Le débat autour du projet de loi sur l’audiovisuel à l’Assemblée populaire nationale (APN) s’est poursuivi hier. Les députés des différents groupes parlementaires siégeant à l’hémicycle ont apporté plusieurs amendements au texte tel que présenté avanthier par le ministre de la Communication, Abdelkader Messahel.
Outre d’avoir appelé à l’activation de la loi sur l’audivisuel et à l’accélération de la mise en place de l’autorité de régulation pour laquelle de nombreux parlementaires ont émis des réserves sur la manière de désigner ses membres, la commission de la culture, de la communication et du tourisme de l’APN a introduit plusieurs amendements au projet de loi qui compte 107 articles.
Ces amendements ont touché 26 dont l’article 7 qui a suscité des appréhensions chez les professionnels, notamment du secteur privé, désirant investir dans le domaine, le considérant comme une restriction de la liberté de la presse.
Par ailleurs, la veille, les députés bien que partagés sur certains points contenus dans le nouveau texte, ont tous été sur la même longueur d’onde pour appeler à l’instauration de règles dans le cadre de la loi relative à l’activité audiovisuelle qui permettent la création de chaînes de télévision respectant l’éthique de la profession et les exigences du service public.

Djelloul Djoudi, député et numéro 2 du PT, prévient contre «une ouverture de malversations »
Le Parti des travailleurs (PT), favorable à l’ouverture du champ audiovisuel dans le cadre «du respect de l’éthique de la profession de journaliste», insiste sur «le rôle important de l’information publique dans la diffusion d’une information objective et crédible».
Il estime que certains articles dudit projet doivent être renforcés pour que cette ouverture ne soit pas un moyen de malversations pour le blanchiment d’argent ou pour toucher aux acquis de la Nation, rappelant à ce propos l’expérience de l’Algérie vécue en 2004 avec la chaîne Khalifa.
Aussi hormis ces garde-fous, le PT se dit contre les restrictions contenues dans le nouveau texte qui exclut les chaînes générales. Se joignant à l’intervention, Smain Kouadria, député PT, soulignera que son parti est «pour plus de protection pour les travailleurs de la corporation».
A ce sujet, il indiquera que son groupe parlementaire «proposera un amendement à cette loi pour l’extension de la convention collective de l’audiovisuel du secteur public vers secteur privé».
En outre, il fera part d’un projet de loi bientôt soumis à l’APN pour la création de mutuelles sociales pour une retraite complémentaire des travailleurs du privé.
Me Mostefa Bouchachi, député FFS, défenseur des droits de l’homme : «Une dangereuse régression»
Qualifiant la nouvelle mouture sur l’audiovisuel de «dangereuse régression en matière de liberté d’expression, nullement honorable pour l’Algérie», il considérera que ce projet est plutôt «venu fermer le champ audiovisuel, loin de consacrer la liberté d’information et d’expression que se soit en termes de délivrance d’autorisation ou de contrôle des futures chaînes qui, en l’absence totale de l’autorité judiciaire seule habilitée à intervenir en cas de litige, encourent le risque d’être gelées voire dissoutes sur des décisions administratives».
Aussi, dénoncera-t-il l’impartialité et l’intégrité de l’autorité de régulation de l’audiovisuel dont les membres sont désignés par le président de la République, le président du Sénat ainsi que le président de l’APN, qui constitue un véritable danger pour la liberté de l’information et l’idée de l’ouverture de l’audiovisuel en Algérie.
Seddik Chihab, député RND : «Les lois sont faites pour être révisées»
«Un bon projet qui vient encadrer l’activité audiovisuelle. Bien sûr qu’il permet l’ouverture du champ médiatique, mais il est clair qu’une loi n’est jamais satisfaisante, toutefois elle a le mérite d’exister et de baliser cette ouverture. Sachant que les lois sont faites pour être révisées, je pense qu’une fois le train sur les rails, il y aura une révision».
Sur le quiproquo créé par l’article 5 de la nouvelle mouture sur l’audiovisuelle, Seddik Chihab rappellera la décision du ministre de tutelle de porter une révision à cet article pour que les chaînes soient «un peu générales». Par ailleurs, interrogé sur ce que le ministre a qualifié d’«erreur», le député RND évoquera «les pressions que subit le législateur ».
Dr Naamane Laouar, AAV : «Une façon intelligente de fermer le champ médiatique»
Considérant la nouvelle mouture «comme une façade pour l’opinion internationale», le député de l’Alliance de l’Algérie verte dira que le texte, tel que présenté, «ne vient pas régler la question de l’ouverture du champ audiovisuel». A l’ère de la mondialisation, c’est un discours dépassé qui ne répond pas à ce qui se fait ailleurs.
Se disant «pour une équité entre le public et le privé, une concurrence loyale, qui fait défaut actuellement, pour permettre la crédibilité de ces chaines, pour un véritable professionnalisme », il estimera qu’«il ne servira à rien d’ouvrir d’autres chaînes pour avoir la qualité de celles existantes actuellement, du moins certaines d’entre elles».
Le parlementaire s’indignera également de la limitation du nombre de chaînes qui, selon lui, est une voie à la spéculation et à la corruption. S’attaquant au rôle assigné à l’Autorité de régulation de l’audiovisuel (ARAV), il a déploré l’absence du secteur de la justice dans le règlement des infractions.
L. N. B.