Quatre-vingt quinze personnes ont été tuées dans l’attaque de l’armée à Hama, dans le centre de la Syrie, a annoncé Ammar Qourabi, le président de l’Organisation nationale des droits de l’Homme. Selon lui, au total, les attaques de l’armée dans plusieurs villes de Syrie ont fait 121 morts et des dizaines de blessés, dont de nombreux dans un état grave. Des témoignages recueillis par des agences de presse indiquent que les mitrailleuses des militaires tirent à l’aveugle.
« L’armée et les forces de sécurité ont lancé une attaque sur Hama et ouvert le feu sur des civils, faisant 95 morts », a-t-il déclaré, affirmant disposer déjà d’une liste de 62 noms. Par ailleurs, selon M. Qourabi « 19 personnes ont été tuées à Deir Ezzor (est), six autres sont mortes à Harak (sud) et une à Boukamal (est) ».
Un médecin, qui a souhaité préserver son anonymat par crainte de représailles, a fait savoir que la majorité des corps avaient été transportés à Badr, Horani et Hikmeh, les trois hôpitaux de la ville, ajoutant que les poches de sang pour des transfusions venaient à manquer dans ces établissements.
« Les chars nous attaquent en provenance de quatre directions différentes. Leurs mitrailleuses tirent à l’aveugle et les chars détruisent les barricades érigées dans les rues par des habitants », a témoigné ce médecin.
Selon un autre habitant, des tireurs d’élite ont pris position sur les toits de la prison principale de la ville ainsi que sur le siège de la compagnie nationale d’électricité.
Hama martyrisée en 1982
Située dans le centre du pays, Hama a été le théâtre de certaines des plus grandes manifestations de la contestation qui a débuté à la mi-mars.
C’est aussi une ville-martyre dans l’histoire récente de la Syrie: en 1982, des milliers de personnes y avaient été tuées par l’armée syrienne lors de la répression d’un soulèvement islamiste ordonnée par le père de Bachar al Assad, Hafez. Certaines estimations avancent un bilan de 30.000 morts.
Lancé à la mi-mars dans le sillage des révolutions tunisienne et égyptienne, le mouvement de contestation aurait fait 1.634 morts, selon un récent rapport de l’ONG Avaaz, qui avance également le nombre de 2.918 disparus. Il y aurait eu également plus de 25.000 personnes arrêtées, dont la moitié serait toujours derrière les barreaux.
Défections
Dans le sud du pays, trois civils ont été tués lors d’une attaque de l’armée dans la ville de Hirak, située à 35km au nord-est de Deraa, berceau du mouvement de contestation, rapportent des militants locaux et l’Observatoire syrien pour les droits de l’homme.
Selon l’Observatoire syrien, plus de 100 personnes ont par ailleurs été arrêtées à Mouadamiyah, dans la banlieue de Damas, où un diplomate occidental a vu entrer plusieurs tanks de l’armée.
Dans l’Est, selon des habitants, au moins onze civils ont été tués à Daïr az Zour depuis samedi et le début des bombardements de chars de l’armée syrienne contre cette ville d’environ 130.000 habitants située dans la vallée de l’Euphrate et théâtre de grandes manifestations contre le régime ces dernières semaines.
« Il y a des blindés de l’armée dans les rues mais la plupart des victimes ont été tuées par les (services) de renseignement militaire », a dit à Reuters un habitant.
Selon l’Union de la coordination de la révolution syrienne, une soixantaine de soldats déployés dans la région de Daïr az Zour auraient fait défection et rejoint les rangs de la contestation.
Les habitants auraient constitué de leur côté des comités locaux de défense et érigé des barricades pour tenter de ralentir la progression des blindés à l’intérieur de la ville.
« De nouvelles colonnes de blindés avancent vers Daïr az Zour », rapporte l’Union de coordination dans un communiqué.
L’agence officielle de presse syrienne indique pour sa part que des « groupes armés » opèrent dans Daïr az Zour, bloquant des routes, terrorisant des habitants et attaquant les forces de sécurité. « Un échange de coups de feu s’est produit. Les forces de police ont fait face à ces groupes armés et les traquent toujours », ajoute l’agence.