70ème Festival International du Film de Cannes : de Cannes à Marseille, Zabor et Ramadhan

70ème Festival International du Film de Cannes : de Cannes à Marseille, Zabor et Ramadhan

Clôture ce soir du Festival de Cannes marqué par une sélection officielle «un peu moins que moyenne» selon l’expression de notre envoyé spécial qui a décidé de quitter le vaisseau avant la proclamation du palmarès ce soir. Le film algérien de Karim Moussaoui «En attendant les hirondelles» a de bonnes chances d’être primé dans la sélection parallèle Un Certain Regard, et «Zabor», le prochain roman de Kamel Daoud est attendu comme le grand évènement de la prochaine rentrée littéraire. Le point commun entre les deux évènements ?

Mehdi Ramdani, le jeune premier algérien qui n’arrête pas de nous étonner.

C’est aujourd’hui que s’achève le 70ème Festival de Cannes. Pour pouvoir quitter la ville , le jury présidé par Pedro Almodovar devra d’abord remettre ce soir peu avant 19h algérienne sa Palme d’or -et autres prix obligés. Nul doute que personne ne gardera un souvenir mémorable de ce cru un peu moins que moyen. En ce qui concerne l’avis des envoyés spéciaux sur l’ensemble de la sélection officielle, c’est très partagé : Mauvaise sélection pour les uns très mauvaise sélection pour les autres. Du coup on n’ a même plus le plaisir de faire les habituels pronostics dont on sait d’avance qu’ils s’avéreront tous très faux. Vu la poignée de films qu’on peut sauver de ce naufrage 2017, on risque de viser juste et cela est désespérant.

Hors compétition officielle, ce que l’on souhaite vivement c’est que le film «En attendant les hirondelles» de Karim Moussaoui décroche d’abord le prix de la sélection parallèle Un Certain Regard ensuite le prix de la Caméra d’or et que l’équipe rentre vite à Alger pour nous confirmer officiellement ce que tout le monde soupçonne fortement, à savoir que vaut mieux taper la bise à Uma Thurman ( présidente du jury d’Un Certain Regard) que de baver dans les taches de rousseur de Sandrine Kiberlain (Présidente du Jury Caméra d’or). Un double-prix donc pour trois bonnes raisons. Et d’une «En attendant les hirondelles» est un très bon film. Et de deux, c’est un film très Algérien. Et de trois, les autres films d’Un Certain Regard, ainsi que tous les autres premiers films toutes sélections confondues qui concourent pour la Caméra d’or on ne les a très pas vus. Résultat nous défendons le film aussi bien pour de raisons objectives que subjectives, et si par malheur les prix dus ne sont pas obtenus, non seulement on dira des choses horribles sur toutes les mères de tous les jurés des deux jurys, et promis, juré , on épouse Amira Soltane et ses idées en même temps et sur le champ. Plutôt être une grosse conne dans un burkini burkinabé et barboter dans les eaux cannoises (ou clubdespinnesques) que d’accepter l’humiliation de remettre les pieds dans de ce Festival de mécréants aveugles en tenues décolletés qui laisseraient passer les hirondelles algériennes sans se rendre compte qu’elles annoncent le printemps berbère tant attendu…

«En attendant les hirondelles sinon gare à vos rondelles», le sms transmis au membres des deux jury manquait de finesse certes, mais comme dirait Rachid Nekkaz nous sommes tous des Fiche S.

Nous avons donc offert nos invitations pour le grand diner de la presse et autres cartons -pass aux soirées de la Quinzaine Des Réalisateurs à tous les Roms qui pullulent dans la ville de Cannes, en commençant par une certaine Hind O qui a pleuré d’émotion devant la générosité de notre zakat en ce mois sacré qui commence en terres incoyantes. Ensuite, en compagnie du jeune acteur Mehdi Ramdani, nous avons abandonné le navire Festival de Cannes direction Marseille pour retrouver Kamel Daoud, le célèbre écrivain de Cologne el Bahia, invité d’honneur d’un nouveau Festival littéraire «Oh les beaux jours !». Mehdi Ramdani qui découvrait pour la première fois le sud de la France était un poil déstabilisé, et il y a de quoi. En moins deux heures de train on peut passer d’une ville où tout le monde est habillé en noeud pap’ et robe de soirée imbibés de champagne (Cannes) à une ville où tout le monde fait le Ramadan et parle en oranais (Massilia). Voir Mehdi Ramdani lire sur la scène de la Criée, le grand théâtre de la ville, la première page du prochain et très attendu roman de Kamel Daoud , «Zabor» (Barzach/ Actes Sud), restera le grand évènement off-Cannes.

Ensuite, après des tarawihs pagnolesques, on a vu l’immense écrivain américain Russel Banks ne lâchant pas Kamel Daoud et Laure Adler en transe comme si c’était déjà leilat el Qadr, car elle était entourée des deux plus grands écrivains du monde édités par Actes Sud, la maison d’édition de la nouvelle ministre de la Culture (Françoise Nyssen qui remplace Hamid Grine, et comme d’habitude je suis le dernier à apprendre la bonne nouvelle).

La veille, Mehdi Ramdani s’était enfermé dans sa chambre pour préparer sa lecture et tant pis pour toutes les gazelles de la ville phocéenne qui l’attendaient dans le hall de l’hôtel pour l’inviter à un s’hor-bain de minuit dans les calanques de la ville cosmopolite.

Il a fallu ruser et jurer sur la tête de la belle lune du ramadan qu’on ne le trahira pas pour s’introduire dans sa chambre et avoir accès au fameux manuscrit de Kamel Daoud, «Zabor». Et alors ????? Alors, voilà: contrairement à ce que laissait entendre ses éditeurs algérois Sofiane Hadjaj et Selma Hallal grands brouilleurs de pistes devant l’éternel, le roman ne parle pas du tout de la romance de Boualem Titiche avec Zsa Zsa Gabor à la veille du déclenchement de la Révolution Algérienne, mais de quelque chose de plus profond que nous sommes censé garder «secret» jusqu’à mi- août date de la sortie officiel du roman.

Peut-on garder jalousement tel un égoïste athée un précieux et sacré document alors que le mois du jeûne nous invite au partage ? La question taraudait le plus croyant des envoyés spéciaux à Cannes. D’autant plus que la pression du journal était au maximum: «Tu n’as pas réussi à décrocher l’interview de Nicole Kidman, ni celle de Robert Pattinson? Il va falloir passer la main cher collègue» quand ce n’était pas tout simplement le service des Ressources Humaines du Quotidien d’Oran qui lui demandait des renseignements pour lancer les démarches administratives concernant la retraite, avec comme entre autres indemnités proposées, une réduction de 50% pour un voyage à la Mecque. Bref, il fallait frapper les esprits avec un scoop pour garder sa place tant convoitée par des jeunes prétendants aux dents cassées et autres candidates aux jupes courtes (de Roms).