Le procès des prisonniers politiques sahraouis prend un tour plus inquiétant

Le procès des prisonniers politiques sahraouis prend un tour plus inquiétant

Le procès des prisonniers politiques sahraouis,  qui a repris le 5 juin à Rabat, a pris un tour plus inquiétant avec les plaidoiries des parties civiles qui veulent ajouter les charges de terrorisme domestique, a indiqué lundi l’Association des amis de la République arabe sahraouie démocratique (AARASD).

Le procès cassé des prisonniers politiques sahraouis du groupe de Gdeim  Izik (24 accusés, 21 qui sont toujours incarcérés depuis plus de 6 ans) a repris le 5 juin à la cour d’appel de Rabat-Salé au Maroc, rappelle-t-on.

L’AARASD, qui se bat pour le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination, s’est inquiétée dans la mesure où les accusés refusent d’assister au procès, en raison de l’accumulation d’irrégularités et  d’iniquités, mais son inquiétude grandit avec les plaidoiries des avocats des parties civiles.

« Ces derniers, sans doute devant l’impossibilité d’apporter les preuves de la culpabilité des accusés, tentent d’obtenir que soient retenues de nouvelles charges, celles de +terrorisme domestique+ », a-t-elle précisé dans un communiqué parvenu à l’APS, soulignant que « ces charges ne vont pas requérir des preuves matérielles pour pouvoir condamner, car il suffit d’attester l’intention de +terrorisme+ ».

Pour l’association, « modifier ainsi les charges en cours de procès est toutefois parfaitement illégal », exprimant sa crainte vis-à-vis des juges  marocains qui, avec ces nouvelles charges, peuvent prononcer la condamnation à mort à l’encontre des militants sahraouis.

« Ce serait paradoxalement revenir à un procès politique, alors que tout a été fait depuis 6 mois pour le déguiser en procès criminel classique »,  a-t-elle estimé, soulignant qu’ »il s’agit bien d’un procès politique,  contre 24 militants sahraouis pacifiques activant pour l’autodétermination  de leur peuple, ce que le régime marocain considère comme un crime ».

Face à ce risque de dérapage terrible, l’AARASD s’étonne que l’instance  internationale responsable de la sécurité des Sahraouis dans le territoire non autonome du Sahara occidental, la MINURSO,  n’a bien sûr pas été invitée au procès par les autorités marocaines d’occupation, alors que les ONG telles Amnesty International ou Human Rights Watch sont interdites de présence au tribunal.

En mai dernier, les membres de la défense des militants sahraouis se sont  retirés du procès et deux avocates françaises ont été violemment expulsées de la Cour d’appel de Rabat.

Entre la comparution de faux témoins, la partialité manifeste de la Cour, les interrogatoires sur la base d’aveux signés sous la torture et la  réalisation d’expertises médico-légales truquées pour écarter les allégations de torture des accusés, il ne se trouve plus personne d’un tant soit peu honnête pour louer la qualité de la justice dans ce procès , avait  indiqué l’association française Action chrétienne pour l’abolition de la torture (ACAT).

Les 24 militants sahraouis ont été arrêtés, torturés et condamnés à de lourdes peines sur la base d’aveux signés sous la torture en raison de leur participation au camp de protestation sahraoui de Gdeim Izik en 2010,  rappelle-t-on. Les condamnations ont été prononcées le 16 février 2013 par le tribunal militaire à l’issue d’un procès  inique  marqué notamment par le refus d’entendre les témoins cités par la défense et d’ordonner une  expertise médico-légale concernant les allégations de torture des accusés.

Les noms des victimes que les accusés sont présumés avoir tuées n’ont même pas été mentionnés lors du procès. Le 27 juillet 2016, la cour de cassation a cassé le jugement et renvoyé les accusés devant la cour d’appel de Rabat.