En Algérie, les conservateurs en campagne contre les porteuses du « hijab qui dévoile » (Moutabarij)

En Algérie, les conservateurs en campagne contre les porteuses du « hijab qui dévoile » (Moutabarij)

2014-600_267835898.jpgLe « hijab » n’est plus ce qu’il était se désolent les conservateurs et les islamistes algériens qui n’apprécient pas la manière dont les jeunes filles adaptent l’accoutrement dit islamique.

Le hijab « strict » est toujours là, le hijab « radical » avec niqab couvrant le visage a fait des incursions, mais des variantes plus « in » du hijab se sont développées dans de nombreux pays arabes et musulmans.

Chez les jeunes filles, la tendance la plus en vogue est de se couvrir la tête tout en portant des jeans ou des fuseaux. Ce sont ces jeunes filles qui restent « branchées » tout en portant le hijab qui suscitent le courroux des conservateurs et des islamistes. Elles sont accusée de « subvertir » le vêtement islamique ou de le « vider » de son contenu.

Ce hijab new-look qualifié de « hijab moutabaraj » (qui dévoile) serait encore plus « tentateur » en direction des mâles que l’absence de hijab. Le thème est d’ailleurs récurrent dans certaines mosquées dont les imams ne peuvent pas s’empêcher de parler des femmes chaque vendredi.

Dans son édition d’aujourd’hui, le journal Echourouk se fait l’écho et le porte-voix d’une « campagne de rectification » dans les universités, les écoles et les entreprises menée contre le « hidjab dévoilé » (Motabarij) qui, selon ses initiateurs, est entrain de « détruire la pudeur en Algérie ».

Des Fitna sur terre!

Dans un long article, le journal s’interroge sur la « licéité religieuse » de ce hidjab new wave qui se répand parmi « nos jeunes filles ». Il y répond rapidement : cet habit n’a rien à voir avec le « vrai hijab ». Bref, cet habit qui consiste à mettre un foulard sur la tête avec en « bas » une jupe, un jean ou un « fuseau moulant » horrifie les conservateurs et les islamistes en général. Comble du scandale, s’indigne Echourouk, les « cabarets sont pleins de celles qui s’habillent ainsi »…

Le journal évoque une dizaine de campagnes menées dans les universités algériennes pour combattre ce « hidjab moderne » qui fait des jeunes filles « des fitna (séditions) marchant sur terre se drapant d’habits étroits, moulants et aguichants ». Ces jeunes filles, vitupère le journal, « portent atteinte à la crédibilité de cet habit islamique en le transformant en simple fichu couvrant les cheveux, sans plus ».

Echourouk apporte en général un soutien médiatique à ces campagnes. Ce fut le cas en mai 2013 pour la campagne intitulée « ils ont dit, laisse tomber le hijab » menée par les étudiants islamistes de l’Ugel à l’université de Bab Ezzouar. La campagne a été justifiée par l’approche de l’été qui incite « au dénudement et à la dissolution morale au sein de l’enceinte universitaire ».

Bilan de la campagne : 50 étudiantes ont rejoint la « pudeur » et ont reçu un « hidjab de haute qualité en cadeau de leur décision ». En 2013, il faisait état d’un sondage, réalisé par l’UGEL, où 70% des 1000 étudiantes sondées, disent avoir « reporté » le port du hidjab jusqu’au mariage.

Les résultats du « sondage » s’alarmait Echourouk, « ont constitué un choc » car montrant une « faiblesse fondamentale dans la foi », la majorité des étudiantes considérant le hidjab comme un des « principaux obstacles au mariage ».

Le journal semblait même s’étonner de voir que de nombreuses étudiantes disent vivre dans des familles qui refusent le hidjab en raison de leur mentalité « ouverte » (les guillemets sont du journal) et le considèrent « comme une entrave à la liberté de la femme et un symbole de la réaction » selon les assertions de ces familles »!

C’est, a-t-il dénoncé, un sondage « choquant » qui révèle un « phénomène étranger à la nature des familles algériennes connues pour leur conservatisme et authenticité » a poussé l’UGEL à mener une « campagne nationale de « tahjib » (traduisible par « hijabisation ») avec comme cadeau offert des « hidjab de haute qualité »

Echourouk rappelle une campagne « nationale », très controversée, menée par l’association Daawa à Ouled Yaïche (Blida) pour la « hijabisation » des fillettes de moins de 15 ans. Cette campagne, affirme le journal, « a été soutenue par des dizaines d’hommes d’affaires qui ont fait des dons financiers pour distribuer des récompenses et un « hijab » à toute petite fille qui le souhaite ».

La « campagne de chasteté » avait été vivement dénoncée à l’époque par Mme Chaia Djafri, présidente de l’Observatoire algérien de la femme, qui y voit une atteinte à l’innocence de « gamines à peine pubères ».

Mme Djafri est citée aujourd’hui par Echourouk où elle dénonce vertement le « hidjab moderne ». Je suis, dit-elle, « pour la modération et la pudeur dans la manière de se vêtir que ce soit pour celle qui porte le hidjab ou non. Ce que l’on voit aujourd’hui des filles dans les rues n’est pas acceptable.

D’un côté, elles mettent un khimmar (foulard) pour se couvrir la tête alors qu’elle porte en bas un fuseau moulant, un jean ou une jupe transparente…. Les filles en hidjab sont devenues plus ciblées par le harcèlement que celles qui ne le portent pas ! ». Mme Djafri s’indigne de voir certaines de jeunes en hijab « moderne » porter des fuseaux « qui ressemblent à la couleur de la peau ».

Le Hijab new-look est décidément bien « subversif ». Les conservateurs et les islamistes n’arrivent pas « à détourner le regard » comme les y incitent les enseignements de la religion.