Novembre, un acte fondateur et fédérateur
La Révolution algérienne, déclenchée le 1er Novembre 1954, s’achève en 1962 par un triomphe retentissant : l’indépendance nationale, confisquée par la France coloniale durant plus de 130 ans. Par la justesse de la cause qu’elle prend en charge, celle de la liberté et de la dignité, elle impulse le large courant universel et émancipateur des peuples sous domination, et singulièrement en Afrique où les mouvements de libération reçoivent son aide et son soutien pendant et après son déroulement.
Parce qu’il a permis à l’Algérie d’émerger en tant que nation libre et souveraine en projetant de construire une société solidaire, moderne et tolérante, l’acte du Premier Novembre a été, est et demeure un acte fondateur et fédérateur, une référence majeure de notre histoire et de l’histoire universelle. Oui, un acte qui exprime la forte volonté du peuple algérien de renouer avec l’esprit de la résistance en unissant l’ensemble de ses forces patriotiques et nationalistes. En effet, depuis le 1er Novembre 1954, la nation algérienne s’affirme par les armes après avoir été longtemps bernée par les promesses, les mensonges et l’arbitraire du régime colonial. Dans la douleur, le sacrifice, la bravoure et l’abnégation de ses enfants, dans son identité et son histoire plusieurs fois millénaire, elle a su comment puiser d’elle-même l’énergie et la force qui vont l’aider à surmonter la grande épreuve imposée par un ennemi vorace, bestial, inhumain, qui ne connaît que la haine et cultive des valeurs négatives, humiliantes, à contre-courant du progrès humain.
Grâce au Premier Novembre et aux valeurs qu’il véhicule, le pays entre dans l’histoire par la grande porte, et participe activement aux grands débats et aux grandes pulsations qui agitent tout le vingtième siècle et le début du millénaire. En effet, il n’est pas exagéré de soutenir que les deux idées-forces qui font avancer l’histoire depuis au moins un siècle sont la révolution et la démocratie. L’une comme l’autre est au menu de l’Algérie contemporaine qui a brillamment réussi la première, après avoir été longtemps tenue en marge, et tente d’ancrer la seconde dans les esprits et dans le quotidien. Au prix, il est vrai, à chaque fois d’expériences douloureuses.
Ce n’est pas la moindre des leçons à retenir de ce passé récent et qui néanmoins est toujours en œuvre, que d’affirmer que la reconstruction du pays et sa modernisation ne peuvent se faire qu’avec l’ensemble de ses enfants, de ses forces, sans exclusivisme ni exclusivité. De même que les avancées sur le chemin de la démocratie peuvent et doivent se faire de manière pacifique en écartant les égoïsmes nés de l’exercice monopolistique du pouvoir et de l’accaparement des valeurs symboliques du patriotisme ou du nationalisme.
Si la Révolution algérienne a affronté des défis gigantesques et fini par les relever un à un, malgré les guerres mémorielles qu’on lui impose, les mythologies anciennes ou nouvelles avec lesquelles on l’affuble pour mieux la pervertir, ou les polémiques, ici et ailleurs, qu’on suscite pour réduire sa portée libératrice, sans oublier les appels indécents à l’oubli et à l’occultation, c’est qu’elle a réellement atteint un immense degré de maturité et que son statut relève désormais, sans verser dans une quelconque démarche dogmatique, de l’exemplarité.
Son impact sur la société ne s’est guère limité à la reconquête de la souveraineté usurpée, mais il se prolonge encore aujourd’hui dans le brûlant débat sur les réformes nécessaires à promouvoir la démocratie, la justice et la dignité et la meilleure manière d’aller résolument vers une société créative, fière de sa jeunesse et de son dynamisme, faite de partage, soucieuse d’un mieux-être général et du bien vivre ensemble, capable de prendre en charge ses besoins, et dans laquelle le citoyen peut devenir acteur de son présent et de son avenir.