Les héros ne sont plus ce qu’ils étaient : des dizaines d’anciens policiers et pompiers new-yorkais ont été inculpés mardi 7 janvier pour une vaste fraude à la pension d’invalidité après les attentats du 11-Septembre. L’enquête, ouverte il y a deux ans, implique au total 106 suspects dont les agissements remontent pour certains à la fin des années 1980, selon le procureur de Manhattan, Cyrus Vance Jr. « La somme totale détournée sur l’argent des contribuables pourrait atteindre les 400 millions de dollars », a précisé le procureur.
Après les attentats, beaucoup des accusés avaient déclaré être incapables de travailler, évoquant des troubles psychiques – dépression et stress post-traumatique – pour toucher une pension d’invalidité à laquelle ils n’avaient pas droit. Dans leur demande de pension, les accusés avaient affirmé qu’ils sortaient peu de chez eux, ne voyageaient pas, et n’avaient quasiment pas d’interaction sociale, selon l’acte d’accusation.
Mais, de fait, beaucoup allaient très bien. L’un d’eux pilotait son hélicoptère, un autre jouait au black jack à Las Vegas, un autre faisait du Jet-Ski, un autre encore enseignait les arts martiaux. Certains dossiers étaient très largement antérieurs aux attentats de 2001.
FEINDRE LES SYMPTÔMES

Tous avaient été conseillés dans leurs démarches par quatre hommes, Raymond Lavallée, avocat de 83 ans, Thomas Hale, 89 ans, Joseph Esposito, un ex-policier de New York âgé de 64 ans, et John Minerva, 61 ans, consultant spécialisé dans les questions d’invalidité. « Depuis 1988 au moins, ces hommes sont accusés d’avoir formé des centaines de personnes aux façons de convaincre l’administration de la sécurité sociale de leur incapacité totale de travailler », a affirmé Cyrus Vance.
La montant de la pension d’invalidité moyenne aux Etats-Unis varie, s’élevant de 30 000 à 50 000 dollars par an, et s’ajoutait pour les accusés à leur retraite. Pour leur aide, Lavallée, Hale, Esposito et Minerva touchaient de 20 000 à 50 000 dollars par dossier accepté. « Beaucoup des participants [à l’escroquerie] ont de façon cynique prétendu souffrir de maladie mentale comme un résultat du 11-Septembre, déshonorant les équipes de secours qui ont servi leur ville au prix de leur propre santé et sécurité », s’est insurgé le procureur de Manhattan, soulignant que cette escroquerie avait réduit d’autant les ressources pour combattre les vraies situations de stress post-traumatique.
Certains des accusés souffraient de troubles limités, pour lesquels ils pouvaient prétendre à des aides, mais pas à des pensions d’invalidité, selon l’acte d’accusation. Certains fraudeurs ont au total touché 500 000 dollars. En moyenne, les accusés ont reçu chacun 210 000 dollars. Les attentats du 11-Septembre avaient fait près de 3 000 morts à New York. « L’idée même que nombre d’entre eux aient choisi les événements du 11-Septembre pour prétendre à des pensions de handicap les déshonore davantage encore », a déclaré le chef de la police new-yorkaise, Bill Bratton.