Abdelmadjid Menasra aux responsables algériens, “Vous exécutez des agendas étrangers”

Abdelmadjid Menasra aux responsables algériens, “Vous exécutez des agendas étrangers”

2012-Abdelmadjid_Menasra__20__523514379.jpgLe président du Front du changement

Suite à l’adoption par l’Assemblée populaire nationale de la loi portant protection de la femme contre la violence, les islamistes redoublent de férocité.

Le président du Front du changement a déclaré, hier, lors de la quatorzième édition du forum de son parti, dédiée cette fois-ci à la question de la femme et de la famille, «que la pauvreté est le principal vecteur de la violence dans notre pays» et que «la violence n’est pas systématiquement exercée contre les femmes».

La violence serait, selon Abdelmadjid Menasra, un fait de société qu’il convient de combattre par «le développement, la culture et l’éducation». Ainsi, réagissant à l’adoption de la loi amendant le Code pénal et qui vise à protéger les femmes contre la violence, le patron du Front du changement a soutenu mordicus que «les textes à eux seuls ne changent rien». «Ce qui intéresse les autorités algériennes sont les satisfecit des institutions internationales et non pas la situation concrète de la femme algérienne. Les chiffres relatifs au nombre de femmes occupant des postes de responsabilité ou dans le champ politique ne changent rien à leur réalité.»

Avant Menasra, nombre de femmes, notamment des avocates et des militantes politiques et associatives, se sont succédé à la tribune du forum pour dénoncer cette loi qui, selon elle, «va disloquer la famille algérienne».

Mme Gharbi, responsable de la femme et de la famille au bureau national du FC, a vigoureusement «rappelé» que l’islam protège la femme» et que «la famille est le fondement et l’avenir de la société». Fatima Benbraham, militante associative, a, elle, tiré à boulets rouges sur la loi avalisée récemment par l’APN, en considérant qu’elle constitue un «dérapage», car, a-t-elle insisté, «la violence contre la femme n’existe pas en Algérie».

«La violence qui existe est marginale et elle ne concerne pas la femme. Elle est en plus le résultat de notre éloignement de l’islam,» a-t-elle ajouté. Mais pas seulement. Fatima Benbraham s’est attaquée aussi bien au pouvoir, aux partis qui le soutiennent qu’aux partis de l’opposition démocratique qui ont soutenu la loi en question, en les accusant ouvertement «d’exécuter des agendas étrangers établis par le Conseil européen».

Ainsi, tous ceux qui soutiennent la loi protégeant la femme contre la violence, serait, selon l’invitée du FC, des agents de l’Occident, plus particulièrement de la France. Fatima Benbraham en veut pour preuve l’énoncé du préambule de loi qui dit que celle-ci a été faite «conformément à nos obligations internationales». Cette dame veut-elle, en disant ceci, isoler l’Algérie de ses partenaires étrangers et des institutions internationales?

Cette dame n’a-t-elle pas vu le FFS, le FLN, le RND, le MPA, le PT, etc., voter cette loi et la défendre? Ces partis seraient-ils tous des relais de l’Occident en Algérie?

Nora Kherbouche, députée de l’Alliance de l’Algérie verte, a elle aussi, décrié cette loi, qu’elle a jugée dangereuse pour la cohésion de la famille algérienne. Pis encore, Mme Kherbouche a carrément accusé les instances de l’Assemblée populaire nationale d’avoir fraudé lors du vote de cette loi, en «invitant des fonctionnaires de l’APN à lever leurs mains à la place des députés». Cette militante islamiste s’est dite résolue à lutter jusqu’à ce qu’un terme y soit mis.

Par ailleurs, Aïcha Belhadjar, militante associative, ainsi qu’un avocat invité à donner un exposé, pour justifier leur opposition à la loi en faveur de la femme, sont allés plus loin en convoquant des versets coraniques de la sourate de la femme pour dire que «l’islam permet à l’homme de battre sa femme».

L’avocat est allé encore plus loin, théorisant au passage la violence à l’égard des femmes, en affirmant que des savants musulmans ont prescrit comment, quand, combien et où battre sa femme et, tenons-nous bien, dans l’objectif de «l’éduquer».

En gros, il ressort de ce forum pourtant sur «les réformes législatives et la famille algérienne», organisé par le Front du changement, parti islamiste se revendiquant de l’héritage nahnahien, que les islamistes sont fondamentalement hostiles à toute forme d’émancipation individuelle de la femme, y compris la femme.

Les femmes présentes au forum ont toutes d’ailleurs, à l’unanimité, soutenu, les unes directement et les autres indirectement, que la femme ne peut avoir nulle existence en dehors de la famille.

Mais cette position d’essence fondamentalement islamique est-elle une conviction religieuse qui se prolonge dans le champ politique ou simplement une position populiste visant à surfer sur une vague misogyne culturellement avérée d’une partie de la société algérienne? Abdelmadjid Menasra est resté résolument vague sur ce point.