Djamel Eddine nibouche, chef de service de cardiologie à l’hôpital Nefissa-Hamoud: Une alerte qui va droit au coeur

Djamel Eddine nibouche, chef de service de cardiologie à l’hôpital Nefissa-Hamoud: Une alerte qui va droit au coeur

Un électrocardiogramme plat signifie un coeur mort. Dans son intervention à la radio, le professeur Nibouche a mis du tonus, du relief, il a lancé des piques pour alerter et sensibiliser.

Quand un professeur en médecine de la dimension du cardiologue Djamel Eddine Nibouche, fait une intrusion dans le débat politique dans un contexte électoral, cela détonne comme une alerte. Une alerte qui va droit au coeur.

S’exprimant sur les ondes de la Radio nationale Chaîne III, le professeur Nibouche a regretté l’absence presque totale des débats sur les problèmes de santé publique dans les discours de campagne électorale des différents partis politiques en lice pour les législatives du 4 mai prochain. Une «omission malheureuse» commente le professeur qui n’a pas tari de chiffres et de propositions le long de son entretien avec l’inévitable consoeur Souhila El Hachemi.

«Il y a un oubli malheureux. Les candidats se rendent partout, dans les marchés, dans les quartiers, les stades, mais pas dans les hôpitaux pour rencontrer cette frange de la société qui en a tant besoin. Le contact avec le citoyen concernant ces fléaux doit être mis au premier plan», regrette-t-il. Le sujet du jour a été sensible et son traitement passionnant. La problématique se déclinait comme suit: la santé du citoyen devrait être une des priorités des partis politiques, mais cette problématique a été, au mieux marginalisée, au pire sacrifiée sur l’autel d’autres préoccupations d’ordre politique parfois même populistes.

Mais la santé du citoyen demeure une question très sérieuse. «Pour ne prendre que cet exemple, la principale cause de décès prématurés dans le monde, 15.000 personnes meurent par an de maladies liées au tabagisme, en 2030 au moins 2 millions d’Algériens mourront de tabagisme», argumente le professeur. Plus alerte, il ajoute qu’ «en Algérie l’âge d’initiation au tabagisme est très précoce, il est de 15 ans.

La consommation du tabac a triplé en Algérie depuis les années 1980». Hélas, ce problème pourtant gravissime qui devait être au-devant de la scène dans les débats et les programmes des partis a été totalement ignoré. Ce n’est pas pour autant que le cardiologue abandonne la partie. « Nous sommes devant un problème de santé publique majeur. Plus grave encore, selon une enquête réalisée par l’OMS sur le tabagisme scolaire, il a révélé que 20% de nos lycéens fument, plus de 40% subissent malheureusement un tabagisme passif».

C’est quand même une préoccupation majeure qui doit interpeller nos hommes politiques. «Les maladies cardiovasculaires font des ravages dans notre société, puisque 45% d’Algériens meurent de leur coeur et de plus en plus jeunes», appuie encore l’invité de la radio.Un électrocardiogramme plat signifie un coeur mort. Dans son intervention à la radio, le professeur Nibouche a mis du tonus, du relief, il a lancé des piques pour alerter et sensibiliser.

Il se dit alors être à la disposition des politiques, pour mieux les éclairer sur certains aspects précis. De leur côté, «les politiques doivent s’entourer d’experts en matière de santé. Car c’est la première préoccupation du citoyens. Ne dit-on pas «la santé avant tout»? Ensuite ne dit-on pas que la prévention peut économiser des dépenses faramineuses et c’est ainsi qu’on diminue le coût de la santé?». Pour juguler ce dangereux phénomène, il préconise la mise en place d’un système permanent de surveillance du tabagisme et du comité de surveillance de tous les fléaux en Algérie.

«Cela implique des enquêtes en milieu scolaire, de suivre le phénomène avec rigueur, de freiner la vente libre de cigarettes, d’interdire la vente au détail qui est un crime, la vente aux abords des lycées, à cela s’ajoutent les cigarettes de la contrebande, sans contrôle». Dans le chapelet de regrets, le cardiologue cite les acquis législatifs dont le décret présidentiel de mars 2006. «Mais attendons les textes d’application avec impatience depuis très longtemps pour que ces lois soient appliquées de manière rigoureuse sur le terrain avec une application. Il faut que notre pays soit aux normes internationales pour la sécurité de ses citoyens.»

Les préoccupations de santé publique ont été élaguées dans cette campagne. Comment expliquer ce désintérêt? Les partis peinent à trouver la solution miracle qui capterait l’attention des Algériens. Abordant à demi-mot le sujet, le FLN estime que seuls le maintien de la gratuité et l’élargissement de la couverture sociale des Algériens semblent être des propositions concrètes.

Vaguement, il s’engage ainsi à «développer» et à «moderniser» le secteur.

A quelques différences près, le même engagement est appelé par le RND pour que la politique de santé menée jusque-là «gagne en efficacité et en rationalité». Tout aussi vague, le RCD propose une politique sanitaire visant en priorité les «besoins réels» de la population, au moyen d’une «mobilisation effective» des partenaires de la santé. Quant au FFS, il promet d’asseoir une sécurité sociale «intégrale» et un système social «plus juste».

Pour le MPA de Amara Benyounès, le programme inhérent à la santé consiste à «généraliser et à activer» le système de la sécurité sociale en la mise en place d’un système de santé «équitable et diversifié», tout en insistant sur le développement de l’industrie pharmaceutique. Mais les vrais problème, les réels dangers…le professeur s’en chargera: «Pour le moment, ils ne saisissent pas la gravité de ce problème. Nous devons donc les sensibiliser pour qu’ils puissent donner des actions efficaces», dixit professeur Nibouche.