Il y a 9 ans le séisme de Boumerdès: La secousse qui révéla tout

Il y a 9 ans le séisme de Boumerdès: La secousse qui révéla tout

arton4723.jpgC’était une journée inhabituellement chaude d’un mois printanier. C’était une journée de printemps, mois du renouveau, d’espérance, de bonheur et une période propice aux serments des amoureux qui préparent leur plus beau jour.

Il était 19 heures 44 minutes, ce mercredi 21 mai de l’an 2003. Brusquement, des entrailles de la terre parvenaient de terribles grondements, le sol ondulait, les maisons chancelaient, le rivage de la Méditerranée se vidait de son eau turquoise, la pénombre tombait sur les cités et les villages. Le temps s’est figé.

Un long silence drapait l’atmosphère. Rien n’était réélu… Puis des nuages de poussière montaient, les cris de douleur. La Faucheuse se livrait à une course macabre pour prélever sa dîme. A Dellys, des hommes, des femmes et des enfants chantaient et dansaient pour le bonheur d’un homme et d’une femme qui venaient de s’unir pour la vie, 80 d’entre eux ainsi que les deux mariés ne verront plus jamais le soleil briller sur leur ville millénaire.

Zaky et Louiza emporteront à jamais leur beauté et laisseront une douleur incommensurable dans le cœur de leur maman. Les régions de la Basse-Kabylie et de l’est de l’Algérois viennent d’être secouées par un terrible séisme et l’Algérie subissait une catastrophe majeure, celle causée par la nature et les cycles de la vie mais révélatrice du laxisme érigé en mode de gestion des affaires de l’Etat.

Le tremblement de terre d’une magnitude de 7,2 sur l’échelle de Richter a été localisé à l’intérieur de la mer, à 7 km au nord de l’embouchure de oued Isser, dans la commune de Zemmouri, agglomération située à 16 km à l’est de la ville de Boumerdès (ex-Rocher noir). L’onde de choc qui a traversé tout le centre du pays allant de Tizi-Ouzou vers l’est d’Alger a causé des destructions massives.

Dellys, Sidi Daoud, Zemmouri, Bordj Ménaïel, Thénia et surtout le chef-lieu de wilaya ont été les villes de Boumerdès les plus touchées par la secousse tellurique. Pour la wilaya d’Alger, c’est Réghaïa, avec notamment l’effondrement du fameux immeuble numéro 10, qui a été la plus touchée. 19 744 infrastructures publiques et privées notamment, des immeubles d’habitation, des mosquées, des établissements scolaires, universitaires et sanitaires, des maisons individuelles, des ponts ont été complètement détruits dans la seule wilaya de Boumerdès. La wilaya de Boumerdès a, par ailleurs, déploré 1 391 morts et plus de 10 000 blessés.

A ce sinistre, il y a lieu d’inclure les victimes et les dégâts enregistrés dans l’est de la wilaya d’Alger et l’ouest de Tizi-Ouzou. Au total, le bilan faisait état de 2 300 décès dans les trois wilayas et les dégâts ont été estimés par le gouvernement à 5 milliards de dollars. Le tremblement de terre du 21 mai 2003 a été un grand révélateur quant au comportement de la société algérienne mais surtout sur les failles dans la gestion des affaires de l’Etat.

Quelques minutes après le drame, le dévouement de la jeunesse algérienne et la solidarité séculaire du peuple se sont révélés au grand jour. Des exemples héroïques venus de jeunes, premiers à accourir sur le front de la calamité pour aider les victimes, étaient légion.

Il y a aussi le comportement de la population des autres régions du pays qui ont fait abstraction des divergences politiques ou culturelles pour venir en nombre apporter compassion et aides alimentaires aux victimes.

Il y avait un tel déferlement de véhicules transportant des secours que les autorités ont dû faire appel pour une meilleure organisation des aides. La réaction des corps médicaux et paramédicaux a été très rapide et à la hauteur du drame.

Ces corps de santé ont dû travailler souvent dans les décombres. En dépit de leur situation personnelle et des destructions subies par tous les réseaux, des fonctionnaires des P et T, des agents de la Sonelgaz, de l’ADE, de l’hydraulique, ont déployé d’immenses efforts pour la continuité des services publics.

Il y a lieu aussi de rappeler le comportement des officiers des services de sécurité qui n’avaient pas attendu les ordres des états-majors pour sortir de leurs casernes, brigades ou commissariats afin de secourir leurs compatriotes : comme ce commandant de l’ANP qui se retrouvait unique autorité devant la population de Sidi Daoud.

En plus de la situation dramatique dans laquelle se retrouvait la localité avec des dizaines de morts et des centaines de blessés, l’officier en question a dû faire face à des terroristes haineux de l’ex-GSPC qui s’apprêtaient à commettre un attentat à la bombe.

En matière de solidarité internationale, on s’est aperçu que le peuple jouit de l’affection grandissante de la communauté internationale. Paradoxalement, ce sont les sapeurs-pompiers du pays, hier ennemi, la France en l’occurrence, qui sont arrivés, la nuit même du drame. Ils ont été très rapidement suivis par ceux de nos frères du Maroc et de la Tunisie.

Quelques mois plus tard, Nicolas Sarkozy est venu prendre le thé avec les sinistrés de Corso et remettre un chèque d’aide de 50 millions d’euros au gouvernement algérien. La société civile internationale, européenne notamment, n’était pas restée les bras croisés devant nos malheurs. Malheureusement, de graves tares concernant la gestion des institutions de l’Etat et des collectivités locales ont surgi.

Un grand nombre de victimes décédées et des dégâts enregistrés ont été imputés à l’effondrement de bâtisses construites en violation des règles d’urbanisme.

Les citoyens et les victimes découvraient, avec effroi, que le sang coulé de leurs proches est la conséquence d’une corruption qui gangrenait le secteur de la construction et de l’habitat. L’Etat, pour avoir laissé faire des maquignons de la construction, porte une partie des responsabilités. En 2012, personne n’a été sanctionné et presque rien n’a changé puisque la construction illicite s’érige chaque jour au vu et au su de tous les responsables, et des bâtisseurs véreux sévissent toujours.

Abachi L.