SNC-Lavalin place le Canada en tête d’une liste noire de la Banque Mondiale

SNC-Lavalin place le Canada en tête d’une liste noire de la Banque Mondiale

sncpapier.jpgLes entreprises canadiennes forment le gros de la liste des compagnies frauduleuses dans le monde, selon une publication de la Banque Mondiale. SNC-Lavalin, frappée d’une enquête en Algérie pour corruption, est placée sur la liste noire, ainsi qu’une centaine de ses succursales.

Alors que seulement 3% des canadiens avouent avoir payé un pot-de-vin pour un service selon Transparency International, les entreprises canadiennes représentent 20% de la liste de compagnies « blacklistées », établie et publiée par la Banque Mondiale. Ces entreprises sont, pour une large majorité, des succursales internationales du groupe canadien d’ingénierie et de construction SNC-Lavalin, opérant entre autres en Chine, à Malte, en Egypte et en Inde. Elles sont déclarées inéligibles aux appels d’offres de la Banque Mondiale pour les dix prochaines années.

«Ceci est une conséquence de l’enquête de la Banque Mondiale sur le projet du pont Padma au Bangladesh (où plusieurs ex-cadres de SNC-Lavalin font face à des accusations de corruption, NDLR). Les enquêteurs de la Banque Mondiale y coopèrent de manière étroite avec la Gendarmerie royale du Canada dans un effort de promouvoir une action collective contre la corruption », a déclaré James David Fielder, directeur des enquêtes de la Banque Mondiale.

L’insouciance des autorités canadiennes

En 2012, les entreprises canadiennes n’apparaissaient pas sur la liste noire de la Banque Mondiale, rappelle les médias canadiens. Cette année, le Canada caracole en tête de liste, suivie par les Etats-Unis et l’Indonésie. Une explication possible à ce renversement de situation serait que la Banque Mondiale a renforcé ses enquêtes anti-corruption ces dernières années, avec quatre fois plus de suspensions qu’en 2012, explique au Financial Post, Tim Coleman, membre d’un cabinet d’avocats à New York. Selon lui, les entreprises canadiennes n’ont pas mis en place des mesures anti-corruption de manière aussi efficace que celles des Etats-Unis. « Le résultat, c’est qu’un climat de sentiment d’impunité s’est installé au Canada. Les entreprises avaient l’impression que si leurs propres autorités ne surveillaient pas de près la gestion de leurs activités internationales, alors personne d’autre ne le ferait non plus », poursuit Tim Coleman.

Cependant, certaines filières de SNC-Lavalin en France et en Arabie Saoudite par exemple, n’ont reçu qu’une radiation partielle de la part de la Banque Mondiale. Placées sous surveillance, elles peuvent toujours répondre à des appels d’offres de la Banque Mondiale. Selon un porte-parole anonyme cité par le Financial Post, elles ont été frappées de sanctions plus légères car elles avaient déjà pris des mesures concrètes pour contrer la corruption.

Ennuis judiciaires En Algérie

En Algérie, deux entreprises du géant canadien apparaissent sur la liste noire de la Banque Mondiale : SNC-Lavalin Algérie, ainsi que Myah Tipaza, détenue en partie par SNC-Lavalin. Soupçonné de malversations depuis quelques mois par les autorités algériennes, le groupe de génie canadien avait été placé en mai dernier sur la liste noire des entreprises interdites d’exercer sur le territoire algérien. Ses locaux d’Alger avaient fait l’objet d’une perquisition par les limiers de la Direction du renseignement et de la sécurité (DRS – services secrets algériens NDLR) en relation avec un contrat de 825 millions remporté par SNC-Lavalin en 2005 pour la construction de la centrale électrique de Hadjret Ennous (wilaya de Tipasa).

Face à cette avalanche de soupçons et d’accusations de corruption, les autorités canadiennes, pour qui l’Algérie représente le premier fournisseur mondial de pétrole brut, tentent de rassurer le gouvernement algérien. « Les sociétés canadiennes en Algérie ne veulent pas être affectées par les mesures visant SNC-Lavalin », avait déclaré en juin l’ambassadrice du Canada à Alger, dans une interview à Maghreb Emergent. Lors d’une récente visite en Algérie la semaine dernière, le ministre des Affaires Etrangères, John Baird, avait plaidé que le cas de SNC-Lavalin n’est pas représentatif de «toutes les entreprises canadiennes, qui accordent une énorme importance à l’éthique». Emboitant le pas au lobbying des autorités canadiennes, SNC-Lavalin a déclaré avoir adopté certaines mesures anti-corruption : le groupe a créé, entre autres, une ligne téléphonique à des fins de dénonciation et la fin des versements de commissions à des intermédiaires pour l’obtention de contrats.