12e festival de dimajazz : Un menu bien métissé

12e festival de dimajazz : Un menu bien métissé

dimajazz.jpgLa crème de la scène jazz international, assurent les organisateurs, se tiendra cette année du 20 au 26 septembre 2014 sous un chapiteau….

«Fallait-il douter que Dimajazz aller passer son tour cette année? A cet âge-là, la question ne devrait pas se poser. Le festival est bien enraciné, il est solide et il a toutes les raisons de respecter ses rendez-vous. Et donc, c’est une édition un peu spéciale à cause des chantiers de l’évènement «Constantine capitale de la culture arabe 2015», un événement. Spéciale mais pas bricolée, car la facture artistique est conforme à notre credo: toujours plus haut.

Nous aimons le jazz et nous aimons offrir au public du Dimajazz, ce que nous estimons le meilleur, et le meilleur nous l’avons trouvé cette année dans les couleurs arc-en-ciel de l’Afrique, l’un des berceaux du rythme et du jazz.» voilà qui est dit! Réponse des organisateurs peut-être aux détracteurs qui voudraient que cet événement s’arrête en si bon chemin? Quoi qu’il en soit, le programme de cette année paraît riche, aussi bien éclectique que métissé, coloré et énergique. Jugez-en: Seun Kuti et son héritage, l’Egypte 80, les stars montantes Sandra N’kake et Sia Tolno, l’électrique Herve Samb et l’imaginatif Sonny Troupé.

Que du beau monde! The Syndicate, profondément africain, vient compléter cette brochure, en présence des meilleurs musiciens que le Godfather, feu Joe Zawinul avait fait jouer à ses côtés pendant sa longue et riche carrière. Aussi au rendez-vous, le gros son assuré cette année par les tonitruants du Big Motors conduits par le bluesman Eric Sardinas. Il y aura aussi des découvertes avec les jeunes prodiges belges Ananke et le duo chinois MR & amp; Miss, mais encore du jazz électrique avec Sylvain Boeuf et le LP septet. Comme d’habitude, les artistes algériens ont toujours une place de choix au Dimajazz.

En ouverture, Mamia Chérif promet de nous faire découvrir les charmes de sa voix avec son Jazzarab, mais aussi la cerise sur le gâteau, P’tit Moh qui tente un projet hardi avec le maître du flamenco-jazz, Juan Carmona et pour clore, excusez du peu, Yuri Buenaventura nous fera voyager dans les sphères du Latin jazz. Quoi dire de cette brochette d’artistes si ce n’est que la bonne musique vous sera servie avec toute sa palette de variations rythmiques. Sans doute que le public de Constantine fera assurément connaissance avec de nouveaux horizons. Il y aura des découvertes à l’instar de Mamia Chérif dont le répertoire est une exploration minutieuse qui, entre sons et émotions, donne une valeur initiatique à sa musique.

Mamia (chanteuse, auteure, compositrice) est née à Lille dans le nord de la France, de parents algériens; elle chante en arabe et se raconte en français. Pour Mamia, passer d’une langue à une autre, glisser d’un rythme à un autre, croiser sonorités d’Orient et d’Occident, c’est dire ses propres métamorphoses et la dualité féconde qui la constitue. Elle parle de la douleur du déracinement dans Algérie j’en pleure ou Silence des mots.

Dans Couscous Béchamel, au-delà de la souffrance, elle affirme aussi la force joyeuse née de l’appartenance à deux cultures. Enfin, c’est en adaptant Caravan de Duke Ellington ou les Feuilles Mortes de Prévert et Kosma qu’elle trouve sa liberté pour chanter l’amour. Le jazz, c’est par la danse (be-bop acrobatique) qu’elle a découvert et c’est en adaptant les standards du jazz en arabe, qu’elle a retrouvé ses racines. C’est tout naturellement que le jazz appelle le raï. «Pour moi, le jazz et le raï ont en commun le blues, nous dit Mamia Chérif. Avant d’être galvaudé, le raï portait une opinion, des idées. Il racontait la vie». Mamia Chérif, appelle son style «raï acoustique».

Il se tient résolument à la croisée des chemins du jazz et du raï. Pour sa part, Sandra N’kake est une diva soul au feeling pop rock. Après avoir été élue «révélation instrumentale française de l’année (Prix Frank Ténot)» aux Victoires du jazz 2012 lors du Festival Jazz in Marciac, Sandra N’kake s’est taillée une place au soleil parmi les valeurs sûres du jazz venu d’Afrique. Hervé Samb, quant à lui, pour ne citer que ça, est un jeune Sénégalais qui n’a jamais caché son goût pour l’asphalte jungle. A 11 ans, il chope le virus du blues et du rock: Jimi Hendrix…

Du coup, il monte son premier band à Dakar, la ville où il vibre. Mais surtout il croise la route du guitariste belge Pierre van Dormael qui lui montre le chemin. «J’étais sur le blues, il m’a mis sur le jazz. Et même plus. Il m’a surtout appris à apprendre…» 10 ans plus tard, ce sont toutes ces musiques qu’il filtre entre ses doigts: «J’ai trouvé ma voie dans la fusion entre l’Afrique ethnique et les musiques telles que le jazz, le rock, le classique…»

Ce global mix se traduit par une polyvalence de tous les instants: le prolixe surdoué compte tout juste 35 ans plus de 100 albums au compteur, sans parler des projets scéniques! Hervé Samb a faim de musiques, au pluriel de ses suggestifs. «Le savoir me nourrit.» Telle est sa vision du monde de la musique, une ouverture d’esprit qui colle parfaitement au nouveau millénaire. Les exemples ne manquent pas de ce désir de jouer sur tous les terrains. C’est de cette ouverture sur l’Autre que tend à s’inscrire ainsi sur la durée le Festival Dimajazz et ce n’est que benef pour les mélomanes!