Bagdad et le Kurdistan se donnent 24h de plus pour éviter l’affrontement

Bagdad et le Kurdistan se donnent 24h de plus pour éviter l’affrontement

Bagdad et le Kurdistan irakien se sont donné dimanche une journée de plus pour tenter de résoudre leur crise par le dialogue et éviter tout affrontement armé, alors que leurs troupes, massées dans la riche province pétrolière de Kirkouk, se font toujours face.

Dans la matinée, le président irakien Fouad Massoum, lui-même kurde, rencontrera Massoud Barzani, président du Kurdistan autonome, a indiqué un responsable kurde, sous le couvert de l’anonymat.

Des hauts responsables de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), le parti de M. Massoum, grand rival du Parti démocratique kurde (PDK) de M. Barzani, participeront également à cette réunion qui se tiendra dans la province de Souleimaniyeh, fief de l’UPK à l’est de Kirkouk, a-t-il précisé.

Alors que les politiques tentent de reprendre langue, des milliers de combattants continuent de se faire face dans la province, située au nord de Bagdad.

Tôt dimanche, un photographe de l’AFP a vu les troupes irakiennes toujours massées en face des peshmergas, qui tenaient leurs positions, sans qu’aucun mouvement ne soit visible d’un côté ou de l’autre.

Les forces, qui disent désormais « attendre les ordres » de leurs commandements, ont obtenu un nouveau délai, de 24 heures, selon le responsable kurde.

L’Irak exige de reprendre le contrôle des positions prises par les peshmergas, les combattants kurdes, profitant de la débâcle de l’armée et de la police irakienne face à la percée fulgurante du groupe Etat islamique (EI) en juin 2014.

Outre des bases militaires, les combattants de la région, qui bénéficie depuis 1991 d’une autonomie étoffée au fil des ans, se sont également emparés d’infrastructures et de champs pétroliers dans la province de Kirkouk, qui dépend des autorités centrales de Bagdad mais qu’Erbil revendique.

Les forces irakiennes, gouvernementales et paramilitaires, avaient laissé aux peshmergas jusqu’au milieu de la nuit de samedi à dimanche pour s’en retirer, avaient affirmé les responsables kurdes.

Civils en armes

Une fois ce délai expiré, combattants, habitants et politiques disaient redouter le pire. Dans la nuit, des civils kurdes s’étaient massés dans la ville de Kirkouk, armes à la main, tandis que leur gouverneur, Najm Eddine Karim, limogé par Bagdad mais qui reste à son poste, prévenait: « les habitants aideront les peshmergas (…) nous ne laisserons aucune force pénétrer dans notre ville ».

Jusqu’à présent, les forces irakiennes n’ont pas entamé de combat, se contentant de progresser et de reprendre certaines bases désertées peu avant par les peshmergas. Leur objectif n’est pas la ville de Kirkouk, indiquent même les autorités à Erbil. Elles veulent reprendre « les champs pétroliers, une base militaire et un aéroport » mitoyen.

De son côté, Bagdad répète ne pas vouloir « mener une guerre » mais affirme qu’il est du « devoir » de ses forces de reprendre les zones sous contrôle des autorités centrales aux peshmergas qui ne répondent qu’aux autorités kurdes.

En outre, Bagdad, dont le budget est grévé par la chute des cours du pétrole et trois années de mobilisation et de combats contre l’EI, entend reprendre la main sur les 250.000 barils de pétrole par jour des trois champs de la province de Kirkouk, Khormala, pris par les Kurdes en 2008 et Havana et Bay Hassan, pris en 2014.

Le Kurdistan –qui traverse la plus grave crise économique de son histoire– pourrait, lui, lourdement pâtir de la perte de ces champs qui assurent 40% des exportations pétrolières de la région autonome.

Bagdad, en crise ouverte avec Erbil depuis la tenue le 25 septembre de son référendum d’indépendance sur son territoire mais également dans des zones disputées, notamment Kirkouk, a récemment multiplié les mesures économiques et judiciaires pour faire plier le Kurdistan.

Washington, allié à la fois des Kurdes et des forces irakiennes dans la lutte contre l’EI, a affirmé vouloir « calmer les choses ».