Les services du ministère de la Justice affirment que «des terroristes et des familles de harkis ont tenté de changer leur nom».
Est-il facile de changer de nom en Algérie lorsque ce patronyme peut porter des préjudices moraux et psychologiques? La question mérite d’être posée. «Depuis 2006, pas moins de 11 décrets présidentiels comportant 1243 nouveaux noms de famille ont été signés et publiés dans le Journal officiel», selon le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, qui a indiqué que «17 autres décrets présidentiels concernant 1930 nouveaux noms de famille sont prêts et seront soumis prochainement au président de la République pour signature».
En plus de ces décrets, les services des juridictions compétentes ont procédé au changement de plus de 3700 noms de famille, des patronymes considérés comme injurieux.
Les services du ministère de la Justice nous informent que les demandes de changement de nom sont en relative baisse ces dernières années. Cependant, les services concernés sont toujours sollicités.
Même si cette démarche est consacrée par la loi, il n’en reste pas moins que les contraintes bureaucratiques sont tenaces..Toute personne désirant changer son nom de famille doit impérativement formuler une demande auprès du ministre de la Justice, garde des Sceaux.
Mais le processus ne s’arrête pas là. Dans un premier temps, l’intéressé est dans l’obligation de motiver sa demande. Les motifs doivent être sérieux et objectifs, tels que le fait d’avoir un nom ignominieux, obscène ou à consonance étrangère.
L’argumentation peut s’avérer peu efficace dans certains cas. Ce qui revient à dire que la demande de changement de nom peut être rejetée dans le cas où l’intéressé aurait l’intention de dissimuler une identité suspecte. En ce sens, le garde des Sceaux a affirmé, lors d’une séance plénière, il y a de cela quelques mois que «des terroristes et des familles de harkis ont tenté de changer leur nom».
A la réception de la convocation concernant sa demande «il (l’intéressé) s’engage devant le magistrat près du tribunal dans le ressort duquel est situé son lieu de résidence, que sa demande de changement de nom ne vise pas à dissimuler une identité suspecte», précise le ministère de la Justice. «Je veux changer mon nom de famille mais comme je n’arrive pas à assez motiver ma demande je me retrouve coincé» confie un citoyen abordé dans le cadre de ce reportage.
Le demandeur doit impérativement donner le motif précis qui lui permettra ainsi de changer son nom. Aussi, le changement de patronyme doit obligatoirement, faire l’objet d’une publicité pour vérifier l’éventualité d’une opposition, et ce, dans un délai de six mois.
Le tiers peut, par le biais d’une lettre adressée au ministre de la Justice, garde des Sceaux, former opposition dans un délai de six (06) mois à compter de la date de publication de l’annonce dans les journaux quotidiens.
Le site du département de Tayeb Belaïz indique qu’à l’expiration du délai susmentionné, les dossiers complets sont soumis à une commission interministérielle composée de représentants des ministères de la Justice, de l’Intérieur et des Collectivités locales, laquelle commission est chargée aussi d’examiner les oppositions formées par les tiers à l’encontre de l’auteur de la demande.
Une fois toutes ces exigences remplies, le changement de nom s’effectuera alors en vertu d’un décret présidentiel promulgué par le Président de la République, et publié au Journal officiel. Cela dans le cas de noms ignominieux, obscènes ou à consonance étrangère. Il y a un autre cas. En effet, la deuxième raison est due aux litiges familiaux.
Dans ce cas précis, la procédure ne sera pas facile pour ne pas dire impossible. Pourtant, au cours de ces dernières années, «les demandes de changement de noms dues aux litiges familiaux sont les plus fréquentes», ont expliqué des agent de l’état civil d’une mairie de la banlieue algéroise.
«Le nombre de personnes désirant changer de noms de famille est en diminution ces dernières années», ont fait remarquer ces mêmes services. Il est utile de signaler que ces noms de famille difficiles à porter sont hérités de la période coloniale.
Plusieurs familles se sont retrouvées dans cette situation psychologique plus qu’inconfortable. Les requêtes ont été satisfaites dans leur majorité.
«Plusieurs familles ont changé leur nom de famille durant la période allant de l’indépendance jusqu’aux années 2000», nous ont affirmé les mêmes sources. Sur le plan de l’épanouissement, les sociologues et les psychologues nous expliquent que les noms jouent un rôle important dans l’évolution de la personnalité. Mettre fin à ce type de calvaire équivaut à une renaissance.
Smail DADI