Les tentatives de reconnaissance des crimes coloniaux sont catégoriquement insuffisantes

Les tentatives de reconnaissance des crimes coloniaux sont catégoriquement insuffisantes

PARIS – Les tentatives de reconnaissance des crimes coloniaux commis par la France sont « nettement et catégoriquement insuffisants », a affirmé lundi à Paris l’historien français Alain Ruscio, soulignant que le colonialisme a frappé « violemment » et multiplié les crimes.

Les tentatives de reconnaissance « sont nettement et catégoriquement insuffisants », a-t-il indiqué dans un entretien à l’APS, soulignant qu’on « doit à la vérité historique un regard lucide ».

Pour l’auteur de « Nostalgérie : l’interminable histoire de l’OAS » (La Découverte, 2015), « rien, dans les discours politiques majoritaires et dans les grands médias, ne rappelle les innombrables crimes du colonialisme, le racisme institutionnalisé, la répression, ‘la civilisation arrivée à Alger sous la forme de la guillotine’, comme l’écrivait lucidement Victor Hugo en 1842 », ajoutant qu’il ne faut jamais oublier qu’une grande partie de la population française (dont plusieurs millions de musulmans) « sont issus directement ou non de l’histoire coloniale ».

« La France officielle doit savoir parler à cette partie de sa propre population », a-t-il dit.

Alain Ruscio, chercheur indépendant, a également affirmé que le colonialisme « a toujours et partout frappé violemment toutes les forces politiques et sociales qui voulaient résister, a multiplié les crimes de guerre et les massacres de masse, comme en mai 1945 (en Algérie) », mettant en exergue que le peuple algérien a été « terriblement victime ».

« Le napalm, on sait qu’il a été utilisé également en Indochine et au Cameroun. Mais il n’y a aucun, je dis bien aucun, territoire colonisé qui n’ait connu un ou plusieurs massacres de masse », a ajouté ce signataire de la pétition pour la rapatriement des 36 crânes de résistants algériens conservés au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) de Paris.

Au sujet des vives réactions après la déclaration à Alger du candidat à la présidentielle Emmanuel Macron qualifiant le colonialisme de « crime contre l’humanité », l’historien a fait observer qu’historiquement, la droite et l’extrême droite « ont lié leurs destinées politiques à la soi-disant ‘grandeur coloniale’ de la France », rappelant que « si De Gaulle a pratiqué une politique réaliste vers la fin de la guerre d’Algérie, il avait été résolument, férocement colonialiste durant la plus grande partie de sa vie ».

« N’oublions jamais que la Vè République, le régime actuel de la France, a été imposé par un véritable coup de force, appuyé sur les soldats de Massu et de Salan, qui furent ‘Algérie française’ jusqu’au bout. Ceci dit, la gauche française, en particulier le Parti socialiste et Mendès France, portent également une lourde responsabilité », a-t-il précisé, estimant que Macron « a voulu instrumentaliser son passage en Algérie ».

« Macron, qui est fondamentalement un homme de droite, a voulu instrumentaliser son passage en Algérie. Les vrais anticolonialistes ne sont et ne seront pas dupes. Nous qui combattons le retour en force de l’idéologie coloniale depuis des années, nous n’avons jamais vu Macron se manifester », a-t-il soutenu, relevant que « ce politicien à l’ancienne dit une chose d’un côté de la Méditerranée, mais ne récuse aucun des soutiens de droite qui viennent vers lui ».