Les lobbies du médicament aimeraient casser Saïdal

Les lobbies du médicament aimeraient casser Saïdal

Clipboard12.jpgParler d’une entreprise aussi importante que Saidal n’est pas aisé.

L’itinéraire de ce groupe pharmaceutique est assez particulier.

Ce groupe qui a tout pour réussir et se positionner en tant que leader de l’industrie pharmaceutique nationale et du médicament générique en Algérie a été ébranlé par des actions de sabotage et des mini-crises qui ont freiné son évolution et certains de ses projets phares, dont l’usine de production de vaccins contre l’hépatite B montée en partenariat avec le laboratoire cubain, Heber Biotic.

Prévue pour le début de 2009, l’usine n’a pas encore vu le jour. La production de ce vaccin devait satisfaire la demande nationale, de l’ordre de 5 millions de flacons, mettant ainsi fin à l’importation.

Le méga projet concernant la création de l’usine d’insuline à Constantine a failli ne pas se concrétiser.

Sans parler des autres projets d’investissement qui traînent. Il faut dire que le groupe pharmaceutique vit une situation de transition depuis plus d’une année, soit après le départ de l’ancien P-DG, Ali Aoun auquel succèdera Rachid Zaouani, mais en tant que directeur général intérimaire.

Tout au long de la semaine, nous avons tenté de le contacter, en vain.

De plus, selon un appel à candidature pour le poste de directeur général du groupe Saïdal paru dans plusieurs quotidiens, le groupe Saidal pourrait se retrouver, encore une fois, avec un autre responsable à sa tête.

Et ces changements de direction, qui sont synonyme de changements de stratégies, sont improductifs pour le groupe.

Outre les soubresauts l’ayant secoué ces dernières années, le débat sur une éventuelle privatisation du groupe a été intense.

L’option «nationaliste» a finalement pris le dessus. Sans oublier les rapports tendus ayant caractérisé les relations entre Saidal et la Pharmacie centrale des hôpitaux (PCH), l’un de ses clients et le seul organisme public habilité à approvisionner les hôpitaux en médicaments.

En dépit des orientations du président Bouteflika encourageant la production nationale et des dernières lois sur l’interdiction d’importer les médicaments fabriqués localement, la PCH n’a pas hésité à passer des commandes pour l’importation de quantités de Tamiflu des laboratoires Roche, l’anti-viral qui était préconisé dans le traitement de la grippe aviaire, et porcine ensuite, alors que Saidal l’avait déjà produit sous le nom commercial Saïflu et constituait un stock important (un million de doses).

S’agissant de l’insuline produite par Saidal, la PCH n’en achetait que le 1/10e, le reste étant acquis auprès des laboratoires étrangers.

Pour rappel, l’usine d’insuline ultra moderne de Constantine, inaugurée en avril 2006, après de multiples blocages, reports et tentatives de sabordage, a été victime d’un acte de sabotage la veille même de son inauguration.

Le président Abdelaziz Bouteflika avait, lors de l’inauguration, haussé le ton contre ceux qui ont bloqué la fabrication de l’insuline en Algérie et retardé le projet de Constantine dans le but de maintenir l’importation de ce produit vital pour les diabétiques.

Le chef de l’Etat avait même, à cette occasion, annoncé qu’une enquête a été ouverte pour connaître les dessous de l’affaire.

L’unité de production d’insuline de Constantine fait face à de nombreux obstacles.

Produisant de l’insuline en flacon, avec des capacités installées de 5 millions d’unités (UV), elle limite aujourd’hui sa production à 2,7 millions d’UV seulement, à cause des entraves rencontrées lors de la phase de commercialisation.

Malgré les prix largement concurrentiels, la PCH limitait ses commandes auprès du groupe Saidal.

La même situation est constatée pour l’ensemble des médicaments que le groupe fabrique, dont tous les génériques importés auparavant qu’il propose à la vente 30% moins cher.

Le groupe, qui a réussi le transfert de la technologie et du savoir-faire, est exposé à une concurrence déloyale et à des coups bas qui ont fait chuter son taux de croissance de 24% en 2007 à 8% en 2008.

L’aboutissement des ambitieux projets d’investissement de Saidal contribuerait à n’en point douter à réduire la facture d’importation de médicaments en assurant l’indépendance du marché national en cas de rupture d’approvisionnement par les laboratoires étrangers.

Mais, apparemment, les nombreuses réalisations de Saidal ne sont pas du goût des lobbies du médicament.

Le marché est marqué actuellement par une concurrence impitoyable soumise à la loi de la mafia de l’import dont l’objectif est de casser les producteurs nationaux.

Les pouvoirs publics vont-ils céder aux pressions et au monopole des barons du médicament qui veillent à la préservation de leurs intérêts et non à celui des malades ?

Notons, qu’en 2008, les importations de médicaments ont atteint 1,8 milliard de dollars.

La nouvelle politique nationale du médicament, qui oblige les laboratoires étrangers à investir dans la production en Algérie, et les récentes mesures interdisant l’importation des médicaments fabriqués localement devraient permettre de réduire la lourde facture.

Un voeu pieux si l’on se réfère à la situation actuelle et au monopole des lobbies de l’importation pour qui le marché du médicament représente une véritable mine d’or.

Amel Bouakba