11èmes rencontres cinématographiques de Béjaia,L’Espoir entre rêve et utopie

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Scène du film égyptien Winter of Discontent

Le printemps arabe avait droit de cité mardi dernier via un documentaire tunisien et un long métrage fiction égyptien.

Deux films sur la révolution arabe, l’un est une fiction portant sur le printemps arabe en Egypte et l’autre un documentaire portant sur le désir de changement en Tunisie via la figure de cette femme au destin tragique.

L’un comme l’autre, raconte le bouleversement social qui s’est opéré au sein de ces sociétés arabes qui a affecté des milliers de gens et changera radicalement le cours de l’histoire. Certains n’en sortiront pas indemnes, d’autres ne verront pas, hélas, leur vie changer, comme Aïda que Hinde Boudjemaâ va suivre pendant des jours et des semaines dans sa quête d’exister enfin, à la lueur des promesse de ce printemps du Jasmin. Comme beaucoup de cinéastes, Hind commence à filmer les images des manifestations, mais sa rencontre avec cette femme qui veut squatter des maisons pour trouver juste un toit où élever ses enfants va la happer. Aïda n’a pas eu la vie facile. Divorcée avec quatre enfants, elle a déjà fait de la prison en passant aussi par la prostitution. Son destin cruel très émouvant, est narré dans ce film sans fausse pudeur. Dans ce flou artistique qui fait le lot du quotidien de cette femme, conjugué avec la situation chaotique du pays qui vient d’évincer Ben Ali mais a profité à Ennahda à l’issue des élections, la Tunisie vit dans l’incertitude la plus totale.

Le documentaire qui devait porter aussi sur les filles-mères, se limitera finalement à un seul personnage à travers lequel toutes les tares de la société tunisienne sont révélées au grand jour, notamment la corruption de la police.. Aïda pour vivre est acculée à faire des bêtises et elle le reconnaît volontiers dans le film. Son fils ainé traité par sa famille de «bâtard», ne lui facilite pas la tâche. Enfant dont l’indiscipline crée souvent des conflits et des disputes qui éclatent au sein de la famille.

Dans C’était mieux demain, titre du documentaire, Hind Boujemaâ filme ainsi des moments intimes forts et intenses où la mère se dispute avec son enfant, mais aussi des moments de joie quand celle-ci emmène les quatre enfants à la plage et ses instants de désespoir et de larmes des plus intolérables. Si la caméra de Hind Boujemââ est braquée cette fois sur une seule femme, les images des manifestations sur l’avenue Bourguiba sont aussi visibles dans ce film. «Elle s’est imposée à moi. Elle était tellement époustouflante car pour moi la révolution passe par elle. Elle est l’origine, l’essence même de la révolte. Elle était si détruite qu’elle n’a pensé qu’à elle à ce moment-là.» Et de rajouter à propos de ces images tournées en prison: «C’était une période de flottement, c’est pourquoi j’ai pu m’introduire en prison mais je me demande si je pourrai le faire aujourd’hui. J’ai pu me permettre de filmer des choses que je n’aurai jamais pu filmer avant.

Un tel film n’aurait jamais pu être fait avant. Mais d’ailleurs, la révolution est en arrière-plan. Je ne m’y attarde pas beaucoup. Je suis restée fixé sur elle pour montrer combien mon héroïne était détachée par rapport à ce grand événement historique qui se passait bien, qu’elle en avait conscience à sa manière… C’était très important pour moi de montrer ce qu’il y avait derrière ce type de femme que l’on condamne parce qu’on les voit comme des prostituées, de personnes mauvaises. Pour moi, il y a quelque chose dans leur vie qui justifie cela. Elle m’a donné envie de fouiller plus.» Filmé dans l’urgence, ce docu fait écho au long métrage fiction de Ibrahim Batout, un reporter de guerre à l’origine, faut -il le signaler, qui décide lui aussi de raconter une histoire en partant de ce qu’a pu endurer la population égyptienne pendant les manifestations de la place Tahrir, entre vent de liberté et répression sans égale, des jeunes, leur emprisonnement et scènes de torture. Aussi, le décor est planté en plein Caire, la veille du 25 janvier 2011, à quelques jours donc de cette célèbre date historique avec quelques documents d’archives à l’appui et la voix of de quelques extraits des différents discours donnés par le président Hosni Moubarek avant son éviction.

Le film Winter of Discontent met en vedette Amr Waked, qui a également produit le film. Il joue le rôle d’une information sympathisant de la cause palestinienne qui se rallie aux manifestations. Farah est journaliste télé et elle mesure l’abysse qui sépare la couverture internationale des événements, des informations officielles qu’elle est obligé de faire passer, car destinées à atténuer l’importance du mouvement de protestation.. Elle décide de démissionner non sans heurts. Sa relation avec Amr bat de l’aile. Elle s’achève en fait au moment où une nouvelle page commence pour l’Egypte.

Pour l’instant, tout le monde se sent perdu et se demande ce qui se passe. Autre personnage auquel le réalisateur s’intéresse c’est un officier de la Sûreté de l’état qui se dit «aimer plus que tout son pays» et essaye d’endiguer ce mouvement de révolte.

En vain. Derrière cette image de sadique qu’il traîne, il y a celle du père de famille qui ne trouve quoi raconter à sa femme sur ce qui se déroule autour de lui. Mais l’histoire est en marche et rien ne peut plus faire reculer les plus téméraires. L’espoir est enfin permis et la peur est annihilée chez beaucoup de gens, tout comme Aïda qui croit dur comme fer que cette révolution ne lui sera que bénéfique… Si les personnages sont fictifs, le film de El Batout introduit des images véridiques de la place El Tahrir et plonge ses acteurs en plein coeur de la ville. Si le film aussi pèche par un certain côté théâtral dans la mise en scène, le cadrage et la coupe des plans servent fortement l’intention du film qui se veut oppression, partagé entre les fermetures des cellules et les ouvertures des fenêtres qui donnent souvent sur des perspectives énigmatiques mais qui tendent vers un horizon meilleur.