La dernière représentation de la pièce “Torchaka” a eu lieu hier au TNA: L’humour pour briser les tabous

La dernière représentation de la pièce “Torchaka” a eu lieu hier au TNA: L’humour pour briser les tabous

La dernière représentation pour le mois de janvier de la pièce théâtrale Torchaka (Allumettes) a eu lieu hier au Théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi (TNA), en présence d’un nombreux public, conquis dès les premières minutes de cette tragi-comédie, par le talent et l’humour des comédiens.

La 25e et dernière représentation pour le mois de janvier du spectacle Torchaka s’est tenue hier soi au théâtre national algérien Mahieddine-Bachtarzi (TNA). Abordant des thèmes du quotidien avec une bonne dose d’humour et d’autodérision, qui feront s’esclaffer, 90 minutes durant, la dense foule présente ce soir-là, cette pièce, que nous pouvons qualifier de “tragi-comédie”, écrite et mise en scène par Ahmed Rezzag, a pour noyau central l’histoire d’amour entre deux allumettes, Torchaka (Adila Soualem) et Zalamite (Oussama Boudchiche).

Dans un décor minimaliste et brut, composé de boîtes rectangulaires, demeures des “Zalamites”, la scène d’ouverture présente des personnages parés d’extravagantes coiffes rouges et hautes, à la manière d’une tête d’allumette, où l’on apprend que le notable du village et polygame avéré, “Si Zalmoute” (campé ici par Hamid Achouri), a des vues sur la jeune Torchaka. Mais cette dernière, à la surprise générale, refuse cette demande, sous prétexte que son prétendant “ne s’allume pas”.

S’ensuit un discours aussi passionnant que téméraire, où la jeune fille explique, consciente du danger d’une telle déclaration, qu’elle est en réalité amoureuse de “Zalamite”. Les premières minutes de ce spectacle annonçaient d’ores et déjà la qualité, le professionnalisme des acteurs et la portée sociale de la représentation, où l’humour et l’irrévérence seraient les maîtres mots.

Mais face à l’intolérance et à l’excès de zèle de son entourage, qui clame que le mot “amour” ne peut être prononcé, car propre aux humains, le jeune et maladroit “Zalamite” déclare, en signe de bravade à cette société archaïque, son amour à sa belle. Avec beaucoup d’humour et d’intelligence, ce premier tableau sera clos par l’héroïne, condamnant les barrières et les dogmes qu’impose la société, qui ne tolère pas les preuves d’affection, encore moins l’amour. L’introduction au tableau suivant est exécutée par un groupe d’hommes et de femmes, qui présage, avec un humour acerbe et provoquant, et un certain sadisme, le sombre avenir du couple, à travers des répliques soutenues par d’excellents comédiens, comme Mustapha Laribi, Samira Sahraoui (incarnant la mère de Zalamite), ou encore Nassim Meznane.

Aussi, la richesse des dialogues, signés Ahmed Rezzag, au-delà de leur piquant, reprennent de nombreuses références culturelles et littéraires, comme des poèmes de Shakespeare ou de Jobrane Khalil Jobrane, des auteurs qui ont à leur manière abordé le thème de la passion, notamment dans le cas du second, dans une société arabe rigoriste. Pour démontrer la frilosité de notre société s’agissant des questions du cœur, deux personnages annoncent qu’il faut se prémunir de l’amour car il est contagieux.

L’interlude qui introduit à la scène suivante démontre, une fois encore, le point fort de cette pièce ; sa légèreté et son humour, grâce à notamment Samira Sahraoui, qui captivera le public par son franc-parler, sa maladresse et surtout son humour cocasse, en refermant chaque tableau, avec une danse, tantôt en tutu rose, tantôt en kimono de Geisha, avec ses pas de danse très approximatifs.

Les dialogues, les interludes musicaux, l’humour et les sujets inhérents à notre société, comme le problème du logement, le népotisme, ou encore la misogynie, ajoutés à l’efficacité des acteurs, procurent à cette pièce une beauté et une touche unique. Torchaka est un antidote à la morosité actuelle, une œuvre à voir absolument. À noter que les représentations reprendront au TNA à partir de février prochain.