Lutte contre le cancer: «Réticence des autorités aux traitements innovants».

Lutte contre le cancer: «Réticence des autorités aux traitements innovants».

Après avoir dénoncé la rupture de stock de l’Herceptin, un anticancéreux indispensable aux patientes souffrant d’un cancer du sein, le Pr Bouzid, président de la Société algérienne d’Oncologie médicale revient à la charge, pour dénoncer cette fois-ci, les entraves bureaucratiques, empêchant l’enregistrement des traitements anti-cancer innovants.

Connu pour son franc-parler, le Pr Bouzid, chef de service Oncologie du Centre Pierre et Marie Curie (CPMC), a affirmé, en marge de la tenue des sixièmes cours supérieurs de Neuro-Oncologie, hier, à Zeralda, que « ces journées nous permettent de connaître, les toutes dernières innovations, notamment par rapport à la tumeur cérébrale, afin de pouvoir les appliquer convenablement, dans notre pays ».

Mais, dit-il, il ne suffit pas de connaître les traitements innovants mais il faut les enregistrer pour permettre à nos malades une meilleure prise en charge de la maladie. Il a affirmé que les experts nationaux et étrangers ont évoqué le dernier traitement innovant ‘Le vemurafenib’ recommandé aux malades qui ont des mutations très particulières, qu’on appelle ‘BRAF’, en précisant que nos oncologues connaissent déjà l’existence de ce traitement. Un traitement qu’on connaît et qu’on avait demandé, il y a de cela 3 ans, d’enregistrer, mais sans aucune suite.

Le Pr regrette « qu’on se heurte à des obstacles bureaucratiques de la part de la direction de la Pharmacie du ministère de la Santé qui est très réticente quant à l’enregistrement des médicaments innovants » d,énonce-t-il. Pour l’autre traitement innovant, l’immunothérapie, « on a obtenu ce qu’on appelle une autorisation pour cinq malades au mois de juin, on a épuisé les traitements de ces cinq malades, au mois d’août, on a demandé un renouvellement d’autorisation temporaire d’utilisation de traitement, on est au mois de janvier et, toujours, sans réponse.

Le Professeur alerte « quatre patients sont encore vivants, il y en a un qui est décédé ; les personnes en vie attendent ce traitement, en souhaitant que nos autorités prennent conscience ». Il résume avec regret « c’est-à-dire, qu’aujourd’hui, nous, les praticiens et nos patients, sommes au courant des innovations, nous demandons, tout simplement, à ce qu’ils soient enregistrés, mais on se heurte, souvent, à des obstacles totalement inacceptables ».

Interrogé sur les raisons de cette réticence, le professeur affirme qu’aucun motif n’est avancé «personne ne parle de problème de budget, d’ailleurs le ministre de la Santé et le chef du gouvernement ont dit qu’il n’y aurait pas des restrictions budgétaires dan,s le domaine de la santé ». Il poursuit « ils l’ont dit et répété et l’on est tenté de les croire ». Et d’affirmer, contrairement au traitement de l’Herceptin, ces médicaments innovants n’ont ni bio similaires, ni des génériques parce qu’ils sont protégés par des brevets. Et si le motif est d’espérer une réduction des coûts « je trouve que c’est vraiment hasardeux ».

En ce qui concerne la prise en charge des malades atteints de cancer, le Pr Bouzid continue à affirmer que la prise en charge est toujours mauvaise sur le plan de l’organisation. Et pour remédier à cette situation, il a précisé qu’une réunion a été tenue, la semaine dernière, à Annaba pour faire ce qu’on appelle les chartes de réunion et de concertation pluridisciplinaires RCP, en présence du professeur Zitouni et tous les oncologues qui ont été chargés d’élaborer et d’appliquer le plan anti-cancer ».

Il a précisé que dans un mois et demi « on va demander aux autorités de nous faire une réglementation pour ces fameux RCP ». Il explique que la RCP est un modèle d’organisation, c’est-à-dire qui permet de regrouper le dossier du patient, le patient lui-même et autour il y a tous les intervenants, oncologues, radiothérapeutes, chirurgiens pour choisir au début le meilleur traitement pour chaque malade. Le professeur revient pour dire qu’il ne s’agit pas d’une mauvaise prise en charge des malades, mais « cette prise en charge pourrait être meilleure avec une bonne organisation ».