Il met dos à dos pouvoir et opposition et trace son propre chemin, L’énigmatique Rachid Nekkaz

Il met dos à dos pouvoir et opposition et trace son propre chemin,  L’énigmatique Rachid Nekkaz

2014-rachid_nekkaz_600_721957678.jpgLe périple de Rachid Nekkaz à travers le pays continue

Il se construit un profil atypique, celui d’un politique «hors normes» qui va là où tous les autres réfléchissent à deux fois avant d’y mettre les pieds.

Le périple de Rachid Nekkaz à travers l’Algérie continue. Il est encore au dixième du parcours qu’il compte entreprendre pour, dit-il, sensibiliser contre l’exploitation du gaz de schiste. Cette action plutôt bizarre dans les milieux politiques algériens, apporte à Nekkaz la crédibilité et la légitimité qui lui manquent pour se faire adopter par la société algérienne.

Venu sur la scène nationale à l’occasion de la dernière élection présidentielle, après avoir demandé la déchéance de sa nationalité française, Nekkaz qui a «inventé» une invraisemblable histoire de vol de parrainages, a «loupé» la campagne électorale, mais il a réussi à faire le buzz. C’est justement là, la formule de cet «homme politique» qui ne cadre pas du tout avec les standards algériens. Mais il s’accroche et pour lui, c’est cela le plus l’important. Patiemment, mais sûrement, Rachid Nekkaz se construit un profil atypique, celui d’un politique «hors normes» qui va là où tous les autres réfléchissent à deux fois avant d’y mettre les pieds.

Il est parti à Ghardaïa, au plus fort des affrontements entre les populations. Il est le premier à avoir vu dans les «turbulences» antischiste, matière à faire du buzz. Et pas une petite étincelle «et puis s’en va». Non, l’homme réfléchit ses actes, leur donne de la suite. En d’autres termes, il construit un vrai scénario autour de chaque action qu’il mène. Il invite les Algériens à le suivre dans ses «aventures décalées». Il le fait très bien, avec un sens aigu de la communication. Et pour cause, c’est l’Algérien le plus prolixe en matière de production de contenu Web. C’est justement là son point fort. S’il fait le buzz c’est qu’il s’en est donné les moyens. Qu’on en juge, rien que sur Facebook, Nekkaz et son équipe ont ouvert près d’une centaine de comptes et de pages. Il arrive à rassembler des centaines de milliers de «vus» pour ses activités. Il convient de relever que toutes les actions sont soigneusement préparées. Les postes qui lui sont favorables sont infiniment plus importants que ceux qui le dénigrent. L’une de ses pages Facebook, la plus regardée, est forte de près de 463.000 supporters. Tout ce beau monde, mais aussi leurs amis, suivent au jour le jour, la progression de sa marche du nord au sud du pays. Cela fait un total de plusieurs millions d’Algériens de tout âge qui savent que Nekkaz traverse l’Algérie de bout en bout. Cette façon de communiquer fait que l’homme se distingue des autres politiques. Il évolue en dehors du système et de l’opposition classique. Il tient un discours différent, ne se mêle jamais de la cuisine interne des partis de l’opposition et du pouvoir, il ne parle pas frontalement d’alternance démocratique, ni de nouvelle Constitution. Il se contente de surfer sur la vague du mécontentement social, va jusqu’au plus profond du pays, discute avec les Algériens de modeste condition et prend le soin de communiquer son activisme au plus grand nombre via l’Internet. On l’a vu dans beaucoup de plateaux de télévision. Et là aussi, il développe un discours qui peut paraître décousu, mais ce qui lui importe, ce n’est pas tant le message que l’image. Il veut exister en Algérie. Et il arrive petit à petit à le faire. Chaque interpellation lui procure un peu plus de légitimité et de crédibilité. Il parvient même à instrumentaliser ces épisodes à travers une communication sereine, mais qui fait mouche.

Rachid Nekkaz n’est pas ce qu’on pourrait appeler un homme politique, mais lui se présente ainsi et tente de convaincre les Algériens de changer de vision. Et il faut bien reconnaître, qu’à la lecture des commentaires sur Facebook, il commence à réussir jusqu’à un certain niveau. On le voit mal donner corps à son Mouvement pour le changement et la justice (MJC), mais la sympathie qu’il récolte auprès des internautes pourrait très bien trouver son chemin vers la vraie vie.

Il est clair que Nekkaz n’a certainement pas l’intention de rester au virtuel. Même s’il ne le dit pas encore, il serait fortement intéressé de «financer» des listes électorales pour les élections législatives et locales de 2017. Pour l’heure, sa communication s’astreint au gaz de schiste, mais rien ne lui interdit d’enfourcher un autre cheval, à partir de 2016. L’homme dispose d’une puissance financière non négligeable, qui pourrait l’orienter vers des objectifs politiques précis.

Face à cet activisme débordant, l’Etat ne fait pas grand-chose. D’ailleurs, les observateurs et même les professionnels du renseignement disent que tant qu’il conserve sa nationalité algérienne et qu’il ne commet aucun délit punissable par la loi, il peut aller et venir et se réunir avec qui il veut. C’est ce qu’il fait, avec cette tendance à vouloir internationaliser certaine question algérienne, à l’image de celle du gaz de schiste ou de Chakib Khelil qu’il menace de poursuites judiciaires à New York. Cette tendance à l’internationalisation lui fait coller l’accusation d’être le BHL algérien.

Ces collusions, non encore prouvées, avec des capitales étrangères, lui valent des critiques acerbes de la part de ses détracteurs. Ces derniers l’accusent de travailler pour le compte d’agendas étrangers et craignent sa popularité grandissante.

Le jour venu, montrera-t-il ses véritables desseins? Pour l’instant, il est dans la wilaya de M’sila en direction du sud du pays. Il dresse sa tente dans le Sahara, discute avec tout le monde, prend des Selfys et les poste sur ses dizaines de comptes Facebook. Il reçoit plein d’encouragements. En un mot, il travaille d’arrache-pied pour le «grand jour».