La foule que brasse chaque année un monde impressionnant dans le grand chapiteau ne désemplissait pas en cette dernière journée de samedi pour cet événement culturel de l’année, considéré au vue de l’affluence record enregistrée désormais comme une attraction culturelle incontournable. Pendant près d’une dizaine de jours les Algériens dans leur majorité ont pu renouer avec le livre dans une atmosphère de franche convivialité. Il faut dire que les organisateurs ont misé gros pour cette édition en proposant parallèlement à l’achat des livres, tous domaines confondus, pour lesquels une large surface d’exposition était prévue, de nombreux rendez-vous avec d’intéressants cycles de conférences animées par des personnalités du monde des lettres, des espaces pour la restauration, des garderies d’enfants.
On peut bien dire malgré certaines imperfections d’ordre organisationnel que tout a été pensé et conçu pour répondre aux attentes des lecteurs algériens selon toutes les tranches d’âge même si les goûts et les couleurs ne se discutent pas. On aura tout de même constaté le contraste des visiteurs de tous bords qui nous pousse à affirmer que décidément ce 16e Salon est non seulement un lieu privilégié de la culture mais aussi un parfait baromètre et indicateur de l’exercice démocratique dans lequel ont travaillé les organisateurs dont le but essentiel était de satisfaire, en faisant la promotion du livre, la demande toujours pressente du lecteur algérien. La réussite de cette vaste manifestation — car il faut bien en convenir — en est une preuve concrète au moins sur deux points d’abord que le citoyen algérien reste toujours à l’affût de la lecture et par extension de tout ce qui se rapporte à la culture, d’autre part qu’il sait saisir une occasion inespérée de faire l’achat des livres avec des prix relativement abordables, des livres nouveaux et utiles qu’il ne trouve pas nécessairement dans toutes les librairies.
En cette dernière journée où l’affluence des visiteurs était très importante en raison des soldes proposés, on aura décelé une fréquentation qui semble avoir sensiblement augmenté par rapport aux années précédentes, on s’est donc interrogés sur l’évaluation du chiffre d’entrée : « Nous n’avons pas de chiffre pour l’instant, mais ce que je peux dire, c’est qu’il est plus important que l’an dernier. On a remarqué que pour ces trois dernières journées, il y a une affluence particulièrement dense. Pour éviter les encombrements nous avons prévu trois entrées pour faciliter la circulation des visiteurs », nous dira M. Bouatta responsable de la communication au Sila avant de nous préciser que « Les éditeurs sont satisfaits et affirment même que l’édition 2011 s’est améliorée, certes on doit avoir quelques difficultés mais je peux dire que pour cette année le Sila a atteint sa vitesse de croisière. » Avec plus de 500 exposants, on peut souligner et constater de visu l’engouement du public pour la lecture sans oublier toutefois que cet événement culturel est aussi une affaire de business et conserve par là même son cachet largement commercial : « Il y a même eut un éditeur syrien qui a épuisé son stock de livres au bout des trois premiers jours. L’autre remarque que je fais pour cette édition 2011 est que les gens viennent en famille. Le Sila déborde un peu de son objectif culturel en devenant un lieu de loisirs puisque l’on a constaté lorsqu’on ferme à 19 h et que les familles restent tard dans la soirée jusqu’aux environs de 23 h », nous a affirmé notre interlocuteur. Le Sila qui figure dans le palmarès des grands Salons est devenu une rencontre internationale : « Les Russes ont bien tiré l’enseignement, ils pensent revenir avec davantage de livres à exposer.
Les instituts culturels qui sont partie prenante de ce Salon contribuent à la promotion de leurs cultures dans notre pays. Il faut ajouter que depuis deux ans le Salon prend en charge tout l’aspect africain parce qu’il ne faut pas oublier que nous sommes la porte du continent africain », poursuit notre interlocuteur. S’agissant du slogan de ce 16e Salon « Le livre délivre » M. Bouatta dira : « C’est un message très important en soi. Maintenant que l’Algérie se réconcilie avec elle-même, elle doit s’ouvrir sur les autres cultures et il n’y a pas mieux que le livre pour exorciser les peurs individuelles, les grands événements douloureux que nous avons traversés. Le livre reste une excellente thérapie pour tous. »
Lynda Graba
L’événement culturel de l’année
La 16e édition du Salon international du livre s’est achevée samedi dernier, journée qui a enregistrée une affluence record et qui confirme du reste cet engouement particulier du public pour cette manifestation qui reste l’événement culturel de l’année en Algérie. Si la précédente édition du SILA a enregistré plus de 1.200.000 visiteurs, la 16e édition a connu un succès public plus important au vu du nombre impressionnant des férus du livre qui dès l’ouverture des stands, le matin, se ruent dans les allées du Salon à la recherche de nouveaux ouvrages proposés par les 521 maisons d’éditions, nationales et étrangères mais aussi en quête de bonnes opportunités, des remises alléchantes pour oublier un peu la cherté des livres.
S’il est admis que c’est le public qui fait le succès de cette manifestation culturelle, ce rendez-vous annuel avec le livre prend de l’épaisseur avec une amélioration progressive de la qualité des conférenciers, celles des débats proposés d’autant que la thématique d’une manière générale a collé à l’actualité avec notamment les changements qui s’opèrent dans le monde arabe. En plus des conférences consacrées à ce sujet, un colloque intitulé « Le monde arabe en ébullition, révoltes ou révolution » a abordé sous l’angle d’une approche académique, cette problématique. Des questions ayant trait au monde de l’édition ont fait aussi l’objet de débat de haute teneur.
Le Salon du livre a enregistré aussi cette année la présence de hautes personnalités du monde littéraire et médiatique, celle aussi de deux ministres étrangers de la Culture, le Libanais Gaby Layoune, dont le pays était l’invité d’honneur et le Français Frédéric Mitterrand et un hommage à un doyen de la presse algérienne, M. Noureddine Naït Mazi, journaliste et ex-directeur d’El Moudjahid.
Cela étant, si la tenue du Salon international du livre est un succès, l’organisation reste encore à parfaire. L’absence de transport a été une question soulevée par les visiteurs et cela peut être facilement corrigé lors des prochaines éditions tant, il s’agit en réalité que de coordination entre l’organisateur et l’ETUSA. Autre remarque pertinente, plus complexe cette fois, la place du livre religieux dans cette manifestation. D’aucuns estiment qu’il y a lieu de réfléchir pour donner à la littérature et autres domaines de l’édition un espace autre, sinon carrément séparé à celui dédié au livre religieux. Des préoccupations aussi soulevées, dont notamment le nombre réduit des librairies en Algérie. Comprendre, que le Salon est une belle vitrine pour le livre mais une fois la parenthèse fermée, la rareté des librairies est source d’inquiétude.
Abdelkrim T.
Ils ont déclaré…
Fahd Ibn Abdellah Mehana (représentant de la bibliothèque générale Saoudienne Abdelaziz)
« Nous sommes satisfaits de notre participation »
Nous sommes bien contents de notre participation à ce Salon international du livre d’Alger. Nous avons enregistré une bonne présence du public, cela montre qu’il est un grand adepte du livre et de la lecture. Il tient beaucoup à sa culture, notamment à la recherche de l’information et du savoir. Il cherche toujours à acquérir plus de connaissances dans divers domaines. Notre participation émane de différentes autorités et des ministères. Le stand saoudien marque sa présence chaque année dans cet événement international. Personnellement c’est ma première participation, mais d’après les collègues qui ont déjà participé à cette édition, on relève la bonne affluence du public. Nous avons eu aussi l’occasion de connaître le public algérien dont nous partageons plusieurs choses telles que la religion, la langue, les traditions… Nous souhaitons une plus large et forte participation l’an prochain.
Ahmed Redah (responsable des stands égyptiens)
« Cette édition est mieux organisée »
En toute franchise, après notre absence l’an dernier, nous revenons en force cette année avec de nouvelles collections que nous offrons au public algérien, qui est dans sa nature cultivé. Il aime beaucoup la production littéraire égyptienne dans tous les domaines : culturel, scientifique, recherche académique et technologique… alors vous pouvez dire que notre participation cette année et plus réussie que les années précédentes. Notre participation cette année ce concentre sur les livres de recherche académique dans deux versions arabophone et anglophone, suivant la demande du marché et des lectorats. Pour ce qui est de l’organisation de cette édition, je trouve qu’elle est mieux organisée avec plus d’espace, une bonne facilité dans la réception des livres, ainsi que la préparation des stands… Seulement, nous souhaitons que les responsables du Salon soutiennent plus le lecteur surtout dans les prix. Nous constatons que le public algérien est très cultivé. Il a un grand amour pour la lecture. Je souhaite que nous avons pu satisfaire les goûts du public algérien et que l’an prochain, nous lui apporterons plus de savoir.
Sofiane Messaoudi (représentant de l’institut culturel Italien)
« Un grand pas pour l’édition italienne »
Notre premier objectif se concentre sur la promotion de la langue italienne en Algérie. Donc on donne des cours, des livres pour enfants, adolescents, les adultes. On organise aussi des cours au sein de l’institut, ainsi que la formation. Nous avons aussi exposé des catalogues des différentes maisons d’éditions italiennes. Ce qui caractérise la présence italienne cette année à ce Salon, c’est qu’elle a marqué un très grand pas, en introduisant des gens déjà inscrits pour faire des cours d’italien. Pour ce qui est des maisons d’éditions italiennes, elles ne sont pas présentes en termes de maisons d’édition mais à travers les catalogues. Via ces derniers, on peut faire des commandes pour le lecteur. Pour ce qui de la 16e édition du Sila, je trouve qu’elle est plus importante que celle de l’an dernier : c’est plus spacieux, la qualité et la quantité de livres surtout la forte présence du livre scientifique et technique.
Richard Irani (représentant de la librairie Stéphane du Liban)
« De nouvelles collections pour la prochaine édition »
La présence libanaise au sein du Salon international du livre qu’organise l’Algérie, abrite plus de cent éditeurs arabophones, francophones et anglophones. C’est notre sixième participation et à chaque fois nous trouvons du plaisir à y participer. Nous avons aussi le grand plaisir d’être l’invité d’honneur de cette édition et d’être reçu par les autorités algérienne et libanaise. Comme d’habitude, nous enregistrons une bonne présence du public qui savoure et aime la lecture. Ils sont très accueillants. L’édition de cette année est bien réussie, nous donnons rendez-vous au public algérien l’an prochain avec d’autres nouvelles collections qui pourront satisfaire ses goûts.
Youcef Ben Mhidi (Chef de département du livre de l’agence algérienne pour le rayonnement culturel)
« Notre stand a eu un grand succès »
Pour ce qui est du bilan général du Salon, nous attendons le chiffre de fréquentations pour trancher aussi sur cette question d’organisation en septembre au lieu d’octobre. Pour moi j’ai constaté qu’il y a toujours autant de monde. C’est une édition réussie jusque-là. Pour ce qui est de la participation de l’Arc, qui est la première, on a proposé un stand de 200 m2 dans lequel tous les publics pouvaient avoir leur place, les professionnels du livre, les auteurs… et on finit avec un concours du meilleur écrit destiné aux jeunes auteurs amateurs qui ont l’ambition de décrocher une journée en atelier d’écriture. Franchement on a eu un grand succès. Auparavant on a eu un programme de conférence autour de la littérature sud-africaine ainsi que la visite du journaliste du magazine Lire, il y a eu aussi des matinées avec des professionnels, des éditeurs et des libraires algériens, notamment des poètes et des romanciers algériens sur des sujets divers. C’est un Salon généraliste, on trouve un public qui vient pour la littérature et pour d’autres catégories éditoriales. Mais il y a un réel intérêt pour la littérature et la poésie. Ce qu’on peut constater en visitant les stands, c’est qu’il y a une forte activité dans divers domaines. Il est aussi important à dire que le Salon d’Alger est sur la liste des Salons prioritaires du monde arabe. Il constitue aussi un rendez-vous commercial important. On a un nombre très important de la participation étrangère, cela nous mène à dire que c’est un Salon qui s’internationalise d’année en année.
Bouatta (chargé de la communication du SILA) « Les éditeurs sont satisfaits»
En absence de chiffre, je peux vous dire cette édition est plus réussie que celle des autres années où nous avons enregistré plus d’un million de visiteurs. Cette année le nombre de visiteurs dépasse ce chiffre. Il y a une très bonne affluence. Cette année on a ouvert trois entrées pour élargir la présence du public. Pour ce qui est des éditeurs, ils sont bien satisfaits, ils disent que l’organisation par rapport aux années précédentes a beaucoup progressé. Certes qu’il y a des difficultés mais en fait de notre mieux pour nous améliorer d’année en année. D’autant que chaque année la participation étrangère augmente, pour cela nous avons augmenté la surface avec plus de 500 exposants. Ces derniers ont souligné l’engouement du visiteur pour le livre et la lecture. Notamment qu’ils ont fait des affaires aussi parce que c’est la raison de leur présence à ce Salon. Parce que le SILA n’est pas seulement un événement culturel mais aussi une affaire de business. Les éditeurs viennent pour vendre leurs livres aussi. Ce qui est aussi à relever c’est la présence de familles. Cette année aussi il y a une très grande ouverture sur l’exposition du livre. Le commissaire du Salon a bien rappelé que l’histoire de l’autorisation des livres ne dépend pas du SILA. Il y a une commission nationale qui se compose de divers ministères et se sont eux qui autorisent ou interdisent certains ouvrages. L’Algérie n’a pas donné l’accord à près de 400 livres. Ce sont des livres religieux précisément, ils incitent à la violence.
Propos recueillis par Kafia Ait Allouche