Médéa : le lycée Bencheneb Mohamed en péril

Médéa : le lycée Bencheneb Mohamed en péril

2013-11-stele_chouhada_802222289.jpgLe lycée Bencheneb est traîné au temple de l’incongru pour être sacrifié sur l’autel du vandalisme.

Créé par décret impériale sous Napoléon III en 1869, et inauguré en 1873 comme Ecole primaire Supérieure, le lycée Bencheneb a été tour à tour Collège colonial puis Municipal et enfin Collège national. A la mort du polyglotte, et érudit Dr Mohamed Bencheneb, en février 1929, les autorités coloniales décidèrent quelques mois plus tard, de baptiser le seul collège de la ville en son nom.

A l’appel du FLN, en mars 1956, il finira par faire l’histoire et devenir le creuset du nationalisme, pas moins d’une centaine de jeunes lycéens abandonnèrent ses bancs, pour aller grossir les rangs de l’ALN, dont, pas moins d’une cinquantaine, y laissèrent leur vie, morts en chahids, les armes à la main, d’autres plus chanceux finiront par devenir des cadres supérieurs civils et militaires du pays postindépendance.

La restauration de cet édifice éducatif fait partie d’une conséquente enveloppe financière allouée par l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine éducatif colonial à travers tout le pays, pour la seule région centre pas moins de trois lycées y sont inscrits : le lycée Emir Abdelkader, ex-Bugeaud d’Alger, le lycée Ibn Rochd, ex-Duveyrier de Blida et le lycée Bencheneb de Médéa.

Pour ce faire, un bureau d’études d’Alger, le même qui a défiguré bien de patrimoines historiques à Médéa : Dar El émir Abdelkader, le minaret de la mosquée Rouge, la tour de M’Sallah pour ne citer que ceux-là. Le talent franchement rénovateur, loin d’être restaurateur de cette agence, a fait perdre tout le charme, la sérénité, la somptuosité et surtout l’âme historique de ces édifices, sous d’autres cieux, la restauration du patrimoine historique relève de tout une équipe de spécialistes pluridisciplinaires, de l’architecte, de l’ingénieur en génie civil, du sociologue et de l’historien, d’artistes, de céramistes, de laborantins même, dans notre pays c’est le paradoxe, on s’évertue au faire-valoir spécialiste sans vraiment maitriser la technicité .

Notre tentative d’en savoir plus sur la fiche technique de ce projet a été vaine, le prétexte fallacieux présenté par son responsable pour se dérober à notre rendez-vous, n’est pas si convaincant, le même son de cloche nous a été joué par la Direction du logement et des équipements publics,apparement l’omerta étant de mise. L’absence de la direction de la culture et de son service de protection du patrimoine est incompréhensible, qui ne dit mot, consent dit l’adage ! Qu’importe, il est des vérités qu’on ne saurait taire tel cette confusion des verbes restaurer et rénover que nos techniciens en bâtiment ne savent pas conjuguer, l’édifice étant bâti en pierre, ne voilà-t-il pas que le massacre a déjà commencé par le crépissage de 2 classes en ciment noir en lieu et place du mortier bâtard, une combinaison de 50% de chaux et 50% de ciment, une technique utilisé pour permettre à la pierre de « respirer », le sous bassement attend lui aussi cette prévisible incurie.

Qu’en sera-t-il, demain, des appliques électriques, des classes, de la cuisine, de la cour et de la cloche ? Des appréhensions que l’association des Anciens du lycée Bencheneb doit faire siennes pour monter au créneau et stopper cette forfaiture. A signaler toutefois, des opérations sporadiques de renforcement (le chainage, les procédés métalliques, le fameux S, traversant de bout en bout l’édifice, et enfin le chemisage) furent tour à tour entreprises pour consolider la bâtisse, suite aux différents séismes qu’a connu notre pays de 1954 jusqu’à l’année 2000, sans pour autant, porter un quelconque préjudice historique à la structure et à la mémoire collective. Autres temps, autres mœurs, allez savoir !

Brahim Ferhat