11E jour du procès el khalifa bank, Dépôts d’argent contre cartes de soins?

11E jour du procès el khalifa bank,  Dépôts d’argent contre cartes de soins?

El Khalifa Bank offrait des taux d’intêret très avantageux

Le défilé des accusés prendra fin ce mercredi, pour laisser place aux auditions tant attendues des témoins.

Entre expliquer les pratiques douteuses d’El Khalifa Bank, qui accordait des crédits à taux réduits de 5,5% aux entreprises et l’application de taux de l’ordre de 11,5 et 14% sur les placements reçus, l’interrogation était plus que vive. Et pour cause, le fondement même d’une banque est de pratiquer le contraire. Et afin d’établir la relation entre les avantages reçus par les ordonnateurs et les placements effectués, le juge Antar poursuit l’audition des accusés. Le procureur général revenait inlassablement sur l’interrogation du choix de l’agence El Khalifa d’El Harrach, dans pratiquement tous les cas auditionnés.

A l’audition du 39e accusé, ouvrant la 11e journée de ce procès, Smati Bahidj Farid, P-DG de l’Entreprise nationale de promotion des équipements, tente de se défendre des accusations de corruption, de trafic d’influence et obtention d’avantages, en tablant d’entrée sur les l’attractivité des taux d’intérêts pratiqués par cette banque. Il explique que la décision qui émanait du conseil d’administration était souveraine. En outre, il affirme n’avoir bénéficié d’aucun avantage, si ce n’est la carte de soins de thalassothérapie de Sidi Fredj, qu’il n’avait même pas demandée.

Pour sa part, Bourahla Hamid, directeur de l’unité d’El Harrach de production de boissons, répondra fièrement que son entreprise avait effectué un dépôt à terme de 100 millions de dinars auprès d’El Khalifa Bank, en même temps, elle avait contracté un crédit de 100 millions de dinars. Il prendra un ton encore plus fier, pour annoncer que non seulement son entreprise avait récupéré ses fonds avant la liquidation de la banque, mais elle avait également réalisé un profit de l’ordre de 34 millions de dinars. Concernant la carte de soins de thalassothérapie qu’il avait utilisée à 22 reprises, il répondra qu’il l’avait obtenue avant sa promotion au poste de DG. Interrogé par le procureur général sur le choix de l’agence d’El Harrach et sur la différence anormale des taux d’intérêts, il répondra que la stratégie de l’entreprise était d’opter pour des placements qui rapporteraient le plus de profit et que c’est sur ce critère que le choix de l’agence a été fait.

Succédera à la barre Si Ameur Saïd, P-DG de Endimed (Entreprise nationale de distribution de médicaments au détail). Accusé également de corruption, de trafic d’influence et d’obtention d’avantages, il remettra la responsabilité du choix d’El Khalifa Bank, au conseil d’administration de son entreprise. Ce dernier n’avait pas autorisé des placements de fonds chez El Khalifa et préfèré l’ouverture de 10 comptes courants, pour un montant de 35 millions de dinars, dans cette banque pour faciliter les relations avec ses fournisseurs domiciliés à El Khalifa Bank. Cette réponse laisse le procureur général perplexe. Et de s’interroger sur la différence entre faire un placement ou ouvrir des comptes courants, du moment que la banque disposait de toute façon de 35 millions de dinars. En outre, l’accusé affirme ne pas avoir besoin de carte de soins, puisqu’il était membre du conseil d’administration du centre de thalassothérapie de Sidi Fredj.

Don de 20 ordinateurs

A son tour, Telli Safi répondra aux mêmes accusations. En tant que directeur général de l’Agence de développement social, il annonce que son rôle et celui de son organisme, étaient de venir en aide aux nécessiteux. Il déclare qu’aucun dépôt de fonds n’avait été effectué à El Khalifa Bank. Il fera état de la seule convention signée avec cette banque pour l’ouverture de deux comptes courants pour un montant de 1,8 milliard de dinars. Il explique que sur ce montant, 80% ont été consommés pour le financement de microentreprises, soit 1,5 milliard de dinars. Ceci en plus du fait que cette convention fut signée par son prédécesseur Mohamed Meziane Mouloud. Pour le don de 20 ordinateurs de la part d’El Khalifa Bank, il déclare que cela était une aide survenue à la suite d’un incendie dans l’une des agences. Par ailleurs, il niera tout lien entre le dépôt effectué et l’obtention d’une formation de pilote pour son fils à l’université d’Oxford. Le fils en question est actuellement pilote à la compagnie Tassili Airlines. Ses propos seront confirmés par le prochain accusé qui n’est autre que Mohamed Meziane Mouloud.

Les mêmes charges ont concerné Laïchar Rachid, directeur des opérations financières à la Cnac. L’accusé répond que sa tutelle avait décidé de placer la somme de 1,803 milliard de dinars à El Khalifa Bank. Ce montant représentait 2,8% de l’ensemble des placements effectués auprès des banques publiques. Il précise que cette décision était appuyée par les taux alléchants que proposait El Khalifa Bank. Il insistera sur le fait qu’il n’avait nul besoin de carte de soins, du fait qu’il était curiste au centre de Sidi Fredj

Les auditions prennent un rythme plus effréné dans l’après-midi, le juge Antar veut en découdre. Il auditionne Mendjel Mohamed, directeur financier de l’Agence nationale d’assurances. Celui-ci déclare avoir été démarché par les gens de la Cnma pour rejoindre El Khalifa Bank en 2002. Il explique que les bons du Trésor revenaient très cher à l’agence. Le conseil d’administration avait opté pour des placements à terme chez Khalifa Bank. Il confirme au juge que ses prérogatives lui permettaient de cosigner la convention avec cette banque pour un montant de 300 millions de dinars, somme qui n’a jamais été récupérée par l’agence. Suite à quoi, il avait été approché par le directeur adjoint de l’agence d’El Khalifa d’El Harrach pour rejoindre le club de thalassothérapie de Sidi Fredj. Il insistera sur le fait qu’il n’avait reçu aucun avantage, et que la carte de soins ne représentait qu’une adhésion, sans relation avec les dépôts effectués.

Une perte énorme pour la mutuelle

A ce stade de l’audition, le juge Antar convoque à la barre Belarbi Salah Hamdane, commissaire divisionnaire et président du conseil d’administration de la mutuelle à la Dgsn. L’accusé affirme qu’une étude comparative des intérêts appliqués par les banques, avait été effectuée par la commission de la mutuelle, avant de confier la coquette somme de 250 millions de dinars à El Khalifa Bank. Et ce, dans un premier temps à l’agence de Chéraga, avant de transférer ce placement vers l’agence de Hussein Dey. Cette dernière était plus avantageuse, avec un taux d’intérêt de 14%. Par contre, ce placement représente une perte énorme pour la mutuelle qui avait retiré tous ses fonds des autres banques pour les placer à la Khalifa Bank, contre un gain de 75 millions de dinars.

En somme, tous les accusés avaient leurs arguments et expliquaient aisément que les avantages reçus n’étaient que le fruit du hasard, au moment où le procureur général n’a reçu aucune explication sur le choix récurrent de l’agence d’El Harrach.

Par ailleurs, le défilé des accusés prendra fin ce mercredi, pour laisser place aux auditions tant attendues des témoins. Dans la salle, le nom du premier témoin est évoqué en la personne d’Akli Youcef, le directeur de trésorerie de l’agence Khalifa de Chéraga.