15e Tripartite ,L’empreinte du patronat

15e Tripartite ,L’empreinte du patronat

Pour la deuxième fois consécutive, soit en deux réunions de suite (mai et septembre 2011), le patronat est sorti grand «bénéficiaire » des recommandations de la tripartite, tenue jeudi et vendredi. Cette dernière, qui était censée être dédiée aux questions sociales, n’a rien apporté de particulier.

La décision de revaloriser le SNMG à hauteur de 18 000 DA est loin de répondre aux attentes du monde du travail, même si l’augmentation, soit 3 000 DA, est conséquente. Quels enseignements faut-il tirer de cette quinzième tripartite ? Selon les observateurs de la question socio-économique, deux faits marquants ont caractérisé cette réunion. Le premier concerne la «non-satisfaction » par le gouvernement de l’essentiel de la plate-forme de revendications présentée par les représentants des travailleurs. Le second intéresse le patronat, qui a marqué de son empreinte cette quinzième tripartite. En premier lieu, le patronat a réussi à arracher le maximum d’acquis au profit de ses mandataires. Il s’agit de l’étalement du paiement de la dette fiscale sur trois années, l’annulation des pénalités d’assiettes et de recouvrement, le rééchelonnement des dettes fiscales des petites et moyennes entreprises, l’octroi d’une période de différé de paiement, l’allègement des procédures de remboursement de la TVA à l’exportation, la prise en charge des frais de labellisation des produits agricoles à l’exportation, l’allègement de la procédure de constitution du dossier requis pour la délivrance du permis de construire, l’effacement à hauteur de 50% des agios non recouvrés, la bonification du crédit d’investissement aux PME et le rééchelonnement des dettes bancaires des PME en difficulté. En second lieu, les organisations patronales, tant publiques que privées, à leur tête le Forum des chefs d’entreprises (FCE) et l’Union nationale des entrepreneurs publics (UNEP), ont affiché une nette opposition aux revendications des travailleurs portées par l’UGTA pour l’amélioration du pouvoir d’achat, même si elles les qualifient, selon le communiqué final, de «légitimes».

Pas de baisse de l’IRG et maintien du 87 bis

Selon des indiscrétions, il a fallu que le SG de l’UGTA hausse le ton pour que les patrons admettent «la mise en application de la convention de branches» et «la mise sur pied d’une commission traitant du 87 bis». En effet, le 8e point inscrit à l’ordre du jour, à savoir le dossier du pouvoir d’achat, a occupé une grande partie des discussions entre les trois partenaires. Les parties concernées ont mis plus de quatre heures pour trouver un compromis. Dans le communiqué final, il a été avancé des arguments pour battre en brèche les deux demandes de l’UGTA. Ainsi, le gouvernement a justifié son refus de prendre en compte les deux propositions de la délégation de la Centrale syndicale par «l’ampleur du déficit budgétaire», «l’entrée en vigueur durant l’année 2010 des nouveaux régimes indemnitaires avec effet rétroactif depuis le 1er janvier 2008, ce qui a fait passer la masse des salaires des fonctionnaires de 1 126 milliards de dinars en 2008 à 2 850 milliards de dinars en 2012» et le fait que «les entreprises publiques économiques aient toutes conclu des conventions salariales en 2010 et pour nombre d’entre elles des avenants en 2011. De ce fait, tout comme le budget public, les entreprises économiques ne pourraient faire face actuellement et sans graves conséquences à une abrogation de l’article 87 bis». Lors de leurs interventions, les différents présidents des organisations patronales, dont celui du Forum des chefs d’entreprises, ont affiché leur opposition à une augmentation des salaires.

LG Algérie

Frustration des retraités ?

Sur ce chapitre, Rédha Hamiani, président du FCE, fidèle à sa logique patronale, a rappelé au Premier ministre : «nous avons enregistré ces derniers temps une avalanche de hausses de salaire et dans une logique économique, on n’a pas le droit de dépenser de l’argent qu’on n’a pas gagné.» L’autre revers essuyé par la délégation de l’UGTA concerne le dossier des retraites. Ceci alors que la Centrale syndicale a fourni un dossier «solide» à travers une série de demandes «visant à revaloriser le minimum de retraites, revaloriser la compensation des anciennes pensions de retraite, actualiser l’indemnité versée à la femme au foyer et revaloriser les petites pensions ainsi que les allocations de retraite». Non concernées par ce quatrième dossier inscrit à l’ordre du jour de cette tripartite, les organisations patronales, selon le communiqué final qualifient les demandes de l’UGTA de «respectables, d’autant qu’elles ne sont pas accompagnées d’incidences financières sur les entreprises qui ne pourraient alors les assumer». De son côté, le gouvernement, tout en se déclarant solidaire des retraités et soucieux de ne pas mettre en danger les équilibres de la Caisse nationale des retraites, ainsi que ceux du budget de l’Etat, a déclaré qu’il veillera à dégager une solution raisonnable et appropriée à cette question. En d’autres termes, la tripartite a décidé de confier à un groupe de travail l’examen des possibilités d’augmenter le taux de cotisation de la branche retraite pour assurer à la CNR des recettes supplémentaires nécessaires à la prise en charge durable de ses obligations envers les retraités.

18 000 DA à compter de janvier 2012

Les retraités doivent encore attendre pour voire leurs revendications prises en compte. Une situation qui risque de provoquer chez ces derniers une certaine frustration, même si pour certains d’entre eux, bénéficiant du statut d’ancien moudjahid ou d’ayant droit, la revalorisation du SNMG constituera une véritable bouffée d’oxygène, puisque leur pension indexée sur le SNMG est calculée par deux fois et demie le SNMG. Selon des sources sûres, c’est sur recommandation du SG de l’UGTA qu’a été instituée une commission devant prendre en charge ce dossier, dont les décisions seront prises prochainement. A ce propos, on n’exclut pas une augmentation de près de 30% des pensions de retraite. «A l’issue d’un long débat dominé par un esprit de responsabilité, la tripartite a fait sienne la proposition du gouvernement d’augmenter le SNMG de 15 000 DA à 18 000 DA, cette décision entrera en vigueur à partir du 1er janvier 2012», peut-on lire dans le communiqué final. Le SNMG a connu une revalorisation substantielle en dix années. En effet, alors qu’il était de 8 000 DA en 2001, le SNMG a connu plusieurs hausses pour atteindre 18 000 DA. Toutefois, cette revalorisation ne pourra avoir une incidence directe sur le monde du travail, du fait que l’article 87 bis constitue un point de blocage. Lors de sa conférence de presse, le Premier ministre a indiqué que la hausse de 20% du SNMG coûtera quelque 75 milliards de dinars au budget de l’Etat.

A. B.

Point de presse d’Ahmed Ouyahia

Le Premier ministre Ahmed Ouyahia a animé un point de presse à la fin des travaux de la tripartite lors duquel il a répondu aux questions des journalistes. Des questions d’actualité telles que la situation sécuritaire, l’état de santé du président de la République ou encore les résultats de la tripartite. Ici les points forts de la rencontre avec les journalistes.

«Le plan sécuritaire n’a pas échoué»

«Le plan sécuritaire n’a pas échoué, cependant, on ne peut affirmer qu’il s’agit d’une réussite totale tant que le terrorisme n’a pas été définitivement éradiqué», a déclaré le Premier ministre. Ainsi, à une question sur «l’échec du plan sécuritaire au vu la recrudescence des actes terroristes durant le mois de Ramadan dernier», le Premier ministre a souligné que «ce plan ne réussira à 100 % que lorsque nous parviendrons à éradiquer le terrorisme de manière définitive». «Tant que le terrorisme n’a pas été complètement anéanti, le plan sécuritaire, bien qu’il progresse et porte ses fruits, n’a pas encore atteint la perfection.»

Pas d’amnistie générale pour les terroristes

Le Premier ministre a démenti «solennellement », l’existence d’une amnistie générale pour les terroristes, tel que rapporté par certains titres de la presse. «J’ai lu dans certains journaux, que je parcours en diagonale même lorsque je n’ai pas le temps, qu’il y avait une amnistie générale : faux, faux sur toute la ligne. Et je la démens le plus solennellement du monde», a-t-il déclaré.

«Le président de la République se porte bien»

«Le président de la République est en bonne santé et se porte bien» a répliqué le Premier ministre à une question relative à l’état de santé de Bouteflika.

«L’Etat ne veut pas faire de mal aux cadres»

Ahmed Ouyahia a affirmé, hier, que l’Etat ne veut pas faire de mal à ses cadres par la révision de la législation relative à l’acte de gestion. Selon lui, la dépénalisation de l’acte de gestion «a été faite», mais «comme pour le salaire, il faut toujours plus». Le Premier ministre, qui répondait à une question relative à la demande du président de l’Union des entrepreneurs publics (Unep), de «rendre réelle et effective la dépénalisation de l’acte de gestion», a expliqué que «la loi a été changée mais certains disent que c’est insuffisant, alors que les juristes sont satisfaits». Le chef de l’Etat avait chargé dans son discours du 3 février dernier le gouvernement de préparer les dispositions législatives appropriées en vue de la dépénalisation de l’acte de gestion pour «rassurer davantage les cadres gestionnaires sans que cela puisse signifier l’impunité».

«L’Etat ne peut baisser d’un centime l’IRG»

Le Premier ministre a affirmé que l’Etat ne peut baisser d’un centime l’impôt sur le revenu global (IRG), puisque plusieurs dispositions avaient déjà été prises dans ce sens. «J’ai définitivement dit à mes partenaires (syndicat et patronat) qu’il ne faut plus qu’on attende du gouvernement de baisser un centime d’impôt.» Le Premier ministre justifie cette décision par «plusieurs dispositions» prises pour alléger l’impôt sur le revenu. «La fiscalité ordinaire ne couvre même pas la moitié des salaires des fonctionnaires de l’Etat. L’Etat renonce à quelque 450 milliards de dinars au titre des avantages du régime d’investissement. » Il y a aussi des dispositions qui font que le travailleur touchant moins de 15 000 DA est exonéré d’impôt, a rappelé le conférencier.

«Les syndicats autonomes ne sont pas ignorés»

Le Premier ministre a indiqué que l’absence des syndicats autonomes aux travaux de la tripartite ne signifie nullement que le gouvernement ne les reconnaît pas. Selon lui, «si la participation à ce sommet s’est limitée à l’UGTA, il ne faut pas en déduire que les syndicats autonomes ne sont pas reconnus ou qu’ils sont ignorés». Il a indiqué, à ce sujet, que ces syndicats étaient actuellement en négociation dans leurs secteurs d’activité, tout en soulignant qu’«avec le temps, on finira par connaître le poids de chaque syndicat et sa véritable représentativité», en allusion aux syndicats autonomes qui se prévalent de leur forte représentativité pour participer à la tripartite. «Le jour viendra où ces syndicats cesseront leur parade et nous trouverons une solution pour dialoguer avec eux», a-t-il souligné, affirmant que même s’il n’a pas rencontré personnellement ces syndicats, ces derniers étaient en contact avec les ministres des secteurs dont ils dépendent.

«Un comportement intolérable»

Les déclarations de la fille du guide libyen faites depuis Alger à une chaîne de télévision satellitaire ont été qualifiées par le Premier ministre d’«intolérables». Selon lui, «il s’agit d’un comportement qui n’a pas lieu de se produire».

A. B.