L’Algérie ne peut désormais continuer de dépenser sans compter en tarissant ses réserves d’hydrocarbures sans instaurer une véritable économie productive.
Pour l’État algérien, l’année 2015 ne s’annonce pas sous d’heureux auspices. Si l’on tient compte des tendances favorables, voire ambitieuses de l’économie nationale affichées dans le communiqué du dernier Conseil des ministres, le nouvel exercice dans lequel s’engage l’Algérie ne sera pas aussi difficile comme l’affirment certains experts. Si les récentes déclarations du Premier ministre à la foire de la production nationale ont sonné le glas d’une politique dépensière excessive, le président de la République, en revanche, semble déterminé à maintenir tel quel son prétentieux programme quinquennal.
Pis, pour le premier magistrat du pays, la “dynamique de développement ne sera pas arrêtée par la crise”. Et l’Algérie, affirme-t-il, “continuera à créer des emplois pour nos jeunes et à construire des logements, des écoles, des universités et des infrastructures de santé, pour toute la population”. En termes plus clairs, dans son éventuelle stratégie d’austérité, marquée par un gel des recrutements dans la Fonction publique, le gouvernement devra épargner certains secteurs jugés trop sensibles que sont la santé, l’éducation, le logement et la jeunesse. À vrai dire, point de changements dans les projets d’investissements envisagés dans tous les secteurs. Et le document final qui a sanctionné les travaux de la dernière réunion du Conseil des ministres confirme cette décision. L’exemple le plus édifiant est l’approbation par le conseil des deux marchés de gré à gré simple qui seront conclus entre l’Agence nationale des autoroutes et deux groupements d’entreprises locales publiques et privées, pour la réalisation de deux tronçons de l’autoroute des Hauts-Plateaux. La réévaluation de l’autorisation de programme destinée à la réalisation du dédoublement de la voie ferrée entre Ouled Sly et Yellel sur 93 kilomètres a été également approuvée. Ces projets figurent apparemment sur la liste des priorités de l’Exécutif car, ceux qui ne sont pas prioritaires seront reportés comme l’avait annoncé Abdelmalek Sellal lors de sa sortie médiatique. Une telle attitude de la part du premier dirigeant du pays montre de manière, on ne peut plus clair, son inquiétude quant à une probable explosion sociale si des mesures de “rigorisme” économique sont déclarées publiquement. Abdelaziz Bouteflika semble vouloir apaiser le vent de panique qui souffle sur le pays et calmer les ardeurs protestataires d’une frange considérable de la société. “Je suis convaincu que dans une sérénité légitime et grâce à la mobilisation qui nous est traditionnelle face aux défis, l’Algérie traversera sans difficultés majeures les graves perturbations que connaît le marché international des hydrocarbures”, s’enorgueillit-il avec un optimisme béat. Or, la logique et les règles de bienséance voudraient que le chef de l’État fasse preuve de force de persuasion en faisant admettre au peuple la période difficile que va inexorablement vivre l’Algérie dans les mois qui viennent. Il serait plus raisonnable qu’il saisisse cette impertinente opportunité qu’est la chute des prix du pétrole pour sommer son gouvernement à lancer les réformes économiques qui n’ont pas encore
démarré concrètement.

Le Président a néanmoins chargé son Exécutif de construire une économie diversifiée et compétitive ayant pour fondement une justice sociale et une solidarité nationale. L’Algérie ne peut désormais continuer de dépenser sans compter en tarissant ses réserves d’hydrocarbures sans instaurer une véritable économie productive. Si pareille propension est poursuivie, le déficit budgétaire s’aggravera et le fonds de régulation des recettes et les réserves de changes seront épuisés dans les quelques années à venir. D’où la nécessité de reporter les projets qui ne constituent pas une priorité et n’ayant pas d’impacts économiques et sociaux, tels que les tramways projetés dans les régions à faible population.
Par ailleurs, toute politique économique qui sera définie à partir des conséquences de cette crise devra avoir comme principal levier l’entreprise algérienne, publique, privée, nationale et
étrangère…
B. K