dont l’industrie lourde, l’industrie manufacturière, le BTPH, l’agroalimentaire, le tourisme et les services, textiles, cuirs et peaux.
Les travaux portent sur diverses questions ayant trait à la relance de l’intégration économique maghrébine qui sont discutées en sessions plénières et en ateliers thématiques.
Les sessions plénières sont axées sur « Combien coûte le non Maghreb? », « Comment réussir l’intégration régionale? Benchmark et échange d’expériences », « Investir dans un pays maghrébin autre que le sien: témoignages croisées d’entrepreneurs, et « Aperçu sur l’initiative maghrébine du commerce et de l’investissement.
Dans les sessions thématiques, les participants débattent de « Comment parachever la convergence douanière et réglementaire? », « Intégration logistique: le nécessaire maillage pour la réussite du commerce », « Quel marché du travail et quel dialogue social maghrébins », « Construire le Maghreb de l’énergie » et « Les services comme support à l’intégration maghrébine ».
La rencontre est organisée par la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), au nom de l’Union maghrébine des employeurs (UME).
Créée le 17 février 2007 à Marrakech sous l’impulsion de l’UMA, l’UME se compose outre de la CAP, de la CGEM, du Conseil du patronat libyen (CPL), de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA) et de la Confédération nationale du patronat mauritanien (CNPM).
Le premier Forum des entrepreneurs maghrébins s’est tenu en mai 2009 à Alger et le second en mai 2010 à Tunis.