Le Sinaï, endroit privilégié de l’action terroriste depuis l’éviction de Mohamed Morsi du pouvoir, a été le théâtre cette fois-ci d’une attaque sans-précédent contre les forces de sécurité égyptiennes, qui n’augure de rien de bon pour l’Égypte.
Après des attentats, sans grand retentissement jusque-là, les terroristes sont passés hier à la vitesse supérieure au Sinaï en assassinant pas moins de 27 policiers, dont 25 dans l’attentat le plus meurtrier contre les forces de l’ordre depuis des années en Égypte. En effet, 25 policiers ont été tués lorsque des hommes armés, soupçonnés d’appartenir à la mouvance radicale islamiste, ont tiré à la roquette et à l’arme automatique sur deux minibus de la police se dirigeant vers la ville de Rafah, où se trouve le point de passage vers la bande de Gaza, selon des sources sécuritaires.
Ne mâchant pas ses mots, le ministre égyptien de l’Intérieur a accusé des “terroristes” d’être les auteurs de ce crime, tandis que d’autres sources de sécurité ont précisé que trois des assaillants avaient été arrêtés. La première conséquence de cette attaque terroriste aura été la fermeture par l’Égypte pour une durée indéterminée du poste de passage de Rafah, seul accès à la bande de Gaza qui ne soit pas contrôlé par Israël. Le terminal avait déjà été fermé la semaine dernière, mais il avait en partie rouvert samedi, selon le Hamas, qui contrôle le territoire palestinien. Cette attaque intervient sur fond de grave crise politique en Égypte, et rappelle la violence islamiste orchestrée par les groupes al-Jihad et al-Gamaa al-Islamiya, qui avait fait 1 300 morts dans les années quatre-vingt dix. Par ailleurs, à la mi-journée d’hier, au moins deux officiers de police ont été tués dans deux attaques à al-Arich, la capitale du Nord-Sinaï, selon des sources au sein des services de sécurité.
En outre, deux hommes ont été tués et un troisième arrêté alors qu’ils attaquaient des policiers et des militaires à Fayoum, une oasis au sud du Caire, selon des sources de sécurité. Cela porte à 75 le bilan, selon un décompte de l’agence AFP, des membres des forces de l’ordre tués dans le seul Nord-Sinaï depuis la destitution du président islamiste Mohamed Morsi par l’armée le 3 juillet. Durant cette même période, l’armée a affirmé avoir tué près de 70 “terroristes” au Sinaï. Il ne fait aucun doute que des groupes islamistes radicaux ont établi leur base arrière dans cette péninsule essentiellement désertique et majoritairement peuplée de bédouins aux relations difficiles avec le pouvoir central, théâtre en outre de multiples trafics le long de la frontière israélienne.
En juillet, l’Égypte avait déployé des forces supplémentaires dans la péninsule pour lutter contre les groupes radicaux. La crise pourrait encore s’aggraver parce que les deux parties campent sur leurs positions. Les pro-Morsi ont appelé hier à de nouvelles manifestations au Caire après la prière de l’après-midi, alors que l’homme fort du pays, le général Abdel Fattah al-Sissi, a promis une réponse “des plus énergiques” aux islamistes ayant fait le choix de la “violence”. Les médias égyptiens unanimes et une grande partie de la population qui considèrent désormais les Frères musulmans, l’influente confrérie de M. Morsi, comme des “terroristes”, soutiennent la méthode forte de l’armée, qui a suscité à l’étranger une vague de critiques de plus en plus virulentes.
M. T