Le 1er mai est intimement lié à l’évolution du capitalisme. Le XXIe siècle est à la fois celui de l’essor de la production industrielle et de l’exploitation éhontée des travailleurs.
Les syndicats étaient le cadre des luttes pour refuser une situation qui n’épargnait pas femmes et enfants. 1886, aux Etats-Unis, reste une année marquante. Une très forte pression des syndicats permet à environ 200.000 travailleurs d’obtenir la journée de huit heures. Au IVe congrès de l’American Federation of Labor, en 1884, les principaux syndicats s’étaient donnés deux ans pour imposer celle-ci. Le choix de débuter leur action un 1er mai n’était pas fortuit. Beaucoup d’entreprises américaines entamaient ce jour-là leur année comptable. En souvenir de ce succès, les syndicats européens, quelques années plus tard, instituent une « journée internationale des travailleurs ». Arrive le 1er mai 1886. Un grand nombre de travailleurs obtiennent immédiatement satisfaction. D’autres, au nombre d’environ 340.000, doivent faire grève pour forcer leur employeur à céder. Le 3 mai, une manifestation fait trois morts parmi les grévistes de la société McCormick Harvester, à Chicago. Une marche de protestation a lieu le lendemain et dans la soirée, tandis que la manifestation se disperse, il ne reste plus que 200 manifestants face à autant de policiers. C’est alors qu’une bombe explose devant les forces de l’ordre. Elle fait une quinzaine de morts dans les rangs de la police. Trois syndicalistes anarchistes sont jugés et condamnés à la prison à perpétuité. Cinq autres sont pendus en novembre 1886 malgré des preuves incertaines. Ils seront réhabilités plus tard. Sur une stèle du cimetière à Chicago, sont inscrites les dernières paroles du condamné, Augustin Spies : « Le jour viendra où notre silence sera plus puissant que les voix que vous étranglez aujourd’hui. »
LE MUGUET DE PARIS
Trois ans après le drame de Chicago, l’Internationale socialiste réunit à Paris son deuxième congrès. Les congressistes se donnent pour objectif la journée de huit heures, sachant que jusque-là, il était habituel de travailler dix ou douze heures par jour. Le 1er mai 1891, à Fourmies, petite ville du nord de la France, la manifestation rituelle tourne au drame. La troupe tire sur la foule pacifique des ouvriers. Elle fait dix morts dont 8 de moins de 21 ans. L’une des victimes, Marie Blondeau, habillée de blanc, les bras couverts de fleurs, devient le symbole de cette journée. Avec ce drame, le 1er mai s’enracine dans la tradition de lutte des ouvriers européens. Les manifestations rituelles ne se cantonnent plus dès lors à la revendication de la journée de 8 heures. Elles deviennent l’occasion de revendications plus diverses. L’URSS décide en 1920 de faire du 1er mai une journée chômée. Cette initiative est peu à peu imitée par d’autres pays. En France, dès 1890, les manifestants du 1er mai ont pris l’habitude de défiler en portant à la boutonnière un triangle rouge. Le triangle est quelques années plus tard remplacé par la fleur d’églantine. En 1907, à Paris, le muguet, remplace cette dernière. Il faudra attendra les manifestations du 1er mai 1936 pour arracher d’autres conquêtes sociales. La victoire du Front populaire cette année là permet l’instauration des congés payés.
R. H.