2E ÉDITION «JOURNÉE DU DESIGN ITALIEN DANS LE MONDE» : Pragmatisme moderne entre authenticité et biodiversité

2E ÉDITION «JOURNÉE DU DESIGN ITALIEN DANS LE MONDE» : Pragmatisme moderne entre authenticité et biodiversité

Le Musée d’art moderne et contemporain accueille depuis le 10 mars et jusqu’au début avril, une très belle exposition de haute facture dédiée au design à la fois italien et algérien, et ce sous le thème de la durabilité.

Une expo qui entre dans le cadre de la 2e édition «Journée du design italien dans le monde» où une centaine d’événements sont organisés depuis le 1er mars 2018, simultanément dans plus de 100 villes dans le monde.

L’Algérie n y échappe pas et ce, grâce aux efforts fournis par l’Institut culturel italien en collaboration avec le ministère de la Culture, le Musée d’art moderne et contemporain et l’Ecole supérieure des beaux-arts d’Alger. Pour cela, une soixantaine d’oeuvres ont été présentées au public le jour du vernissage, réalisés par 30 designers algériens et italiens sous le thème «Design et durabilité» pour la partie algérienne et «l’âme des petites choses» pour la partie italienne.

A propos de «ce projet spécial» entamé depuis l’année dernière, la directrice de l’Institut culturel italien prenant la parole avant l’ouverture de l’expo, fera remarquer: «On a fait beaucoup de chemin ensemble. Ça promet pour le futur». Pour l’ambassadeur italien en Algérie «placer cette 2ème édition sous le thème de la durabilité, ça veut dire que la créativité est combinée avec l’utilité» et d’indiquer: «Techne est un mot grec qui veut dire art et technique.

L’application de l’art au design est quelque chose d’important» et de faire savoir «cette expo est marquée par la présence de nombreux designers algériens. Il y a des objets qui ont été réalisés pendant les ateliers avec des étudiants de l’Ecole nationale supérieure des beaux-arts, ces derniers jours». Il relèvera «la possibilité de continuer cette manifestation» car l’expo dure jusqu’au début du mois d’avril «où on va clôturer avec un autre événement au niveau académique qui va nous donner la possibilité de vérifier comment le design a un impact même au niveau de la ville et de l’urbanisme. Je suis content du fait qu’on a travaillé ensemble. Le but n’est pas de faire la promo du design italien. Il est déjà connu dans le monde entier. Ce qui est intéressant est de travailler ensemble, surtout avec les jeunes algériens qui ont démontré avoir beaucoup de créativité. Cette créativité doit se transformer en quelque chose de productif..». Dans son allocution de bienvenue pour sa part, Feriel Guesmi, commissaire de l’expo dans sa partie algérienne, n’omettra pas de rappeler que cette expo a «été une mission pas facile car on a monté cet événement en deux mois et demi. Le thème central de l’expo, à savoir «la durabilité», est un élément qui nous touche tous. Quand il touche le design c’est beaucoup plus implicite tout simplement parce que le design vit avec nous, ce sont des objets qui nous entourent, on ne se rend peut- être pas compte» et d’ajouter: «La particularité de cette année, chose exceptionnelle, c’est ce partage avec les étudiants. Dans cette expo, il n’y a pas que des objets qui ont été réalisés par les designers, il y a aussi le travail des jeunes étudiants de l’Esba, effectué pendant deux jours. Ce travail a été chapeauté par Giuseppe Lotti, professeur de design industriel à l’université de Florence et Valentina Frosini avec la participation de deux professeurs algériens.

L’expo a été montée en cinq jours. On a travaillé jour et nuit. Il y a parmi nous aujourd’hui des représentants du ministère de l’Industrie. Le design n’est pas une utopie…» A propos du contenu même de l’expo, Feriel Guesmi, satisfaite, fera remarquer: «Vous allez découvrir des techniques ancestrales, des collages, des assemblages qu’on avait complètement oubliés. Des techniques de type de colorimétries issues d’épices, de teintures de fleurs… De choses assez inattendues.». Giuseppe Lotti, commissaire pour l’exposition italienne, fera savoir quant à lui: «Nous avons choisi d’exposer cinq études de design italien. Nous avons décidé d’appeler l’expo ‘l’âme des petites choses. »»

L’expo montre la contribution de l’Italie à la thématique de la durabilité au niveau du design. Des matériaux recyclés qui nous parlent de rénovation, de la capacité d’utiliser des déchets industriels. Notre contribution n’est pas seulement technique, mais vous pouvez voir aussi des petits objets qui sont dotés de sens, qui ont la capacité d’exprimer des choses. Ils ne sont pas seulement fonctionnels, mais sont des compagnons de notre vie qui peuvent nous aider à vivre mieux.» Et de renchérir: «Il y a une alternance entre les produits algériens et les produits italiens. Quand vous aurez terminé le tour de l’expo, il ne vous sera pas facile de comprendre quels sont les produits algériens et les produits italiens. Pour moi, c’est très intéressant, car il y a une qualité avérée sur toute l’expo qui est la même. Pour moi, c’est très important.» A propos du workshop fait en collaboration avec l’ Esba, il dira: «Nous avons travaillé avec des professeurs italiens et algériens et 15 étudiants. Nous avons travaillé sur la durabilité sociale et culturelle. On a organisé d’autres workshops en Tunisie, Maroc et Italie sous la même thématique. Après, on aura un jury pour voir les projets réalisés par les étudiants.

Les meilleurs projets seront inscrits dans un concours du pourtour de la Méditerranée. J’espère qu’un étudiant algérien sera sélectionné.» Avant de faire la tournée/présentation de cette grande exposition en accompagnement de Azzedine Mihoubi, ministre algérien de la Culture, le designer italien Lorenzo Damiani, (architecte designer, envoyé exceptionnellement par la Triennale de Milan en tant qu’«ambassadeur» du design italien dans le monde ndlr) animera une conférence pour présenter son travail et évoquer avec nous le regard qu’il porte sur le design. Pour ce dernier «Un projet doit avoir un sens et un objectif» et de souligner: «Je vais vous montrer des objets fabriqués par des artisans et une interprétation de ces objets avec des nouveaux matériaux issus de différentes ressources que la planète nous offre. Des réflexions sur mes projets. Pour moi, le plus important ce n’est pas la forme, mais le message, ce qu’on veut transmettre et garder pour le futur.» C’est assurément et grandement dans cet état d’esprit de vouloir «vendre une idée et non pas une assiette»que s’inscrit foncièrement cette expo qui nous offre un tas de perspectives nouvelles sur le design en Algérie.

Le recyclage et la récupération des déchets de bois, par exemple, font partie de cette pensée moderne qui rentre en étroite ligne de compte lorsqu’on pense au design et à la durabilité et c’est cela qu’anime et évoque en nous cette grande expo que nous avons traversée de bout en bout.

En effet, entre table, chaise, lampadaires, tabouret, bijoux et autres objets des plus orignaux, soit par la forme ou par le matériau employé, le célèbre adage de Antoine Lavoisier recouvre tout son sens ici et se confirme haut la main: «Rien ne se perd, rien ne se crée: tout se transforme.» Et l’expo du Mama lui donne entièrement raison. Le défi du design d’aujourd’hui et de demain se situe dans cette réflexion qui combine l’utilité à la fonctionnabilité pour un meilleur écosystème et biodiversité contrôlée. Aussi, l’esthétisme n’est pas en reste et certains produits proposés rivalisent en effet de beauté autant qu’en termes d’utilité et nos entreprises industrielles mériteraient de s’y attarder de plus près. Car le design moderne est celui qui permet de se frotter au monde du travail pour que le prototype ne soit plus limité seulement à une vue de l’esprit, mais à un produit concret qui pourrait entrer dans les foyers et faire oeuvre d’utilité publique. Et l’enjeu de cette expo réside dans cette équation de plaire/pouvoir se vendre pour vivre de ce métier et se professionnaliser dans ce domaine qui même s’il n’est pas assez exploité dans notre marché, n’est pour autant pas très développé en Algérie. Il existe malgré tout et se fraie tout doucement, mais sûrement, un bon chemin vers le progrès dans ce «milieu». Car les idées en effet, de nos artistes n’en maquent pas! Pour découvrir leurs prouesses et leur talent, il vous suffit de faire un petit tour au Mama. Vous n’en serez pas déçus! Une expo qui en vaut la peine et donne des idées…

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