La “guerre d’Algérie vue par les Algériens” de Benjamin Stora et Renaud de Rochebrune : La résonance singulière de l’équipe du FLN.

La “guerre d’Algérie vue par les Algériens” de Benjamin Stora et Renaud de Rochebrune : La résonance singulière de l’équipe du FLN.

l’heure où l’on parle beaucoup des Fennecs dans les rues et les salons, le Tome deux de la «Guerre d’Algérie vue par les Algériens » de Renaud de Rochebrune/Benjamin Stora (Paris, Denoël) sortis dans les librairies françaises, nous rappelle une autre histoire de l’équipe nationale, celle de la légendaire équipe du FLN.

Le livre de Stora et Renaud de Rochebrune pointe- en en bonifiant la portée/résonance – une autre page footballistique algérienne. Les deux auteurs y refont le match, mais un match différent de celui qui a mis aux prises, dimanche soir à Blida. Fennecs aux Lions Indomptables.

Dans le match revisité par Stora/de Rochebrune, il n’est pas question — comme à Blida — d’un challenge consistant à s’adjuger le sésame pour Russie 2018. L’enjeu est autrement plus décisif, autrement plus capital pour l’Algérie : l’usage du ballon rond et de sa caisse de résonance au service de l’Algérie en guerre.

Le duo Stora-de Rochebrune refait le match en moins de 90 minutes. Une poignée de minutes, le temps de donner à lire quatre pages (125-128). Amplement suffisant pour faire valoir comment une bande de footballeurs s’est reconvertie, balle « diplomatique » au pied, en un bataillon (pacifique) de combattants.

Lu sous un angle footballistique, « La Guerre d’Algérie vue par les Algériens » a le mérite de souligner la portée de l’évasion spectaculaire du 13 avril 1958 qui a fait « siffler » les téléscripteurs des agences de presse internationale.

Voulus par les deux auteurs comme une remise en perspective de la guerre d’indépendance algérienne et le réexamen de son long feuilleton à travers une sommes de dates fondatrices/décisives, les deux tomes « revisitent » le combat des Algériens en en fixant des séquences chronologiques emblématiques/lourdes.

Une grande portée

La date du 13 avril 1958 et son prolongement diplomatico-footballistique en fait partie. Entre la bataille d’Alger et l’indépendance sur fond de luttes fratricides entre frères d’armes, l’évasion des footballeurs « Français musulmans d’Algérie » y occupe une place importante.

« Pour remonter le moral de la population (algérienne) qui, en cette période indécise, risque de se détourner quelque peu de son combat, le FLN peut aussi compter pendant cette difficile année 1958 sur un ATOUT INÉDIT et apte à susciter l’adhésion populaire : la création d’une équipe de football de très haut niveau, soulignent Stora et Renaud de Rochebrune.

Celle-ci portera désormais les couleurs du FLN et fera acclamer son drapeau dans les stades tout autour de la planète malgré le refus de la Fédération internationale, la FIFA, de la reconnaître comme membre représentant un pays ».

Les travaux historiques et les recherches n’ayant pas encore permis de savoir « avec certitude » l’identité de l’acteur qui « a eu le premier l’idée de ce coup de pouce au FLN ». Ce dont ils sont sûrs cependant : l’évasion spectaculaire des footballeurs « FMA » et la mise sur pied de l’équipe de l’Algérie combattante ont servi de véritable caisse de résonance au service de la Révolution. « Le coup de pouce s’avérera un remarquable coup de communication ».

Ferhat Abbas : « Ils ont fait gagner des années à la cause de l’indépendance »

Accueillis en Suisse par Ferhat Abbas — qui n’est pas encore président du GPRA –, les membres d’un des groupes déserteurs sont salués par le futur Président. « Il leur dit qu’ils ont fait gagner des années à la cause de l’indépendance », notent les auteurs en rappelant une rencontre – malheureusement –sans images.

« Couronnée de succès », la mise sur pied de l’équipe du FLN — une « initiative pacifique » — « peut apparaître comme un symbole de la nouvelle étape dans laquelle est entrée la guerre en 1958 ». Et pour cause : avec l’arrivée du général de Gaule à la tête de l’Exécutif, « il est définitivement clair que l’issue du conflit ne sera pas décidé par le seul recours aux armes.

De Gaulle, le recensement de ses déclarations publiques comme privées le prouve, en est déjà certainement persuadé. Pour l’Armée de Libération Nationale, c’est devenu une évidence : c’est bien par la négociation que tout se réglera et la position du FLN au niveau international jouera à cet égard un rôle essentiel (…) Le temps des armes n’est donc pas dépassé pour autant, même si le temps de la politique va désormais prendre toute sa place ».

À coup de tournées à succès et à coup d’audiences médiatiques avec des figures de la vie internationale au rang desquels Ho Chi Minh et Giap, l’équipe du FLN sera partie prenante du « temps de la politique ».