Le quartier Diar Echem’s a encore été le théâtre de violentes échauffourées durant toute la journée d’hier. Durant les premières heures de la matinée, une centaine de jeunes acharnés se sont mis à la recherche de pneus à brûler et autres bouteilles pour la fabrication de cocktails Molotov.
Le Temps d’Algérie a eu l’exclusivité d’assister aux différents plans mis en place. Des pierres commençaient à pleuvoir sur la chaussée et la circulation est bloquée avec des poteaux électriques et autres barres de fer arrachées des abribus saccagés pour l’occasion. Des personnes plus ou moins âgées ont tentés d’intervenir afin de calmer les esprits en exhibant des documents provenant de la wilaya d’Alger.
En exclusivité, le responsable de la commission des habitants de Diar Echem’s a bien voulu nous en dire un peu plus. «Le wali d’Alger nous a appelés hier pour clarifier la situation, ils nous a promis le relogement des familles de trois bâtiments d’ici la fin février 2010.» Et d’ajouter : «Nous allons rencontrer le wali pour la deuxième fois samedi afin d’établir les listes et arrêter les modalités de transfert des familles.»
Les jeunes et autres adultes qui nous ont entourés se sont révoltés contre cette décision : «Nous allons tous partir d’ici ou rien, le wali veut qu’on s’entretue. Qui sera relogé et qui devra encore attendre ?» Furieux, Salim déclare : «Je dors dans la cage d’escalier, et ça dure depuis 22 ans.
Mes trois enfants sont tous atteints d’asthme et d’infection urinaire qui a touché les reins.» Et de s’interroger : «Pouvez-vous vivre sans toilettes ?» Un quinquagénaire qui habite la cité depuis 1967 a été doublement victime durant la décennie noire : «J’ai perdu deux de mes enfants, dois-je attendre encore ?» Les émeutiers n’ont font qu’à leur tête. Il est 14h et l’émeute reprend de plus belle.
La benne à ordures du quartier déplacée sur la route principale, le feu est mis aux pneus et les automobilistes renvoyés. La brigade antiémeute dépêchée sur les lieux ne pouvait contenir la manifestation vu son ampleur.
Les bombes lacrymogènes, un moyen de dispersion ?
Une centaine de jeunes munis de couteaux de boucher, de sabres et de haches déferle. Une demi-heure a suffi pour qu’une pluie de pierres s’abatte sur les policiers qui ripostent avec les mêmes projectiles. Une femme de 65 ans a été gravement blessée par une pierre à la tête.
La pression monte d’un cran
Les manifestants étaient prêts à tout, les policiers serrent les rangs, notamment après l’enregistrement de deux blessés graves dans leurs effectifs. Le premier a été atteint à l’œil et un autre avait la jambe fracturée. La situation était incontrôlable. La décision de lancer des bombes lacrymogènes a été prise et le feu vert donné.
Les émeutiers redoublent de férocité et s’attaquent aux policiers en civil à l’aide de sabres, atteignant l’un d’eux. Les manifestants, quant à eux, ont enregistré des blessés graves touchés par des projectiles. Des enfants en bas âge ont été évacués vers les hôpitaux. C’est l’étouffement. Les brigades antiémeute usent de coups de sommation afin de disperser la foule en furie.
Vers 15h30, un renfort de manifestants arrive des quartiers avoisinants et afflue en nombre pour aider les manifestants. Ce qui a poussé les policiers à reculer et parfois même à battre en retraite. Des brigades de police sont encore dépêchées sur les lieux des affrontements. La situation est grave.
Le P/APC d’El Madania aux abonnés absents
Le président de l’Assemblée populaire communale d’El Madania a brillé par son absence durant ces deux jours d’affrontements. Sa secrétaire nous informe qu’il est en réunion et qu’il n’est pas disponible avant 18h. Notre déplacement aux locaux de l’APC a été vain. Aucun responsable ni élu ne voulait nous recevoir.
C’est la démission totale des édiles de la municipalité. Selon des indiscrétions, le P/APC de la commune aurait été convoqué par le wali et promis aux résidents de Diar Echem’s de trouver une solution dans les plus brefs délais. Promesse que les habitants de la cité ont commenté : «Le jour où il tiendra ses promesses, sachez que ce sera la fin du monde.
Il a déjà promis de nous reloger avant cet hiver et nous sommes encore là.» Au moment où nous mettons sous presse, les affrontements se sont accentués et des brigades d’élite sont appelées en renfort pour éteindre le brasier.